Après 29 ans à la tête de l'Égypte, Hosni Moubarak a démissionné vendredi de la présidence et a transféré les pouvoirs aux forces armées, pliant face à une vague historique de manifestations qui ont mobilisé ces 18 derniers jours des centaines de milliers de personnes réclamant la démocratie.
Devant le palais présidentiel au Caire, la foule scandait "le peuple a chassé le président".
Dans le centre du Caire, la foule sur la place de la Libération (Tahrir) a explosé de joie, accueillant cette nouvelle par un concert de klaxons. Les centaines de milliers de manifestants agitaient des drapeaux égyptiens et tiraient des coups de feu en l'air pour célébrer cette annonce.
Hosni Moubarak avait tenté de s'accrocher au pouvoir. Jeudi soir, il avait transféré une partie de ses prérogatives à son vice-président Omar Souleimane, tout en conservant son titre de président. Déçus, les manifestants sont descendus en masse dans les rues des grandes villes d'Égypte vendredi, demandant à l'armée d'intervenir pour l'évincer.
Durant la journée, des foules ont marché sur les palais présidentiels au Caire et à Alexandrie. Des contestataires ont assiégé le bâtiment de la télévision d'État dans la capitale.
C'était la journée de mobilisation la plus massive depuis le 25 janvier. Le mouvement lancé par de jeunes activistes sur Internet a été progressivement rejoint par différentes couches de la population égyptienne, remontée contre l'autoritarisme du régime et sa corruption.
C'est le vice-président Omar Souleimane qui a fait l'annonce à la télévision nationale de la démission de M. Moubarak. Dans une brève allocution tout juste après la tombée de la nuit, M. Souleimane a dit qu'en ces circonstances difficiles, le président Moubarak avait décidé de quitter son poste de président. Il a ajouté qu'il confiait au Conseil suprême des forces armées la direction des affaires de l'État.
Reste maintenant à savoir comment l'armée, l'institution la plus puissante d'Égypte, pilotera cette transition. Un peu plus tôt vendredi, elle a promis de veiller à ce que les réformes promises soient mises en oeuvre.
Dans un communiqué, le Conseil suprême des forces armées assure que l'état d'urgence, en place depuis 1981, sera levé dès la fin des manifestations. Il promet qu'il n'y aura pas de représailles contre les manifestants et appelle à la reprise des services publics pour un retour à la normale.
Abdel-Rahman Samir, l'un des jeunes organisateurs de la contestation, explique que des négociations vont s'ouvrir avec l'armée au sujet des réformes démocratiques mais estime que la mobilisation doit se poursuivre tant qu'il n'y aura pas de concret.
L'opposant politique et prix Nobel de la Paix, Mohamed ElBaradeï, a affirmé que c'était le plus beau jour de sa vie. En entrevue à l'Associated Press, il a déclaré que le pays a été libéré de décennies de répression. Il a dit espérer une "belle" transition.
Le vice-président américain Joe Biden a déclaré vendredi qu'il s'agissait d'un jour "historique". Quant au président, Barack Obama, il a appris la nouvelle lors d'une réunion à la Maison-Blanche. Il devrait réagir publiquement en début d'après-midi, à 13h30.
Par ailleurs, l'Union européenne a salué le courage des manifestants pro-démocratie qui ont forcé la démission du président.