L'Autorité des marchés financiers ne craint pas que les mesures annoncées jeudi par l'Ontario pour réglementer le secteur des instruments financiers dérivés lui coupent l'herbe sous le pied.
« L'Ontario est actuellement en arrière des autres provinces canadiennes en matière de produits dérivés », a lancé jeudi le porte-parole de l'AMF, Sylvain Théberge, au cours d'un entretien téléphonique avec La Presse Canadienne.
« On peut peut-être comprendre que (Queen's Park) voulait rattraper un certain terrain perdu dans ce domaine », a-t-il ajouté.
M. Théberge a souligné que l'Ontario ne disposait pas encore de loi pour encadrer les instruments dérivés, alors que celle du Québec est en vigueur depuis février 2009.
Le gouvernement ontarien a confirmé jeudi qu'il comptait mettre en place de nouveaux règlements visant le marché des instruments dérivés, lesquels ont joué un rôle important dans la récente crise financière mondiale.
Dans leur exposé économique d'automne, les libéraux de Dalton McGuinty ont indiqué qu'ils allaient permettre à la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario (CVMO) d'établir un cadre de réglementation « robuste » pour les instruments dérivés négociés hors bourse.
Sylvain Théberge a rappelé que les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) avaient publié au début du mois un document de consultation étayant des propositions de réglementation des dérivés de gré à gré. L'Ontario participe pleinement à ces travaux, a-t-il dit.
Une fois la période de consultation terminée, en janvier, les provinces devront s'entendre sur la réglementation pancanadienne à mettre en place.
Il faut toutefois noter que l'Ontario, où est concentrée la plus grande partie de l'industrie financière canadienne, fait souvent bande à part en matière de réglementation du secteur. Elle refuse notamment de participer au guichet unique mis en place par l'ensemble des autres provinces.
Les produits dérivés sont des instruments financiers dont la valeur fluctue en fonction d'autres variables, comme les taux d'intérêt et les actions.
Comme la Bourse de Montréal est le parquet canadien spécialisé dans les dérivés, l'AMF a développé une expertise particulière dans le domaine.
Queen's Park a également l'intention de confier à la CVMO la surveillance réglementaire des agences de notation et des systèmes de négociation parallèle.
Les systèmes de négociation parallèle sont des marchés des valeurs mobilières qui sont devenus d'importants concurrents des places boursières traditionnelles comme la Bourse de Toronto.
Le gouvernement ontarien soutient que les modifications proposées sont en phase avec les engagements similaires pris par d'autres pays membres du G20 afin d'accroître la surveillance du secteur financier à la suite de la crise qui l'a ébranlé en 2007 et en 2008.