Dans le récent litige qui l’oppose aux banques, la Chambre de la Sécurité financière obtient le vote de l’Autorité des marchés financiers. « La Chambre a le droit dans le cadre de ses activités de contrôle déontologique des représentants d’avoir toute l’information nécessaire à l’exercice de son mandat », a déclaré Mario Albert, grand patron de l’AMF, en marge d’une allocation livrée devant le Cercle de la finance de Montréal, mardi.
La Chambre est l’organisme d’autoréglementation qui surveille le secteur des fonds communs. Elle dispose notamment de pouvoirs d’enquête sur les infractions commises par les conseillers financiers. Mais voilà, depuis plusieurs mois, les banques refusent de collaborer aux enquêtes de la syndique de la CSF, Caroline Champagne, arguant notamment que des actes commis par des conseillers lors d’activités bancaires, par exemple sur des prêts hypothécaires, n’ont aucune incidence sur leurs activités dans les fonds communs.
La CSF, qui dit vouloir enquêter sur la probité des conseillers relativement à ces mêmes actes, aurait ainsi essuyé une quarantaine de refus de la part d’une majorité de grandes banques depuis plusieurs mois.
Récemment, une requête en injonction de la CSF déposée contre la CIBC levait le voile sur cette situation.
Dans un autre dossier, la Banque Nationale s’appuyait sur des arguments similaires pour justifier son refus de répondre aux demandes d’information de la syndique de la CSF, Caroline Champagne.
« Je pense qu’il est clair que les banques se réfugient derrière la loi fédérale », a dit Mario Albert, estimant que cela s’inscrit dans un contexte où elles aimeraient établir clairement qu’elles sont de juridiction fédérale.
Ottawa se propose d’ailleurs de réécrire le préambule de la Loi sur les banques pour aller dans ce sens.
« Je dirais que dans l’ensemble on doit être favorables à la position de la CSF. Je pense que [ses] demandes sont fondées. »
Tarification
Tarification
Par ailleurs, la situation financière du régulateur fait partie des enjeux qu’il devra aborder dans les prochaines années.
La pression toujours plus grande sur ses dépenses, notamment « l'impact de la récente entente entre le gouvernement et l'Association des juristes de l'État, la difficulté de recruter et de retenir certains spécialistes (experts en dérivés, actuaires, etc.) et l'urgence de mettre à niveau ses systèmes d'affaires», lit-on dans son plan quinquennal déposé plus tôt ce printemps.
L’adéquation entre les revenus, tirés des cotisations des acteurs de l’industrie, et les dépenses, est donc à revoir.
Parmi les solutions qui pourraient être envisagées, la révision des tarifs perçus pourrait être du nombre. Autofinancé, le régulateur est tributaire des cotisations perçues. Celles-ci stagnent depuis la crise financière. Il faudra donc en trouver de nouvelles.
De nouveaux modèles d’affaires et de nouveaux produits échappent à la tarification. Les transactions internet, ou la distribution sans représentant, « sont en pleine croissance ». Faut-il les tarifer? « On n’est pas rendu aux solutions, mais c’est certain que ça fera partie » des choses qu’il faudra évaluer, a indiqué Mario Albert.
Une réglementation efficace
Il avait auparavant fait le point, devant un parterre de financiers montréalais, sur l’efficacité de la réglementation québécoise en rappelant qu’il n’y avait pas eu de scandales majeurs au Québec depuis 2006.
Plaidant qu’il n’y a pas trop de réglementation financière au Canada, il relate que pour s’en convaincre, « on doit se poser trois questions : Sommes-nous prêts à parier qu’il ne se reproduira pas une fraude financière majeure? Sommes-nous sûrs que les marchés financiers canadiens seraient en mesure de passer à nouveau à travers une crise comme celle de 2008? Maîtrisons-nous adéquatement les risques émergents? », notamment ceux associés aux nouveaux produits et aux nouvelles pratiques comme la négociation à l’aide d’algorithmes.
La réponse aux trois questions étant négative, il apparait certain que la réglementation est là pour rester.
« En revanche, il ne faut pas se lancer dans une course à la réglementation. Il incombe au régulateur de minimiser les coûts et de maximiser les bénéfices de son action. »