Rues désertes balayées par la pluie, transports en commun et attractions touristiques fermés: New York était à l'arrêt lundi, se préparant dans un calme irréel à affronter l'ouragan Sandy, mais beaucoup de New-Yorkais ignoraient les ordres d'évacuation.
Sandy "peut facilement vous tuer", a encore insisté le maire Michael Bloomberg, qui avait ordonné dimanche l'évacuation de 375 000 personnes des zones inondables.
"Les conditions se déteriorent très vite", a-t-il martelé, précisant que le pire était attendu "à partir de 20H00" (00H00 GMT mardi) avec une montée des eaux qui pourrait aller par endroits jusqu'à 3,5 mètres, de la pluie et des vents violents.
Mais de nombreux New-Yorkais l'ont ignoré. Seulement 3.000 personnes ont trouvé refuge dans les 76 centres d'accueil mis en place, d'une capacité de 16.000 lits.
"L'an dernier, j'ai accepté d'évacuer pour l'ouragan Irene et il ne s'est rien passé. Donc cette année je reste chez moi, j'ai assez de provisions en cas d'urgence", explique Connie Anderson, une employée de 30 ans qui habite Battery Park, une zone très exposée.
"Mon seul souci, ajoute-t-elle, c'est l'ascenseur mais je peux m'en passer, j'habite au 15e".
La Bourse de New York est restée fermée toute la journée et le sera encore mardi, du jamais vu depuis les attentats du 11 septembre.
Ni trains, ni métros, ni bus dans l'agglomération de 8,2 millions d'habitants. Deux des trois tunnels routiers de Manhattan devaient également fermer dans l'après-midi en raison des risques d'inondation.
Des millions d'habitants n'ont pas pu aller travailler, les tribunaux et les écoles étaient fermés.
Et New York, d'habitude si frénétique, était d'une tranquillité étonnante, livrée aux seuls taxis jaunes et à quelques voitures et vélos intrépides zigzaguant sous la pluie.
Sacs de sable et contreplaqué
Sacs de sable et contreplaqué
Des milliers de touristes ont également dû revoir leurs plans, les principales attractions comme la Statue de la Liberté ou l'Empire State building étant fermés.
Seuls les petits commerces de promixité étaient ouverts, la plupart des grandes enseignes ayant préféré renoncer après avoir été pris d'assaut durant le week-end.
Générateurs, piles, lampes de poche, pain, eau, comme pour l'ouragan Irène en 2011, les New-Yorkais n'ont rien laissé au hasard, redoutant les pannes d'électricité et les ruptures de stocks alimentaires.
Dans le sud de Manhattan, les eaux avaient déjà monté dans la matinée de près d'un mètre.
Mais aucun mouvement de panique dans la ville.
A l'angle de la 6e avenue déserte et de la 23e rue, David Blythe, qui habite Brooklyn, est venu acheter un café et une banane dans une des rares enseignes ouvertes. Pour être sûr de pouvoir travailler, il a pris une chambre d'hôtel pour plusieurs jours à Manhattan, à environ 10 km de chez lui.
"J'ai des réunions que je ne pouvais pas manquer", explique-t-il.
Dans l'immeuble résidentiel voisin, le "Caroline", sur la 23e rue, tous les employés ont été réquisitionnés pour trois jours, pour assurer la sécurité des résidents. Ils ne rentreront pas chez eux.
Albert Mustaj est l'un des portiers. Il sourit quand on lui demande s'il a peur. "Je viens du Montenegro", explique-t-il. "J'ai vu pire".
Et Martha Kowalczyk, 27 ans, qui promène son chien dans une rue voisine, est toute aussi tranquille. "Je viens de l'Indiana, j'ai vécu des tornades, on n'aura jamais ça ici", estime cette jeune femme qui profite d'une journée inattendue de congé. "Et mon immeuble est ancien, il est solide".
Nick, un Grec qui refuse de donner son nom, attend lui de pouvoir repartir chez lui dans le Queens, il ne sait pas trop comment. Le petit restaurant qui l'emploie est fermé. "J'espère que je pourrai travailler demain, j'ai besoin de travailler", explique-t-il.
Dans le sud de Manhattan, zone inondable, certains restaurants ont protégé le bas de leur établissement par des sacs de sable. D'autres ont renforcé leur vitrine avec du contreplaqué.
Et tous attendent désormais en regardant les eaux.