Lorsque José Paquin s'est déchiré le ménisque du genou droit, il y a trois ans, en dansant la salsa, l'enseignante de 49 ans a vu sa vie active basculer. En plus d'être blessée, cette résidente de Val-Morin a reçu un diagnostic de sévère gonarthrose, soit de l'arthrose du genou.
Du coup, finies les longues randonnées en ski de fond après les heures de travail. Finies aussi les sorties à vélo, les randonnées pédestres et surtout, se disait-elle, adieu la danse.
«Je vivais l'horreur. Je ne pouvais plus pratiquer mes activités sportives. Ni la chirurgie, ni les médicaments ne venaient à bout de cette arthrose qui me faisait excessivement souffrir. Je devais prendre des antidouleurs toutes les quatre heures», dit l'enseignante au niveau primaire.
Son calvaire a cependant pris fin en novembre 2012 lorsqu'elle s'est équipée de l'orthèse OdrA, élaborée par la firme lavalloise Ergorecherche et la société française Protéor. «J'ai recommencé toutes mes activités et je peux même me passer de l'orthèse quelques heures par jour sans que la douleur réapparaisse», souligne-t-elle.
Des résultats probants
José Paquin n'est pas la seule bénéficiaire à être enchantée de l'orthèse OdrA. Plus de 70 % des utilisateurs se sont dit satisfaits de l'orthèse depuis le lancement du produit, en 2012. Plus de 69 % des patients ont vu leur douleur réduite, et plus de la moitié ont diminué considérablement la consommation de médicaments.
«Dans le domaine de l'arthrose, ces données sont exceptionnelles. Aucun autre traitement actuel ne parvient à de tels résultats», soutient Louis Desrosiers, vice-président, recherche et développement, d'Ergorecherche, à Laval.
Qu'est-ce que cette orthèse a de si particulier ? «Contrairement aux orthèses à levier dont la pression indispose ses utilisateurs, la nôtre dispose d'un mécanisme à crémaillère. En suivant le mouvement de la jambe, elle produit une distraction dans le genou sans créer aucune pression», explique l'ingénieur spécialisé dans les matériaux de pointe.
Ce n'est pas Ergorecherche qui a inventé le mécanisme. Il s'agit plutôt d'une entreprise japonaise, dont le brevet a été racheté par Protéor, premier manufacturier d'orthèses en France.
Pendant que Protéor concevait une orthèse, Ergorecherche mettait en place un centre spécialisé pour mieux traiter l'arthrose du genou. Les deux entreprises se sont associées pour peaufiner l'équipement. «Le prototype de Protéor était correct sur le plan anatomique, mais inconfortable pour le patient», dit M. Desrosiers.
L'équipe de Louis Desrosiers, composée d'ingénieurs électromécaniques et d'orthésistes cliniciens, a rehaussé le produit en matière de structure, de coussinage et de courroie. «Nous avons amélioré le confort de cette orthèse personnalisée en ajoutant des matériaux non allergènes qui empêchent le produit de glisser sur la peau. Nous avons également amélioré la disposition des courroies pour faciliter l'installation de l'orthèse», explique Marc Lajoie, ingénieur électromécanicien chez Ergorecherche.
Amélioration continue
Le peaufinage se poursuit. L'équipe est en voie de modifier l'embout des courroies pour en faciliter la manipulation.
Et bonne nouvelle aussi pour les joueurs de hockey de ligues de garage ennuyés par la gonarthorse : une nouvelle génération d'orthèses en titane devrait voir le jour cet automne.
Cela dit, l'orthèse OdrA ne constitue pas un produit miracle. «On ne rendra pas plus en forme un patient qu'il ne l'était pas avant d'être atteint d'arthrose. Mais les gens actifs vivent un grand soulagement avec ce produit», souligne Louis Desrosiers.
Les problèmes d'arthrose touchent 10 % de la population canadienne, surtout les femmes de 55 ans et plus. Ce n'est donc pas étonnant qu'Ergorecherche ait féminisé son orthèse en intégrant dans la fabrication du produit du vinyle de couleur bleu, blanc, beige et même rose.
«L'entreprise travaille également en collaboration avec des médecins de l'Université Laval, le CRIM, le Centre de transfert technologique en textiles du Cégep de Saint-Hyacinthe ainsi que le Centre de solutions technologiques en orthèses et prothèses de Québec», souligne l'ingénieur Desrosiers.
De plus, Ergorecherche a acheté Victhom Bionique Humaine, l'entreprise de Québec qui avait fourni une prothèse à l'ancien premier ministre Lucien Bouchard. Cette transaction permet à la société lavalloise de s'approprier des brevets et des développements techniques de Victhom.
Prochaine étape : commercialiser l'orthèse d'un océan à l'autre. Déjà présent en France et au Québec dans plus d'une soixantaine de cliniques sous les enseignes Clinique du pied Équilibre et Orthoconcept, Ergorecherche s'apprête à introduire l'orthèse ailleurs au pays. «C'est un marché que nous pouvons désormais exploiter grâce à un nouveau logiciel nous permettant d'enregistrer les mesures et autres paramètres de la jambe du patient dans nos cliniques», explique M. Desrosiers.
Il y a à peine quatre mois, Ergorecherche utilisait des moules en plâtre pour réaliser les orthèses... et le courrier pour les faire parvenir au laboratoire.
Cette nouvelle technologie informatique permet non seulement de faciliter la tâche des orthésistes, mais surtout d'épargner l'achat de 60 000 livres de plâtre, dit M. Desrosiers.