L'affaire des pertes colossales subies par JPMorgan Chase sur des opérations de marché devrait conduire lundi le PDG de cette banque américaine, Jamie Dimon, à se séparer de l'une de ses plus proches collaboratrices.
Selon le New York Times (NYT) et le Wall Street Journal (WSJ), M. Dimon devrait accepter la démission d'Ina Drew, qui, en sa qualité de directrice du placement, supervisait ces opérations.
Agée de 55 ans et dans la maison depuis trois décennies, Mme Drew «a présenté se démission à de nombreuses reprises depuis que l'ampleur des pertes a commencé à devenir apparente fin avril, mais M. Dimon s'est abstenu jusqu'à maintenant de l'accepter», indique le NYT, citant plusieurs dirigeants de la banque.
Le journal note que le départ de ce «lieutenant de confiance» de M. Dimon marquerait «un retournement de fortune spectaculaire pour l'une des femmes les plus puissantes de Wall Street».
«Deux opérateurs de marché qui travaillaient pour Mme Drew ont aussi prévu de démissionner», ajoute le quotidien de New York.
D'après le Wall Street Journal, il s'agirait d'Achilles Macris, responsable de la salle des marchés de Londres à l'origine des pertes, et d'un des membres de son équipe, Javier Martin-Artajo.
Première banque américaine en termes d'actifs, JPMorgan, a annoncé jeudi avoir enregistré sur les six dernières semaines une perte de courtage de 2 milliards de dollars qui pourrait encore grossir.
M. Dimon avait indiqué ce jour-là que sa banque cherchait à comprendre comment ces pertes avaient pu se produire dans le cadre d'opérations destinées au départ à couvrir son exposition au risque de crédit encouru sur les prêts qu'elle octroie.
Vendredi, le WSJ avait rapporté que les déboires de JPMorgan étaient liés aux activités de couverture de la banque contre le risque en Europe.
«JPMorgan Chase a demandé à ses opérateurs de marché de faire des paris destinés à protéger la banque contre les retombées boursières de l'aggravation de la crise en Europe», écrivait le journal, «mais au lieu de réduire les risques, leurs paris compliqués se sont retournés contre eux».
M. Dimon a reconnu qu'il y avait eu «beaucoup d'erreurs, de manque de rigueur et de mauvais jugements», et que le problème avait été découvert à la suite d'un article du WSJ publié début avril et décrivant l'étonnement de la place financière de Londres face aux positions très risquées et massives d'un courtier français de la banque, Bruno Michel Iksil.
Selon le WSJ, M. Iksil devrait lui aussi quitter JPMorgan, mais à une date encore inconnue.
Dans un entretien diffusé dimanche par la télévision NBC, M. Dimon a concédé avoir «été totalement à côté de la plaque» en qualifiant d'abord les révélations du Wall Street Journal de «tempête dans un verre d'eau».
«Nous nous sommes trompés terriblement et de manière flagrante. C'est pratiquement inexcusable», a-t-il ajouté, défendant néanmoins la solidité de sa banque, qui a publié en avril un bénéfice net de 5,4 milliards de dollars pour le seul premier trimestre.
«Nous nous sommes infligés une blessure à nous-mêmes et nous avons nui à notre crédibilité, oui, et nous devons être entièrement prêts à en payer le prix», a encore dit M. Dimon lors de cet entretien réalisé vendredi, jour où l'action JPMorgan a perdu 9,28% à la Bourse de New York.
M. Dimon devra répondre de ces dysfonctionnement lors de l'assemblée générale des actionnaires de son entreprise prévue pour mardi à Tampa, en Floride (Sud-Est des Etats-Unis).