En janvier, La Fourmi bionique fera son entrée chez Loblaws. Joli coup pour la petite entreprise de Geneviève Gagnon qui, grâce aussi à une mise en marché plus dynamique en Ontario, prévoit doubler son chiffre d'affaires l'an prochain, grâce à une production de plus de 200 000 kilos de céréales granolas. L'année 2010 a déjà été très bonne, ses ventes ayant crû de 20 %.
" Je pourrais produire des céréales sans gras saturés et sans sucre, mais on y perdrait en saveur. Je veux rejoindre les gens qui se soucient de leur santé, sans tomber dans l'excès ", explique la jeune femme de 36 ans.
Les céréales de La fourmi bionique possèdent l'appellation Aliments du Québec et sont certifiées biologiques à 75 %. " Je pourrais acheter du miel bio de l'Argentine à bas prix, mais je tiens à m'approvisionner au Québec, explique Mme Gagnon. Or, le miel québécois bio coûte très cher ; alors j'utilise du miel ordinaire du Québec. "
L'entreprise, qui compte deux ingénieurs parmi ses 10 employés, est installée dans l'ancien complexe Dominion Textile, dans le quartier montréalais de Ville-Émard. Sa capacité de production atteint une tonne par jour, ce qui lui laisse encore une bonne marge de manoeuvre pour croître avant de déménager.
La commercialisation
Au début, Geneviève Gagnon a démarché elle-même, comme c'est souvent le cas dans les PME en démarrage. Mais elle n'était pas très bonne, admet-elle. Heureusement, Valérie, sa jumelle identique, revenue de Californie après un séjour de plusieurs mois, lui a prêté main forte. " Je l'ai nommée vice-présidente marketing, mais en fait, elle était porteuse de boîtes ", raconte en riant la jeune entrepreneure.
Grâce à Valérie, actionnaire minoritaire de l'entreprise, les produits de La fourmi sont offerts dans 700 points de vente au Québec et quelques-uns en Ontario : des supermachés IGA, Metro, et Loblaws, à partir de janvier prochain, des fruiteries, des épiceries fines, des magasins d'aliments naturels et plus d'une cinquantaine d'hôtels et de restaurants, dont ceux du Groupe Germain.
La Grande Épicerie de Paris vend aussi des céréales de la PME. " Nous avons un distributeur en France, en Belgique et en Suisse, mais pour l'instant ce n'est pas important. "
Attendre le bon partenaire
Flairant la bonne affaire, plusieurs investisseurs ont offert leur participation à Mme Gagnon. Mais la jeune femme a su résister... jusqu'à un certain point. " J'estimais que La fourmi n'était pas assez grande pour vendre une partie de l'entreprise. J'ai préféré attendre un investisseur suffisamment riche me permettant de ne pas trop m'empresser de réaliser un gain rapide. "
Sa patience a été récompensée, puisque le neveu d'Herschel Segal, fondateur de la chaîne de magasins de vêtements Le Château, raffole des céréales de La fourmi bionique. Il en a glissé un mot à son oncle, qui ne lève jamais le nez sur un bon placement. Les discussions entre M. Segal et Mme Gagnon ont duré sept mois et se sont conclues par la vente de 25 % des actions.
L'idée de départ
Geneviève Gagnon a travaillé pendant six ans en relations publiques, notamment pour la Brasserie Labatt. Mais ce travail ne la satisfaisait pas. Par ailleurs, la famille à la fibre entrepreneuriale : son père a été propriétaire d'un dépanneur Couche-Tard et actionnaire d'un Provigo.
" J'étais arrivée à la conclusion que, pour avoir un travail qui me satisfasse, je devrais le créer moi-même. Mais je ne savais pas quoi faire ", raconte Mme Gagnon.
Forte d'un ascendant familial en alimentation, la jeune femme a d'abord lancé une table champêtre clandestine chez elle. Une fois par mois, des amis et des amis de ses amis déboursaient une certaine somme pour aller souper à son appartement du Plateau Mont-Royal. Un service à 18 heures, un autre à 21 heures. Elle organisait aussi des brunchs au cours desquels elle servait ses mélanges de granolas. " Mais c'était épuisant et je trouvais que le potentiel était trop limité ", explique-t-elle. Son chum de l'époque lui a alors lancé : " Pourquoi tu ne vends pas tes céréales ? "
Les débuts
En mai 2004, Geneviève Gagnon incorpore La Fourmi bionique et se rend au SAJE afin d'obtenir de l'aide. " J'ai sorti mes REER et sous-loué mon appartement pour aller vivre chez une amie ", se rappelle-t-elle.
Elle trouve deux mentors au Conseil des industries bioalimentaires de l'Île de Montréal (CIBIM), Nathalie Désilets, des Aliments Thym-Thym, et Johanne Tremblay, de Cuisines Divers Cités. Au début, Mme Désilets l'héberge dans ses locaux pendant six mois, puis David Carrier, du traiteur Avec Plaisirs, lui loue sa cuisine pendant 18 mois. Un autre ami, Michel Favuzzi, lui prête un endroit pour entreposer ses produits. C'est ce qu'on appelle réseauter !