" Les écoles de gestion canadiennes sont parmi les meilleures du monde. " Ce n'est pas un Canadien qui le dit, mais l'Espagnol Pablo Martin de Holan, professeur, chercheur et directeur du Département de management entrepreneurial à l'IE Business School, à Madrid. Il connaît bien le système puisqu'il a passé 10 ans à étudier et à enseigner à l'Université McGill : " C'est connu qu'elles sont un deal colossal ! L'éducation est de même qualité qu'aux États-Unis, mais à moitié prix. "
Par rapport au reste du Canada, les écoles québécoises sont encore une meilleure affaire : les droits de scolarité y sont le quart de ce qui se pratique ailleurs dans le monde. Et ce que M. Martin de Holan appelle le " défi de la langue d'enseignement " pour parler du français, les distingue encore plus.
De l'anglais un peu, beaucoup, pas du tout
Alan Hochstein, directeur du programme des MBA et recteur associé à la John Molson School of Business de l'Université Concordia, n'a pas à se casser la tête avec l'enjeu de la langue d'enseignement. Le fait français ajoute un zest d'exotisme à son offre à l'international.
Il reconnaît qu'il n'en va pas de même pour ses collègues des universités francophones : " Pour les écoles de gestion francophones, la place de l'anglais dans l'enseignement est un défi très important. Car l'anglais est de plus en plus dominant partout dans le monde. " Les facultés de gestion de l'UQAM, de HEC Montréal ou de l'Université Laval font face à des concurrents européens de plus en plus nombreux à offrir des MBA en anglais.
" En Europe, la tendance à l'anglicisation s'accentue à tous les niveaux ", constate Federico Pasin, directeur des activités internationales à HEC Montréal, qui vient de passer un an à l'École supérieure des sciences économiques et sociales en région parisienne. Dès la licence, puis davantage au MBA et dans les différentes maîtrises, les programmes en anglais ont la cote.
" Avec l'avènement de l'Union européenne, dit de son côté Robert W. Mantha, doyen de la Faculté des sciences administratives (FSA) de l'Université Laval, les écoles de gestion sont devenues européennes avant d'être françaises, espagnoles ou italiennes. Et la lingua franca, c'est l'anglais."À l'instar de HEC Montréal, la FSA a développé une offre substantielle en anglais. " La demande est venue des étudiants et du milieu des affaires. C'est un must en 2010 d'offrir des cours en anglais ", dit M. Mantha. La moitié des crédits au baccalauréat sont également offerts en anglais, le MBA en gestion internationale est trilingue. " Environ le tiers des étudiants inscrits dans les 15 MBA sont étrangers, un chiffre similaire à celui enregistré à HEC Montréal. Ce pourcentage augmente à 46 % dans le MBA intensif anglophone offert à HEC Montréal.
Le pari du multilinguisme
Outre le recrutement d'étudiants étrangers au MBA, la question des échanges étudiants est tout aussi cruciale lorsque vient le temps d'établir l'anglais comme langue d'enseignement, dit M. Pasin.
" De plus en plus, on veut que les étudiants aient une expérience internationale et on favorise les échanges, le temps d'une session. Nos élèves veulent aller à Londres, à Hong-Kong, à Prague ou en Australie. Si on veut faire venir des étudiants de là-bas, il faut leur offrir des cours en anglais. Ils n'apprendront pas le français pour une session. La deuxième langue qu'ils maîtrisent est l'anglais. "
Dans sa stratégie de recrutement international, HEC Montréal fait aussi le pari du multilinguisme, intégrant le mandarin, mais surtout, l'espagnol à son curriculum, et ce, dès le baccalauréat. Dans les foires internationales, l'école de gestion tente de séduire les étudiants en leur promettant la maîtrise d'une troisième langue : le français. " On explique aux jeunes Chinois ou Indiens que non seulement ils pourront étudier en anglais, mais qu'ils auront l'occasion d'apprendre une troisième langue. Pour nous, c'est une valeur ajoutée. "
L'Université Laval a adopté la même stratégie. "Lorsqu'on fait du rerutement à l'étranger, explique M. Mantha, notre concurrence est internationale. On doit offrir un plus : l'Amérique du Nord et le fait français. Il y a des Asiatiques qui veulent se distinguer en ajoutant le français à leur CV. "