Les clients fidèles à ING Direct et à son slogan: "C'est votre intérêt qui compte" ne devraient pas voir beaucoup de modifications à leurs habitudes de placements à la suite de l'acquisition de l'institution virtuelle par la troisième plus grande banque canadienne.
La Banque Scotia (TSX:BNS) a en effet annoncé mercredi qu'elle mettait la main sur la branche canadienne d'ING pour 3,13 milliards $, une entente qui comprend la mise en marché de davantage d'actions.
ING Direct changera de nom dans 18 mois, mais ses produits, ses services et l'établissement du prix des prêts demeureront les mêmes, a déclaré en entrevue Anatol von Hahn, chef du Groupe Réseau canadien à la Banque Scotia. "La formule a fait ses preuves au cours des 15 dernières années. Ça ne changera pas."
Les clients d'ING pourront continuer à effectuer leurs transactions comme auparavant, soit en ligne, soit au téléphone. Même leurs numéros de compte et leurs mots de passe demeureront intacts.
La Banque Scotia conservera le logo illustré par le fameux lion orange et le slogan: "C'est votre intérêt qui compte" pour au moins 14 mois après la conclusion de la transaction et changera l'appellation de l'entreprise après 18 mois. "Je suppose qui les gens se demandent si le nom de la Banque Scotia apparaîtra dans celui de la nouvelle entité, la réponse est non à 99,9 pour cent" a souligné M. von Hahn en ajoutant qu'ING demeurerait très distincte et qu'on préserverait ce qu'elle a bâti.
La majorité des 1,8 million de clients de ING Direct transigent également avec des banques qui ont pignon sur rue. Par exemple, ilspeuvent placer leurs épargnes dans des RÉER ou des CELI tout en conservant un compte chèque ou une hypothèque à la Banque Scotia ou à une autre institution du même genre.
Il n'est pas question d'interdistribution entre ING et la Banque Scotia, a précisé Anatol von Hahn, et ING fera concurrence à la Banque Scotia dans un marché libre comme le font les autres banques canadiennes.
ING Direct qui a connu une croissance fulgurante au cours des deux dernières années à un rythme de 100 000 à 120 000 nouveaux clients par année, planifie accroître ses services de façon indépendante, sans l'appui de la Banque Scotia.
Lors d'une conférence de presse, mercredi, le président-directeur général Peter Aceto a indiqué que l'un des produits qui pourrait être prochainement offert serait une carte de crédit qui viendrait s'ajouter aux opérations quotidiennes.
Un autre défi serait de bonifier le secteur des prêts hypothécaires, a-t-il ajouté. "Nous sommes très confiants dans notre capacité d'offrir plus de prêts hypothécaires par notre canal direct. Notre clientèle nous demande de plus en plus de services maintenant que les Canadiens sont devenus plus familiers avec cette façon de transiger ses opérations directement. Nous représentons vraiment la meilleure option pour eux."
Selon Mark Vandenbosh, professeur à l'École de commerce Richard Ivey de London, en Ontario, les clients d'ING ont été attirés par le côté "rebelle" de la banque, qui s'affiche comme un choix aux grandes banques habituelles.
La Scotia aura donc fort à faire pour préserver ce délicat équilibre si elle souhaite garder les clients fidèles à ING.
"Les gens se sont tournés vers ING pour différentes raisons et l'une d'elles est ce côté un peu rebelle. Je sais que "c'est mon intérêt qui compte", mais à cela s'ajoute le fait que je n'ai pas eu à faire affaires avec une grosse banque", a expliqué M. Vandenbosh.
"S'ils commencent à mettre à mal cette relation, cela pourrait devenir problématique", a-t-il renchéri.
La Banque Scotia s'est mise à courtiser une clientèle plus jeune, notamment en concluant des partenariats avec les cinémas Cineplex et la LNH, a de son côté indiqué le professeur de marketing de l'université Queen's Kenneth Wong.
L'acquisition d'ING se fait en continuité avec cette stratégie, selon lui, puisque la banque pourra offrir ses services à une clientèle soucieuse d'épargner et ne s'intéressant pas aux conseils de planification hypothécaire, d'assurances ou d'impôts.
"Les jeunes se tournent naturellement vers Internet pour gérer leurs affaires; c'est donc dire qu'ING s'est imposé comme la banque parfaite pour cette clientèle", a avancé M. Wong.
Les clients n'étaient pas particulièrement enthousiastes lorsque la Banque TD a racheté Canada Trust, il y a plus d'une décennie, a rappelé M. Wong.
"Vous aviez deux marques, avec des orientations et une clientèle très différentes, et la TD a été assez brillante pour conserver les secteurs efficaces et les enrichir avec les points forts de Canada Trust", a-t-il expliqué.
"Si la Banque Scotia se montre avisée, elle fera la même chose."
Il importe donc que la Scotia conserve les aspects qui font la particularité d'ING en matière de marque.
"Ce qu'il faut éviter, c'est un scénario où les client de la Scotia s'irritent du fait que ceux d'ING n'ont pas à débourser, par exemple, des frais de chèques", a mentionné M. Wong.
Le professeur a poursuivi en renvoyant aux exemples de la relation entre Rogers Communications et Telus, avec leurs opérateurs de téléphonie à rabais Fido et Koodo. Le même constat se fait avec Starbucks et Seattle's Best coffee ou les voitures Honda et Acura.
"Utiliser des marques différentes avec des échelles de prix différentes constitue une stratégie de mise en marché à long terme."