Les entreprises vont sentir l'onde de choc, et ça va faire mal. Pour rééquilibrer les finances publiques, Québec changera la façon dont il accorde de l'aide aux sociétés. Désormais, le gouvernement devra réaliser un certain rendement avec les fonds publics qu'il investit pour épauler nos entreprises.
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Dans une rencontre éditoriale avec Les Affaires, le ministre de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations, Jacques Daoust, explique que le Québec subventionne trop ses entreprises sans obtenir de résultats concrets, qui rapportent au trésor public. Il déplore aussi la culture qui fait en sorte que beaucoup de sociétés voient dans l'aide de l'État «un droit acquis».
«C'est fini ça. On ne va pas continuer de cette façon-là, laisse tomber Jacques Daoust d'un ton déterminé. On n'aidera pas une entreprise quand elle l'exigera, mais quand la situation l'exigera.»
Selon le ministre, le gouvernement a trop longtemps baigné dans la philosophie du «spray and pray», pour reprendre son expression. Une philosophie en vertu de laquelle l'État saupoudre généreusement de subventions - y compris de crédits d'impôt - l'ensemble de l'économie québécoise dans l'espoir de stimuler l'investissement et la création d'emplois. Ce changement de cap dans la stratégie du gouvernement n'épargnera aucun secteur, hormis peut-être l'agriculture, qui a besoin du soutien de l'État dans tous les pays développés pour survivre, souligne le ministre Daoust.
Par exemple, il n'est pas impossible que l'industrie québécoise du jeu vidéo - concentrée à Montréal - voie à nouveau diminuer l'aide de Québec, et ce, après la réduction de 20 % des crédits d'impôt consentis aux entreprises, annoncée dans le dernier budget.
«Moi, quand je regarde cette industrie-là, je suis inconfortable, déclare l'ancien président et chef de la direction d'Investissement Québec. Si je décide de me retirer du côté des mesures fiscales, est-ce que je me condamne à faire disparaître cette industrie-là qui est en croissance partout ailleurs ?»La recherche devra répondre à un besoin
En matière de financement à la R-D, les entreprises devront aussi trimer plus fort pour avoir l'aide de l'État. «On donne de l'argent, mais nous n'avons aucun rendement !», dit M. Daoust.
Selon lui, trop d'entreprises reçoivent des subventions pour créer des innovations qui ne répondent malheureusement pas à un besoin sur le marché. «On m'approche souvent avec d'extraordinaires solutions, mais on cherche le problème qu'elles pourraient régler !»
Jacques Daoust déplore d'ailleurs une certaine culture de la recherche pour la recherche qui s'est installée dans l'industrie québécoise. «Quand la recherche donne beaucoup d'ouvrages aux fiscalistes, elle n'a plus sa place», tranche le ministre.
Désormais, Québec investira davantage dans la recherche dite «utile», qui a plus de chance d'aboutir à la commercialisation de bonnes idées, explique Jacques Daoust, en précisant que l'Allemagne représente à ses yeux un modèle à suivre.
Une approche qui ressemble aussi à celle de TandemLaunch, un incubateur et accélérateur d'entreprises de Montréal. TandemLaunch décèle un besoin, trouve la solution, la finance et la commercialise pour l'industrie. Habituellement cependant, les créateurs inventent une solution, cherchent du financement et tentent de trouver un débouché commercial à leur idée.
Selon Jacques Daoust, Québec devrait aussi aider les entreprises qui ont de bonnes idées, mais qui n'arrivent pas à trouver du financement auprès des banques privées, car elles n'ont pas d'actifs à offrir en garantie. «On devrait prendre un risque quand personne ne veut en prendre.»
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Exportation : aider les entreprises qui ont fait leur preuve
Québec resserra aussi ses critères pour les entreprises qui veulent vendre leurs produits à l'étranger. Selon le ministre, trop de sociétés voient dans l'exportation une panacée pour relancer leurs activités.
«Si tu n'es pas capable de réussir chez vous, tu ne te sauveras pas la vie en exportant», dit Jacques Daoust, en précisant que des sociétés commercialisent des produits dont les débouchés se trouvent uniquement à l'étranger, comme des systèmes de purification d'eau utilisés dans les pays en voie de développement.
Pour stimuler nos exportations, le gouvernement misera essentiellement sur le réseau d'Expansion Québec. Cette société d'État offre aux PME qui souhaitent s'implanter à l'étranger des services personnalisés pour leur domiciliation, la location de bureaux, puis l'accompagnement de ses dirigeants. Ce service n'est pas gratuit.
Par ailleurs, Jacques Daoust a refusé de se prononcer sur le sort des délégations du Québec à l'étranger. En 1996, le gouvernement péquiste de Lucien Bouchard avait fermé 13 délégations du Québec - remplacées dans certains cas par des bureaux et des antennes - pour assainir les finances publiques.
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