Les Canadiens pourraient recevoir du courrier dès la semaine prochaine, d'après le gouvernement Harper, qui a pris des mesures mardi pour accélérer l'adoption de la loi spéciale forçant le retour au travail des employés de Postes Canada.
Avant d'entamer le débat sur le projet de loi, le gouvernement a en effet déposé mardi une motion pour en limiter la durée. Cela s'apparente à un bâillon.
Selon le leader du gouvernement à la Chambre, Peter Van Loan, les députés vont commencer à débattre de la loi jeudi.
"J'ai espoir que l'on puisse finir le débat, et si on ne réussit pas jeudi, peut-être vendredi", a-t-il indiqué mardi après-midi.
Mais vendredi le 24 juin est une journée fériée sur la colline parlementaire. Si le gouvernement décide de garder ouverte la Chambre des communes et de faire travailler ses employés, la facture risque de s'avérer salée pour un gouvernement qui affirme ne pas avoir le choix en effectuant des compressions un peu partout.
Cela signifie du temps supplémentaire aussi pour les députés, car le début du congé parlementaire d'été est prévu pour jeudi.
"Après cela (le projet de loi) doit aller au Sénat, donc on pourrait voir un service postal aussitôt que la semaine prochaine", a aussi indiqué M. Van Loan à sa sortie des Communes.
Postes Canada a mis ses 48 000 employés en lock-out mercredi dernier après que ceux-ci aient entamé une grève tournante, le 2 juin.
Le projet de loi C-6 prévoyant la reprise et le maintien des services postaux ordonne le retour au travail et donne à un arbitre la tâche de choisir une offre finale, celle du syndicat ou celle de l'employeur, et de l'imposer.
Cet arbitre doit, d'après le texte de la mesure, fonder sa décision sur la nécessité de conditions de travail qui sont compatibles avec celles de secteurs postaux comparables. Et le projet de loi détermine même les augmentations salariales; la première s'élevant à 1,75 pour cent.
Le syndicat des employés des postes et les partis d'opposition s'opposent à cette ingérence gouvernementale. Ils veulent que les parties au contrat de travail continuent à négocier.
Mais le premier ministre Stephen Harper est d'avis que l'inclusion de clauses salariales dans la loi est juste pour les employés postaux.
"Il y a eu une série de grèves et de lockouts dans cette dispute entre deux parties qui commence à causer du tort à beaucoup de gens qui ne sont pas assis à la table des négociations", a commenté le premier ministre en Chambre, mardi.
"Le gouvernement veut les protéger. Les salaires prévus dans la loi sont les taux que ce gouvernement a convenu avec ses autres travailleurs du secteur public et il s'agit là d'un règlement juste aussi pour les travailleurs des Postes", a-t-il ajouté.
Mais d'après le syndicat, les salaires indiqués dans la mesure législative sont moins généreux que ceux compris dans la dernière offre de l'employeur.
"Ce projet de loi retirera 875,50 $ des poches d'une travailleuse ou d'un travailleur des postes à plein temps durant les quatre années de l'entente. En tout, il s'agit d'un vol de 35 millions $ perpétré contre les travailleuses et travailleurs des postes et leurs familles", se plaignait dans un communiqué émis lundi le président du Syndicat des travailleurs et des travailleuses des postes (STTP), Denis Lemelin.
D'après le libéral Bob Rae, cette loi serait même inconstitutionnelle.
"Je dis ceci au gouvernement: Vous ne pouvez pas vous ingérer dans le processus de négociation collective à ce point et de cette manière", a déclaré le chef libéral mardi matin, lors du débat aux Communes qui doit accélérer l'adoption de C-6.
"Que les travailleurs reçoivent moins que ce que Postes Canada a proposé; quelle est l'idée derrière ça?", interrogeait pour sa part le député néo-démocrate Yvon Godin. "Je ne le comprends pas à moins que le gouvernement haïsse les travailleurs et les travailleuses."
Réponse du gouvernement par la bouche de la députée Kellie Leitch, secrétaire parlementaire de la ministre des Ressources humaines et du développement des compétences: "Tous les membres de la Chambre des communes ont le devoir d'agir dans l'intérêt de tous les Canadiens."
Le gouvernement conservateur maintient que l'arrêt du service postal, tout comme la courte grève à Air Canada la semaine dernière, nuit gravement à l'économie canadienne.