Plus connue pour ses titres pop prisés par les jeunes, Taylor Swift se révèle à 25 ans une redoutable femme d'affaires, comme en témoigne son différend avec Apple. Swift émerge comme un puissant intermédiaire, capable non seulement de faire stade comble mais aussi de tirer profit de ses millions de fans.
Apple pèse quelque 750 milliards de dollars et n'est pas connu pour céder facilement en affaires. Étonnamment, elle a pourtant rapidement accédé aux exigences de Taylor Swift. Celle-ci menaçait en effet de boycotter son nouveau service de musique en streaming si le groupe n'améliorait pas les conditions de rémunération des artistes. Il y a quelques mois, Spotify avait été soumis grosso modo au même chantage de la part de la star, mais le service de streaming avait refusé de plier. La marque à la pomme, sans doute plus exposée en terme d'image de marque, n'a elle pas tergiversé très longtemps.
Superstar 2.0
Il faut dire que Taylor Swift est aujourd'hui un poids lourd de l'industrie musicale. De ceux qu'on ne peut pas contourner. Son dernier album, 1989, s'est vendu à 1,29 millions de copies... en une semaine! Cela représente 22 % du nombre total d'albums vendus aux Etats-Unis. À une époque où l'industrie du disque décline, la jeune chanteuse fait clairement figure d'anomalie: aucun artiste n'a vendu autant durant la semaine de sortie depuis l'an 2000 (voir graphique ci-dessous). Quand on pense que la seconde semaine, il s'en écoulait encore 400000 exemplaires.
Anachronique sur le plan des chiffres, la jeune femme a pourtant les deux pieds bien ancrés dans son époque, comme en témoigne son usage des réseaux sociaux. Suivie sur Twitter par plus de 59 millions de personnes, elle n'est dépassée que par deux autres stars de la pop Katy Perry et Justin Bieber, ainsi que par le président américain Barack Obama. C'est d'ailleurs par l'intermédiaire de Tumblr que la superstar a interpelé Apple.
«On ne vous demande pas des iPhone gratuits. Alors s'il vous plaît ne nous demandez pas de fournir de la musique sans être payés», a-t-elle écrit dimanche sur son compte Tumblr, pour protester contre le fait qu'Apple Music ne la rémunère pas pour les chansons écoutées pendant la période d'essai des nouveaux abonnés (son message complet ici).
Dimanche soir, Eddie Cue, vice-président responsable des services et logiciels internet d'Apple, l'a aussitôt appelée et a annoncé que le géant californien avait décidé de changer de système:
#AppleMusic will pay artist for streaming, even during customer’s free trial period
— Eddy Cue (@cue) 22 Juin 2015
À suivre: Taylor Swift, une féministe impertinente
Une féministe impertinente
Née en Pennsylvanie (est), Swift a commencé à écrire des chansons country avec sa guitare au début de l'adolescence. Puis son père a changé de travail pour s'installer à Nashville, la capitale de la country, et lui donner une chance de se lancer.
Après s'être attiré un large public grâce à des chansons country très introspectives, Swift s'est tournée l'an dernier vers la pop avec son cinquième album studio, "1989", en référence à son année de naissance. Les chansons, et les vidéos qui les accompagnent, sont impertinentes, pleine de références espiègles à sa vie privée.
Elle se décrit souvent comme une féministe. «Je ne pense toujours pas que c'est une priorité d'être cool, avant-gardiste ou sexy», expliquait l'an dernier Swift, qui apparaît pourtant souvent en couverture de magazines féminins. «Quand les filles pensent qu'elles ne rentrent dans aucune de ces trois catégories, dans lesquelles les médias les mettent de manière odieuse, la meilleure chose que je peux faire pour elles c'est de leur montrer à quoi ressemble ma vie. J'adore ma vie».
Une des clés de son succès tient en fait dans le contrôle de son image. Elle a trouvé le dosage idéal entre image sexy gentiment mièvre, promotion agressive de sa musique et intelligence d'affaires. Elle reste aussi en relation avec ses fans sur les réseaux sociaux, devenus pour elle des liens vitaux.
Son image de génie du marketing a toutefois été écornée quand elle a joué en 2008 à une convention du parti républicain pour le ticket perdant John McCain et Sarah Palin. Swift est depuis restée discrète sur la politique et demande à ses fans d'en rester en dehors, même si elle parle chaleureusement de Barack Obama.
Mais pour le chanteur Elvis Costello, qui a soutenu son combat contre Apple, elle est déjà la "future présidente".