La nomination de Pierre Karl Péladeau à la tête du conseil d’administration d’Hydro-Québec provoque des réactions partagées. Le pdg sortant de Québecor transmettra la volonté politique pour réaliser des économies, disent certains commentateurs. Mais selon les syndicats, ce n’est pas le rôle d’un président du CA.
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Le magnat des médias doit quitter la direction de son entreprise familiale le 8 mai. Il arrivera en poste chez Hydro-Québec le 15 mai. Le gouvernement n’a considéré aucune autre candidature.
«M. Péladeau va apporter de l’énergie pour un contrôle très serré des coûts, pense Michel Nadeau, directeur général de l’Institut sur la gouvernance des organisations privées et publiques. Marois semble dire : “M. Péladeau va faire la job que [François] Legault ferait s’il était élu.” Ça enlève un argument au chef caquiste.»
À la Coalition Avenir Québec, le chef loue cette nomination. «Pierre Karl Péladeau va aller brasser la cage. On en a besoin chez Hydro-Québec, a déclaré François Legault à la Presse Canadienne. Nous, on avait dit qu’il y avait 4 000 emplois de trop.»
Le gouvernement de Pauline Marois a commandé 2 000 coupes de postes à la société d’État.
Président de la Fédération des travailleurs du Québec, Michel Arsenault ne l’entend pas ainsi. «J’espère qu’on lui a expliqué ce que c’est que le rôle d’un président du CA. Ça ne se met pas le nez dans les relations de travail», a-t-il confié à LesAffaires.com. La plupart des employés d’Hydro-Québec sont affiliés à la centrale syndicale, tout comme les employés du Journal de Québec, que Québecor a mis en lock-out pendant 16 mois en 2007 et 2008.
À la Centrale des syndicats nationaux, le président Jacques Létourneau éprouve certaines craintes à cet égard. «Ça peut être dangereux pour les syndiqués si Pierre Karl Péladeau se met le nez dans les relations de travail, dit-il. Mais ce n’est pas le seul patron antisyndical au Québec !»
Prudence, disent les libéraux
Prudence, disent les libéraux
Le leader parlementaire du Parti libéral du Québec reconnaît les capacités de gestionnaire de Pierre Karl Péladeau. Par contre, Jean-Marc Fournier souligne que ses intérêts dans le domaine des médias exigent des règles d’encadrement pour son nouveau poste. «Je présume qu’elles sont là», a-t-il dit à la Presse Canadienne.
À Québec solidaire, le député Amir Khadir dénonce la nomination du pdg sortant de Québecor. «Qu’est-ce qu’on peut penser d’un gouvernement dont la première ministre répond aussi favorablement à la demande, au désir de quelqu’un qui est à la tête d’un empire médiatique très influent ? demande-t-il. On essaye de s’acheter des alliances et de l’influence, des retours d’ascenseurs… »
Lors de la dernière campagne électorale, la conjointe de Pierre Karl Péladeau, Julie Snyder, a publiquement donné son appui au Parti Québécois.
Michel Nadeau croit cependant qu’il est normal qu’un gouvernement place ses pions à la tête des CA des sociétés d’État. «C’est l’endroit où je suis le plus ouvert aux nominations partisanes, dit-il. C’est la personne par qui l’actionnaire envoie son message.»
L’Association québécoise des consommateurs industriels d’électricité accueille favorablement l’arrivée de Pierre Karl Péladeau. «Il a certainement une orientation absolument appropriée pour le monde des affaires, dit le président Luc Boulanger. Il n’a jamais hésité à prendre les décisions qui s’imposent pour Québecor.»
La première ministre Pauline Marois dit avoir remplacé le président actuel du CA pour réviser la stratégie en efficacité énergétique, notamment. Cette déclaration fait sourciller André Bélisle, président de l’Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique. « Pierre Karl Péladeau a sûrement de bonnes intentions, mais je ne suis pas sûr qu’il connaît beaucoup l’énergie», dit-il.
Non rémunéré
Non rémunéré
Le pdg sortant de Québecor a été nommé lors d'une réunion du conseil des ministres, qui s'est spécialement réuni le 17 avril.
Juste avant la période des questions, lors d'un bref point de presse, la première ministre Pauline Marois a affirmé que Pierre Karl Péladeau avait refusé d'être rémunéré pour exercer la fonction de président du conseil d'administration de la société d'État.
Pauline Marois a aussi assuré que l'homme d'affaires veillera à n'être exposé à aucun conflit d'intérêt qui pourrait survenir avec les activités de ses entreprises du secteur des médias et des télécommunications.
«Il n'y a pas de problèmes de conflits d'intérêts, car M. Péladeau quitte son entreprise, a dit la première ministre. Évidemment, Il se retirerait des décisions qui pourraient être susceptibles de le placer en conflit d'intérêts.»
Le pdg d'Hydro-Québec, Thierry Vandal, demeure en poste.
Pierre Karl Péladeau, 51 ans, a dirigé Québecor pendant 14 ans. C’est son père, Pierre, qui l’a fondée. La filiale de câblodistribution du groupe, Vidéotron, est l'une des plus rentables du secteur en Amérique du nord.
Pierre Karl Péladeau restera président du conseil d'administration de QMI, la filiale dont Québecor détient 75,4%, ainsi que de TVA, et vice-président du conseil de Québecor.
Avec la Presse Canadienne