Il aura fallu près de six ans, mais les investisseurs floués de Norbourg reverront leur argent dès le printemps, dans le cadre de l’entente de 55 M$ annoncée mercredi.
De cette somme, l’Autorité des marchés financiers versera 20 M$, qui proviendra d’un fonds de « réserve pour éventualités » de 35 M$. « Ce n’est ni l’argent des contribuables, ni celui provenant des [cotisations des] membres », explique Sylvain Théberge, porte-parole de l’AMF. Ce fonds est financé à même le budget de l’AMF, qui peut le recapitaliser selon ses besoins.
Northern Trust et KPMG verseront l’essentiel des 35 M$ restants.
Concentra et le comptable Rémi Deschambault devront quant à eux débourser les quelque 3 M$ nécessaires pour compléter l'entente, dans les termes demeurent confidentiels.
Ces montants s'ajoutent aux indemnités déjà versées par le Fonds d'indemnisation des services financiers (FISF) de l'AMF (32 M$), aux sommes recouvrées lors de la liquidation du Groupe Norbourg (20 M$) ainsi qu'à celles retournées par Revenu Québec (6,7 M$).
Les investisseurs récupèrent donc la totalité des 113 M$ dilapidés par Vincent Lacroix à leurs dépens.
L'entente à l'amiable doit encore être approuvée par la Cour supérieure, et mettra fin à tous les recours intentés dans le cadre de l'affaire Norbourg.
Ainsi, la requête en autorisation d'intenter un recours contre la Caisse de dépôt est maintenant caduque. « Les défendeurs ne voulant pas avoir à témoigner à nouveau dans un recours éventuel contre la Caisse, ils ont exigé de mettre fins aux procédures », explique Jacques Larochelle, l'un des deux avocats qui représentent les investisseurs.
Six mois de négociations
C’est en juin 2010 que le juge en chef de la Cour supérieure, François Rolland, a invité les parties à entamer des négociations pour régler le dossier.
« Avec 13 sociétés ou individus visés par le recours collectif, le dossier était complexe », relate Serge Létourneau, l'autre avocat au dossier, pour justifier les délais requis pour arriver à une entente.
Y aurait-il eu des pressions pour qu'un règlement surviennent rapidement? Le départ du pdg de l'AMF Jean St-Gelais, l'impatience manifestée par Raymond Bachand à l'égard du FISF en décembre dernier, l'éventualité d'une libération conditionnelle très prochainement pour Vincent Lacroix....
Autant de facteurs militant pour un règlement rapide.
« C'est de la spéculation. Le fait qu'ils aient réglé quelques jours avant le procès laisse penser que c'est cette pression qui a été ressentie », rétorque Jacques Larochelle.
La force de la preuve –constituée de dizaines de milliers de pages— et les coûts exorbitants associés au procès prévu pour 138 jours auraient finalement eu raison de la résistance des défendeurs, pensent les avocats du recours collectif.
« Et un procès n’est pas bon pour la respectabilité des institutions », ajoute Serge Létourneau.
Plusieurs propositions de règlements ont été faites au cours des semaines, pour en arriver à l’entente actuelle. « Nous avons décidé de régler immédiatement à 1000 %, plutôt que d’obtenir 130 % plus tard », dit Jacques Larochelle.
C'est la première fois qu'un régulateur est ainsi attaqué en Amérique du Nord. il fallait prouver que l'AMF, qui bénéficie de l'immunité face aux poursuites, avait commis une faute grave et lourde de conséquence.