C’est maintenant officiel. En faillite forcée aux États-Unis, le fondateur de Guess Jeans ne peut plus se départir d’aucun de ses 16 immeubles historiques du Vieux-Montréal. La Cour supérieure vient d’interdire à Georges Marciano de vendre ou d’hypothéquer ses propriétés.
Le 15 avril, la juge Christiane Alary a ordonné à l’ancien magnat du jean délavé, à ses compagnies à numéros et à sa fiducie de «s’abstenir de vendre ou encore de disposer de, de transférer, d’hypothéquer, ou encore d’encombrer quelque propriété mobilière ou immobilière».
Les plaignants ont forcé la faillite de Georges Marciano en Californie. Leur avocat québécois a déposé une demande pour geler les transactions sur ses immeubles le 21 novembre. Cinq jours plus tôt, LesAffaires.com rapportait la vente de ses copropriétés des 422, 424 et 428, Place Jacques-Cartier pour 1,4 M $. La cour venait pourtant de confirmer la saisie de ses biens. «Le dépôt de la requête est liée à l'information contenue dans l'article mais aussi à plusieurs autres faits», dit Bernard Boucher, du cabinet Blakes.
La vente avait pris les avocats mêmes de Georges Marciano par surprise. L’homme d’affaires d’origine française avait alors profité d’une ambiguïté dans le jugement précédent, qui n’ordonnait pas spécifiquement la saisie de ses immeubles. «Il aurait fallu qu’on s’enregistre comme séquestre», admettait alors Christian Bourque, responsable du dossier chez PricewaterhouseCoopers.
Le 15 avril, la juge a interdit à Georges Marciano de répéter ce manège. Elle ordonne aussi à l’homme d’affaires de «fournir un état de compte mensuel détaillé de tous les comptes ouverts» pour lui, sa fiducie et ses compagnies à numéros.
La mesure vise également Michel Bensmihen, «en sa qualité d’administrateur du bien d’autrui de la fiducie familiale CKSM». Cet ancien courtier immobilier de chez Cushman Wakefield a déniché les immeubles de Georges Marciano dans le Vieux-Montréal et en assure aujourd’hui en grande partie la gestion.
Faillite forcée
Faillite forcée
Les plaignants, d’anciens employés de Georges Marciano, ont un jugement d’au moins 71,9 M $ US contre l’ex magnat du jean délavé, pour diffamation et souffrances morales. Ils l’ont mis en faillite aux États-Unis et ont fait nommer un séquestre pour administrer ses biens au Québec.
En septembre 2011, la Cour supérieure a désigné PWC pour remplir cette tâche. La firme a alors saisi les biens de l’homme d’affaires, mais un juge a invalidé l’opération deux mois plus tard.
Le 23 octobre dernier, la Cour d’appel a réordonné la saisie. PWC conserve donc les luxueuses collections de Georges Marciano, dont un diamant de 16 M$, 700 peintures et 375 montres, 10 Ferrari et deux Rolls-Royce. Mais le magistrat a jugé inutile de faire saisir ses immeubles : la reconnaissance de la faillite américaine suffisait, selon lui.
Pas pour Georges Marciano. Il a vendu trois condos et fait disparaître certains objets qu’il avait pu récupérer. La juge mentionne ces agissements pour justifier sa décision d’ordonner la saisie des immeubles et un contrôle strict des comptes de banque de l’homme d’affaires. «[…] pendant qu’aucune ordonnance n’était effective, certains actifs ont été “perdus”, des propriétés immobilières ont été vendues, etc.», écrit-elle.
Les avocats des plaignants californiens et du syndic demandaient d’ailleurs la saisie d’items de collection récupérés par Georges Marciano entre les deux saisies, selon le jugement. Ils incluent notamment deux briquets Zippo en or de 18 carats, plusieurs billets de banque et pièces de monnaie anciens, dix lingots d’or de 10 onces chacun et 35 montres.
Cependant, la valeur des actifs de l’homme d’affaires qui se trouvent déjà sous le contrôle de la justice aux États-Unis et au Québec dépasse maintenant la valeur maximale que pourraient atteindre les recours californiens, toujours entre les mains des juges américains, soit 136,6 M $ US.
Il n’a pas été possible de discuter Georges Marciano ou ses représentants avant la publication de l’article.