«La proportion de professeurs d'université qui ont la fibre entrepreneuriale est plus élevée que celle de la population en général», affirme François Gagnon. Enseignant et chercheur à l'École de technologie supérieure (ÉTS), il se définit lui-même comme un entrepreneur. Il n'a d'ailleurs pas ménagé ses efforts pour faire sortir le fruit de ses recherches des murs de l'université.
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L'histoire débute dans les années 1990, alors que la Canadian Marconi Corporation, aujourd'hui Ultra Electronics, veut mettre au point une nouvelle génération de radio haute capacité pour répondre à un appel d'offres de l'armée américaine.
En compagnie de trois autres professeurs, François Gagnon met au point une radio complètement configurable par logiciel. Une innovation qui permet d'améliorer les communications, entre autres en zone de combat.
«Le fait qu'on puisse reconfigurer cette radio par logiciel permet de lui donner plusieurs personnalités, par exemple celle d'une vieille radio analogique, explique le professeur au Département de génie électrique. Il est donc possible de reconfigurer la bande de débit dans laquelle elle opère, son débit de transmission ainsi que la forme d'onde utilisée.»
Communications en situation d'urgence
La fiabilité et la performance de ce produit en ont fait la radio militaire de haute capacité la plus vendue dans le monde, en plus d'avoir remporté plusieurs prix scientifiques. Cette innovation a permis à Ultra Electronics de se hisser au rang de chef de file dans ce marché.
Forte de cette union entre entreprise et monde universitaire, l'entreprise a d'ailleurs décidé de créer une Chaire de recherche avec l'ÉTS, la Chaire de recherche industrielle CRSNG-Ultra Électronique SCT en communication sans fil. François Gagnon en est le titulaire depuis sa mise sur pied, en 2001.
De privée, elle est passée au statut de Chaire industrielle CRSNG en 2009. À ce titre, elle est financée à hauteur de 265 000 $ par année, de 2015 à 2020, et ce, à parts égales par le gouvernement fédéral et par l'entreprise.
Aujourd'hui, la vingtaine de chercheurs qui y oeuvrent s'intéressent aux communications sans fil en situation d'urgence. Dans de tels cas, comme pendant une catastrophe, ces systèmes sont très sollicités et flanchent parfois.
Les chercheurs étudient donc toutes les façons d'augmenter la performance et la fiabilité des systèmes. Par exemple, l'équipe a fait des essais avec la Marine canadienne pour améliorer les communications sans fil sur l'eau. «On a réussi à trouver une façon d'augmenter la portée des liaisons radio, leur débit ainsi que leur puissance», explique François Gagnon.
Un développement technologique qui déborde le simple cadre militaire. «Cela pourrait être utile, entre autres, pour le gouvernement du Québec, qui collecte des données environnementales grâce à des bouées dans le fleuve Saint-Laurent.»
Un exemple minime de ce qui sera accompli au sein de cette chaire de recherche, qui développe aussi des systèmes de communication sans fil cognitifs. Ces technologies novatrices permettent aux radios de se reconfigurer automatiquement, selon leur environnement.
«C'est un peu à l'image de votre iPhone, qui est capable de détecter s'il est proche de votre visage et, si c'est le cas, de faire disparaître le clavier, anticipant que vous allez utiliser la fonction téléphone», précise François Gagnon.
Vers la ville intelligente
L'investissement du chercheur ne se limite pas à la Chaire. En plus de siéger à plusieurs organisations gouvernementales, comme le Fonds de recherche du Québec, il dirige aussi COMunité, un groupe d'une cinquantaine de chercheurs qui se consacrent aux télécommunications sans fil.
M. Gagnon est également membre du Laboratoire de communications et d'intégration de la microélectronique (LACIME).
De ces instances sont nées plusieurs innovations, comme les codes à barres 2D qui permettent l'utilisation des cellulaires pour assurer le contrôle des cartes d'embarquements des passagers dans les aéroports.
Il est également administrateur chez Metix. Cette PME montréalaise travaille sur plusieurs projets liés aux villes intelligentes.
Par exemple, l'équipe met au point actuellement une carte transactionnelle et interactive pour la Ville de Brossard, en collaboration avec l'ÉTS. L'outil devrait regrouper plusieurs services aux citoyens, comme le prêt de livres dans les bibliothèques, l'inscription au camp de jour, l'état du déneigement, etc. Il s'agit d'un premier pas vers la création d'une ville intelligente.
«Aujourd'hui, la technologie permet de développer toutes sortes d'applications au service des besoins des citoyens, ajoute François Gagnon. Cela va bien au-delà des questions purement technologiques.»
Autant de pistes à explorer pour la recherche.
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