Le gouvernement du Québec se montre encore une fois patient envers la mine Jeffrey et ses investisseurs: ils auront un peu plus de temps pour trouver leur financement, mais ce pourrait bien être leur dernière chance.
Le ministre du Développement économique, Clément Gignac, accepte de repousser du lundi 15 août au 1er octobre la date limite pour ficeler le projet de relance de la mine d'amiante située à Asbestos.
Québec demande en effet aux investisseurs de Balcorp d'injecter 25 millions $ avant d'accorder une garantie de prêt de 58 millions $. Cependant, les promoteurs de la mine n'ont pas encore complété le montage financier.
La porte-parole du ministre, Gabrielle Saint-Amand, a confirmé, lundi, que le gouvernement a consenti un nouveau délai.
L'entreprise avait déjà obtenu un premier sursis le 1er juillet. Toutefois, la prochaine échéance doit être "strictement respectée", a insisté Mme Saint-Amand.
"Pour une deuxième fois, (on donne à Balcorp) une chance, reconnaissant les efforts déployés par les dirigeants pour finaliser le financement", a expliqué le député Yvon Vallières, qui représente la circonscription concernée, Richmond. Il avait aussi obtenu plus tôt la confirmation du ministre.
"On s'attend à ce que cette date (le 1er octobre) soit respectée", a-t-il ajouté.
Le président de la mine, Bernard Coulombe, a attribué le retard actuel aux négociations complexes entre les investisseurs, un regroupement d'entreprises indiennes spécialisées dans le fibro-ciment.
"Mettre cinq grands concurrents indiens ensemble, c'est un gros contrat, a-t-il dit dans une entrevue téléphonique lundi. Chacun s'obstine, chacun veut avoir plus que l'autre. Ils ne se parlaient pas et là, ils deviennent partiellement propriétaires."
Il reste à signer les conventions d'actionnaires et à déposer l'argent, selon les exigences du gouvernement, mais c'est ce qui prend du temps, a expliqué M. Coulombe. Il est néanmoins confiant de faire aboutir le projet dans les délais.
"On est confiant parce qu'on est très avancé. Mais faites affaire avec cinq grande compagnies indiennes, avec des lois différentes, avec leurs avocats, leurs experts-conseil en fusions et acquisitions, ça en prend de l'information et des détails", a-t-il dit.
Il a assuré que les tergiversations de ses partenaires n'avaient pas comme origine les controverses qui entourent l'amiante, un minéral industriel que plusieurs pays ont interdit. L'amiante chrysotile extrait à Asbestos est sécuritaire, contrairement à d'autres variétés d'amiante, a-t-il affirmé.
La Société canadienne du cancer estime que plus de 100 000 personnes meurent chaque année dans le monde en raison d'une exposition à l'amiante dans leur milieu de travail.
Plus tôt cette année, le premier ministre Jean Charest a été l'objet de critiques dans le dossier de la relance de cette mine. On avait alors appris que le patron de Balcorp, Baljit Chadha, avait organisé une collecte de fonds pour le Parti libéral du Québec.
M. Chadha a également accompagné M. Charest lors d'une mission commerciale en Inde. La compagnie qu'il dirige exporte de l'amiante vers des pays en développement depuis plusieurs années.
Dans un communiqué transmis lundi après-midi, M. Chadha a fait savoir qu'il se réjouit du délai accordé par le gouvernement. Les investisseurs voulaient visiter la mine pour être rassurés sur son état et ils l'ont été, puisqu'elle est en excellente condition, a-t-il précisé.
"Nous nous approchons du but" en éliminant "tous les obstacles à la conclusion d'une entente", a-t-il déclaré.
Il ne reste qu'une seule mine d'amiante encore en activité au Canada. Elle est située à Thetford Mines, non loin d'Asbestos.
Les partisans de la relance de la mine Jeffrey font valoir qu'elle a 25 années d'exploitation devant elle et que le projet créerait 500 emplois.