PRIMEUR. Rio Tinto Alcan souhaite que la prochaine stratégie énergétique accorde d'importantes baisses de tarifs d'électricité aux alumineries du Québec afin que l'industrie soit plus attractive et créatrice de richesse.
«Si on se compare au reste du monde, on peut être plus compétitifs», affirme la porte-parole de Rio Tinto Alcan, Claudine Gagnon.
Dans le mémoire qu'elle présentera le 3 octobre devant la Commission sur les enjeux énergétiques, l'entreprise souhaite que les tarifs descendent sous la barre des 3 cents US le kilowattheure (le prix est en dollar américain en raison des comparaisons internationales).
Actuellement, le tarif L d'Hydro-Québec s'élève à 4,25 ¢CA/kWh (après le crédit haute tension et la transformation). Et en 2014, il pourrait grimper à 4,46 ¢CA/kWh à la suite de la hausse tarifaire de 5% demandée par Hydro-Québec.
Toutefois, certaines alumineries au Québec ne paient pas le tarif L. Elles ont des ententes spéciales - les fameux «contrats secrets» - avec Hydro-Québec. Des contrats qui font en sorte qu'elles paient un prix inférieur au tarif L pour leur électricité.
Or, toutes ces ententes viendront à échéance d'ici la fin de 2017. C'est dans ce contexte que survient la demande de Rio Tinto Alcan. Cela dit, l'entreprise dit payer le tarif L dans toutes ses alumineries.
Le producteur d'aluminium demande donc des baisses de tarifs d'électricité de près de 50% par rapport à ce qu'il devra payer à compter de 2014.
Rio Tinto souhaite ainsi se retrouver dans le premier quartile des producteurs d'aluminium dans le monde, qui paient un tarif sous la barre des 3¢US/kWh. Actuellement, Rio Tinto Alcan affirme se situer dans le quatrième quartile.
Selon l'entreprise, à 4,25 ¢/KWh, il n'est pas possible de développer de nouveaux projets dans le secteur de l'aluminium au Québec.
Aucune logique économique
Joints par Les Affaires, deux spécialistes en énergie ont indiqué qu'il n'y avait pas de logique économique à accorder des baisses de tarifs d'électricité aux alumineries.
Selon Jean Thomas Bernard, de l'Université d'Ottawa, aucune entreprise ne devrait vendre un produit ou un service en dessous de son coût marginal. Or, Hydro-Québec le fait déjà avec son tarif L, alors que son coût marginal avoisine les 10 ¢/kWh.
Pour sa part, Jean-Marc Carpentier pose la question suivante: «si Hydro-Québec était une entreprise privée, et qu'une industrie lui demandait de baisser ses tarifs, est-ce qu'elle accepterait?»
Si le gouvernement du Québec et Hydro-Québec accordent des baisses de tarifs aux alumineries, les autres clients de la société d'État devront sans doute assumer des hausses tarifaires supplémentaires, affirment les deux analystes.
Rio Tinto Alcan prétend que le gouvernement du Québec pourrait récupérer les baisses de tarifs accordées aux alumineries avec les nouveaux investissements et les nouveaux emplois qui seraient générés dans la province.
Le Québec compte neuf alumineries. Rio Tinto Alcan en exploite cinq, dont une - celle de Shawinigan - est en cours de fermeture. Le Canada est le troisième producteur d'aluminium au monde (la production est concentrée au Québec) après la Chine et la Russie.