Un profond sentiment de pessimisme a entouré l'ouverture du cinquième sommet du G-20 à Séoul, où le président américain Barack Obama et les autres dirigeants sont fortement divisés sur les questions monétaires et les politiques commerciales.
Ce sommet de deux jours, le premier à se tenir en Asie, est devenu la pièce maîtresse des efforts internationaux destinés à relancer l'économie mondiale et à prévenir de nouvelles crises financières.
Les espoirs étaient grands que le Groupe des 20 _ qui rassemble grands pays industralisés et puissances émergentes comme la Chine et le Brésil _ fasse office de forum mondial pour discuter d'une solution économique.
Mais un accord paraissait difficile en ce début de sommet en raison des divergences entre ceux qui, à l'instar des États-Unis, souhaitent voir la Chine autoriser une hausse de sa monnaie, et ceux que fâche la décision de la Réserve fédérale américaine d'injecter 600 milliards $ US supplémentaires dans l'économie américaine, mesure qui dévalue le billet vert.
Barack Obama a déclaré à ses partenaires que les États-Unis ne pouvaient demeurer un consommateur dépensier ayant recours aux emprunts et avaient besoin de tout le poids d'autres États pour régler l'économie mondiale.
"La chose la plus importante que les Etats-Unis puissent faire pour l'économie mondiale, c'est de croître, car nous continuons à être le plus grand marché mondial et un immense moteur pour la croissance de tous les autres pays", a souligné le chef de la Maison Blanche lors d'une conférence de presse.
Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva a de son côté mis en garde contre les conséquences d'une telle politique. "Si les pays riches ne consomment pas et veulent une croissance de l'économie basée sur les exportations, le monde fera faillite parce qu'il n'y aura personne pour acheter", a-t-il lancé devant des journalistes. "Tout le monde aimerait vendre!"
Les préoccupations relatives aux déficits commerciaux, au protectionnisme et à la "guerre des monnaies" (dévaluation compétitive) menaçaient de miner l'élan en faveur de solutions globales à la crise financière créé à l'occasion du sommet de l'an dernier à Londres.
À ce jour, les représentants des différents pays n'ont même pas pu s'entendre sur l'ordre du jour. Ministres et hauts responsables du G-20 ont travaillé des jours durant, sans succès, pour élaborer une déclaration commune devant être rendue publique vendredi, a déclaré Kim Yoon-kyung, porte-parole du sommet du G-20.
Les dirigeants se sont retrouvés pour un dîner de travail jeudi soir au Musée national de Corée à Séoul. À l'extérieur, quelques milliers de personnes ont protesté contre le G-20 et le gouvernement sud-coréen. Des échauffourées ont opposé des manifestants à la police anti-émeutes mais dans l'ensemble, le défilé a été pacifique.
"Nous pouvons mettre à l'aise les gens qui suivent ce sommet en parvenant à un accord concret" permettant d'aller de l'avant, a glissé le président sud-coréen Lee Myung-bak.
L'une des questions importantes auxquelles est confronté le G-20 est l'élaboration d'un nouvel ordre économique mondial pour remplacer un ordre centré sur l'énorme déficit commercial des Etats-Unis, quand la Chine, l'Allemagne et le Japon accumulent de larges excédents.
Barack Obama s'est fait le partisan d'une relance équilibrée à travers le monde et a poussé en faveur de taux de change basés sur le marché. Un message adressé en premier lieu à la Chine. Washington soutient que Pékin sous-évalue délibérément sa monnaie, le yuan, et favorise ainsi ses exportations aux dépens d'une juste concurrence.
Jeudi, le président chinois Hu Jintao a assuré Barack Obama de l'engagement indéfectible de Pékin en faveur d'une réforme monétaire, selon Ma Zhaoxu, porte-parole de la délégation chinoise.
Le différend monétaire s'est intensifié à la suite de la décision de la Fed d'acquérir pour 600 milliards $ US de bons du Trésor afin de soutenir l'économie américaine.
Une proposition américaine de limiter les déficits et les excédents des paiements courants à 4 pour cent du produit intérieur brut afin de réduire les déficits commerciaux s'est heurtée à une opposition.
"Les cibles ne sont ni appropriées sur le plan économique, ni d'un point de vue financier", a jugé la chancelière allemande Angela Merkel, pour qui "ce qui est important, c'est que nous n'ayons pas recours à des mesures protectionnistes". L'Allemagne est le deuxième exportateur mondial après la Chine.
Le Premier ministre britannique David Cameron a pour sa part souligné que les pays ayant d'importants déficits budgétaires avaient la responsabilité d'y faire face.
Retenu à Paris pour les commémorations du 11-Novembre, Nicolas Sarkozy devait arriver à Séoul vendredi et y défendre les priorités de la présidence française du groupe, effective à l'issue du sommet: la réforme du système monétaire international, la lutte contre la volatilité des prix des matières premières et la gouvernance économique mondiale.