La Confédération des syndicats nationaux (CSN) sollicite l’aide des associations étudiantes afin de promouvoir sa campagne de syndicalisation des magasins Couche-Tard, a appris LesAffaires.com. Des associations de Montréal ont déjà accepté de prêter main-forte à la CSN en distribuant des tracts et des affiches.
Cette stratégie de communication pourrait avoir une portée importante si la CSN réussit à convaincre plusieurs associations. «Nous avons les moyens de joindre les étudiants, peu importe où ils se trouvent, affirme Amélie Gagnon, présidente de l’association étudiante du Collège de Rosemont à Montréal. Nous pouvons leur donner de l’information dans les classes, à la porte d’entrée, à la cafétéria, ou au salon étudiants.»
Puisqu’une bonne partie des travailleurs de Couche-Tard sont aux études, la CSN a «statistiquement» plus de chance de pouvoir les joindre dans les cégeps et les universités, explique Jean-Pierre Larche, porte-parole du syndicat. «C’est un bon moment parce que plusieurs jeunes se cherchent un emploi d’été au cours de cette période de l’année», constate-t-il.
La campagne en est à ses balbutiements. À terme, la CSN souhaite rencontrer l’exécutif de toutes les associations étudiantes du Québec. Actuellement, M. Larche affirme ne pas savoir précisément combien d’associations ont été rencontrées et combien seraient prêtes à aider le syndicat.
Au moins deux associations ont accepté d’aider la CSN, soit celle du Collège Rosemont et celle du Collège Ahuntsic, situées à Montréal. Même si on souhaite joindre les étudiants universitaires, les étudiants collégiaux seront les premiers courtisés.
La CSN fera une présentation aux membres de la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ) dans le cadre de leur assemblée qui aura lieu à la mi-avril, confirme-t-on à la FECQ. Le regroupement compte 22 associations collégiales. Les membres des exécutifs de ces associations devraient donc assister à cette rencontre.
À la FECQ, on attend de rencontrer la CSN avant de décider si un appui particulier sera fourni dans cette campagne de syndicalisation. «Nous ne sommes pas là pour syndiquer les Couche-Tard, nuance Léo Bureau-Blouin, président de la FECQ. Toutefois, nous sommes toujours prêts à promouvoir le droit de s’associer et à donner de l’information à nos membres sur ce sujet.»
Chez Couche-Tard on ne veut pas commenter la stratégie de communication de la CSN. «Ça leur appartient», dit la porte-parole du détaillant, Denise Deveau.
Débat plus large
La médiatisation de la campagne actuelle permet d’aborder l’enjeu de la syndicalisation chez les jeunes, selon M. Bureau-Blouin. «Les jeunes qui veulent se syndiquer sentent qu’ils doivent se justifier parce qu’ils sont étudiants, déplore-t-il. Ils ont les mêmes droits, ce ne sont pas des citoyens de second ordre.»
Pourtant, les conditions de travail des travailleurs-étudiants, qui oeuvrent bien souvent dans le secteur du commerce de détail, ne sont pas toujours roses, ajoute M. Bureau-Blouin. «Lorsqu’on est jeunes, les gérants peuvent être plus intimidants que lorsque l’on a 40 ou 50 ans, raconte-t-il. Certains gérants le savent et ils en profitent.»La campagne se poursuit
L’appel de la CSN aux étudiants s’inscrit dans la poursuite du bras de fer que se livre la CSN et Couche-Tard depuis plus d’un an. En 2009, un Couche-Tard de Beloeil avait fermé alors que des employés avaient tenté de se syndiquer. Le même établissement avait ouvert ses portes un an plus tard.
Le milieu syndical avait perçu cette fermeture comme une tentative d’étouffer le syndicat. Du côté de Couche-Tard, on affirmait que le magasin n’était pas rentable et qu’une renégociation du bail avait permis de relancer le dépanneur.
Au début de l’année, la CSN a riposté en déposant une requête en accréditation pour un dépanneur de Montréal. Au moment d’écrire ses lignes, la requête est approuvée et trois autres requêtes sont à l’étude par la Commission des relations de Travail (CRT).
Il y a deux semaines, le président de la Fédération du commerce de la CSN, Jean Lortie, avait affirmé en entrevue avec LesAffaires.com que plusieurs magasins seraient sur le point de déposer une demande d’accréditation. Deux magasins l’ont fait depuis.
LesAffaires.com a également révélé le contenu d’une vidéo interne de sept minutes, dans laquelle Alain Bouchard, le pdg de l’entreprise, évoque la fermeture de magasins si les employés qui y travaillent s’y syndiquent.
Plusieurs experts en relations industrielles et en droit du travail ont indiqué qu’un passage de la vidéo pourrait être sujet à un débat juridique devant la CRT. Ce passage pourrait être interprété par certains comme une menace de l’employeur, ce qui est interdit dans le Code du travail. Si les experts ne s’entendent pas sur le parti que pourrait prendre le tribunal, ceux-ci s’entendent pour dire que l’extrait toucherait une zone grise.
Le service de contentieux juridique de la CSN attend toujours pour décider s’il formulera une plainte à la CRT.
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