Maintenant que la reprise économique a repris du poil de la bête, doit-on craindre que l'inflation se mette à faire des ravages ? Deux économistes donnent leur point de vue à Finance et Investissement.
Durant le premier trimestre de 2011, l'économie canadienne a crû de 3,9% et l'inflation a grimpé jusqu'à 2,7%, un taux se situant au-dessus des 2% visés par la Banque du Canada, selon des chiffres publiés par Desjardins. Cette progression était surtout imputable à la hausse des prix de l'essence et de l'énergie, une tendance qui s'est résorbée depuis, rappelle Carlos Leitao, économiste en chef de la Banque Laurentienne.
« Il n'y a pas de quoi s'inquiéter. En début d'année nous avons assisté, comme la Banque du Canada et la Fed le prévoyaient, au phénomène transitoire de l'augmentation des prix de l'énergie qui, heureusement, ne s'est pas transmis à l'ensemble des prix. C'était temporaire et je crois que l'inflation va revenir autour des 1,5%, et peut-être moins, durant les prochains mois. »
Maintenant que les prix de l'énergie sont redescendus, ce sont toutefois ceux des aliments qui ont commencé à grimper. La perception de l'inflation dépend d'ailleurs de la mesure utilisée, prévient Paul-André Pinsonneault, économiste principal revenu fixe à la Banque Nationale.
« Au Canada, il y a des pressions sous-jacentes qui démontrent une accélération de l'inflation. Les mesures de la Banque du Canada prennent en compte les prix de la nourriture et de l'énergie, deux facteurs sans lesquels il n'y aurait presque pas d'inflation au pays présentement. »
L'économiste suggère de regarder du côté d'une autre mesure : le coût unitaire de main d'œuvre qui mesure les coûts en salaires et en bénéfices sociaux reliés à la production de chaque unité de bien. Cette mesure est utilisée pour voir si les entreprises produisent à des coûts supérieurs ou inférieurs à l'inflation.
« Au Canada, les coûts unitaires de main d'œuvre, étaient en hausse de 2,6% année sur année en avril, ce qui sous-entend une inflation sous-jacente supérieure à ce qu'on voit présentement », souligne Paul-André Pinsonneault.
Paul-André Pinsonneault prévoit qu'on n'assistera pas à une accélération de l'inflation à court terme, mais que la progression pourrait reprendre au courant des deux prochains mois. Il faudra d'ailleurs faire attention aux comparaisons mois sur mois puisqu'en juin et en juillet 2010, l'inflation avait été en baisse.
Quant aux choix que la Banque du Canada devra faire. Ce n'est pas tant l'inflation que l'endettement de plus en plus important des ménages canadiens qui devrait la motiver à hausser ses taux. « La Banque du Canada pourrait passer à une légère hausse pour donner un signal aux ménages canadiens et leurs faire comprendre qu'ils doivent réduire leur endettement », prévoit Carlos Leitao.
À court terme, la progression du niveau des prix pourrait être positive pour le marché des actions, selon Paul-André Pinsonneault: « Mais à moyen terme, lorsque les marchés commenceront à s'inquiéter du moment où les taux seront remontés par les banques centrales, la tendance pourrait se renverser. »