Série 1 de 5 - Dans une série en cinq volets, Les Affaires présente des projets immobiliers d'envergure qui devraient bientôt faire couler un sang nouveau dans les artères de Montréal.
Mi-décembre dernier, malgré un froid sibérien, le chantier de la Maison des étudiants (MDE) n'est pas figé dans un bloc de glace. Grues, bétonnières et ouvriers s'activent comme des fourmis pour ériger, au coût de 35 millions de dollars, ce futur pavillon de l'École de technologie supérieure (ÉTS), qui ouvrira ses portes en 2015, rue Notre-Dame, dans le sud-ouest de Montréal.
Le style architectural de ce bâtiment en devenir de 5 étages, d'une superficie de 130 000 pieds carrés (pi2), marque une rupture avec les autres pavillons de l'ÉTS qui, disons-le franchement, ne se distinguent pas par leur élégance. Cette fois-ci, la direction a choisi d'en faire un bâtiment «signature», avec une enveloppe en verre dans laquelle s'incrusteront des illustrations 3D. «On veut en faire une source de fierté pour la communauté», explique Patrice Catoir, directeur de la planification et du développement du campus à l'ÉTS. Pour concevoir ce projet, cette institution universitaire a fait appel aux architectes de la firme Menkes Shooner Dagenais et Letourneux et aux ingénieurs des DSK et Beaudoin Hurens.
L'immeuble louera 35 % de ses espaces à des entreprises externes. À ceux qui s'inquiètent de voir l'école prendre un virage commercial, M. Catoir réplique que son établissement se plie aux règlements d'urbanisme qui obligent l'aménagement de locaux commerciaux dans la rue Notre-Dame. Résultat : le rez-de-chaussée accueillera une caisse Desjardins et une pharmacie, tandis qu'une clinique s'installera à l'étage supérieur. Divers services aux étudiants, un café-rencontre et le service du perfectionnement occuperont la superficie restante.
Toutefois, la vocation de la MDE dépasse le contexte scolaire. Sa planification s'inscrit dans le cadre du Quartier de l'innovation de Montréal (QI), vaste projet qui vise à faire du territoire englobant Griffintown, Pointe-Saint-Charles et Saint-Henri / Petite-Bourgogne un milieu de vie qui stimule la créativité.
Les deux partenaires de ce chantier, l'ÉTS et l'Université McGill, veulent créer un Silicon Valley à la québécoise, un quartier où cohabiteront établissements d'enseignement, centres de recherche, organismes sociaux et culturels, entreprises et habitations, et ce, dans un aménagement durable et de qualité. «On veut éviter que Griffintown devienne une ville-dortoir», explique M. Catoir. La mixité des vocations dans ce quartier devrait stimuler l'innovation, source de prospérité dans les décennies à venir.
La MDE illustre cette volonté. En plus d'offrir des services de proximité aux résidents et d'être un lieu convivial, sa construction prévoit une place publique à l'arrière. «Cet aménagement permettra d'unifier le quartier en augmentant les espaces verts, qui manquent cruellement dans cette ancienne zone industrielle», note M. Catoir.
Face à la future place publique s'élève la phase IV des résidences universitaires de l'ÉTS, inaugurée en 2012. Là aussi, l'ÉTS a pris les devants pour verdir le paysage. «En construisant en hauteur, on a libéré de l'espace au sol, ce qui nous a permis d'aménager une cour intérieure, accessible à tous par des portes cochères», dit M. Catoir. Cette construction, récompensée du Pilier d'Or, catégorie Mérite technique et innovation, par l'Association des gestionnaires de parcs immobiliers institutionnels, affiche une performance énergétique exceptionnelle.
À lire aussi:
Une seconde phase sur le mode accéléré au Technopôle Angus
Le Quartier des spectacles: relier l'est et l'ouest
Un taux d'occupation élevé
L'ÉTS, qui fête son 40e anniversaire cette année, compte maintenant 1 300 places en résidences universitaires, dans quatre bâtiments. Inaugurée en 2008, la phase III, rue Notre-Dame, possède un espace vert sur le toit, avec barbecues. Ses occupants n'ont qu'à se rendre au rez-de-chaussée, occupé par un supermarché Metro, pour acheter leurs victuailles. Les phases I et II des résidences étudiantes se trouvent au sud du campus, près de la rue Ottawa.
Grâce au flux financier positif généré par les résidences étudiantes, l'ÉTS érige sa MDE sans subvention. «Puisque notre école fonctionne à plein régime trois sessions par année, nos résidences obtiennent un taux d'occupation extrêmement élevé», dit M. Catoir. Leur succès s'explique aussi par leur flexibilité. Les locataires peuvent rompre leur bail à tout moment pour effectuer l'un des trois stages obligatoires de leur formation. L'ÉTS leur garantit un logement à leur retour.
Toujours dans l'esprit du QI, le Planétarium Dow, légué à l'ÉTS par la Ville de Montréal en avril 2013, se métamorphosera en plateforme de créativité, au coût de 5 millions de dollars. Cette plateforme abolira les murs des salles de réunion pour encourager l'innovation. «On encadra le processus créatif pour faire évoluer une idée immature vers la maturité», dit Mickaël Gardoni, professeur au Département de génie de la production automatisée et l'un des concepteurs du projet.
Si la zone ouest du campus a une vocation académique, la zone à l'est de la rue Peel sert à créer des maillages avec l'industrie. Depuis 2012, un ancien bâtiment de la brasserie Dow, restauré pour 20 M$, abrite le Carrefour d'innovation INGO. Dans cet immeuble de 65 000 pi2, les locataires sont des entreprises innovantes qui bénéficient de la proximité des chercheurs, des étudiants et des laboratoires de l'ÉTS. «On ne loue pas à n'importe qui ni à taux préférentiel. Les entreprises ont l'obligation de travailler avec nous», explique Sabin Boily, directeur de l'innovation et des relations avec l'industrie. INGO phase I connaît un succès dépassant les attentes. «D'ici quelques semaines, il ne restera qu'un seul étage à louer», dit M. Boily.
Ce qui est de bon augure pour la phase II, qui verra le jour à une date encore indéterminée dans le bâtiment qui abritait les cuves de fermentation. Cet immeuble, dont on préservera la façade, sera démoli puis reconstruit pour y aménager 150 000 pi2 de lofts industriels. Suivra la phase III, angle Peel et Notre-Dame, où gît un entrepôt vétuste. «On y érigera une tour d'une hauteur importante», affirme M. Boily.
L'ÉTS possède déjà son incubateur d'entreprises, avec le Centech, rue Montfort. Ses locaux sont si populaires qu'ils ont été réaménagés récemment pour accommoder sept nouvelles entreprises.
L'ÉTS possède actuellement un parc immobilier d'approximativement 1,3 million de pieds carrés. À maturité, le campus en comptera 2 millions. Depuis quelques années, les investissements immobiliers se font à un rythme de 25 M$ par année.
À lire aussi:
Une seconde phase sur le mode accéléré au Technopôle Angus
Le Quartier des spectacles: relier l'est et l'ouest