Alors que le débat sur la syndicalisation dans le commerce de détail refait surface dans l’actualité, les employés de deux nouveaux magasins Réno-Dépôt ouverts au printemps ont déposé une requête en accréditation syndicale avant même l’ouverture officielle de ces établissements, a appris LesAffaires.com. Tout va bien, nous ont répondu les partis patronaux et syndicaux.
Le 2 février, les employés du Réno-Dépôt de Vaudreuil-Dorion ont déposé une requête en accréditation syndicale à la Commission des relations du travail (CRT) afin d’être représentés par les Teamsters, 20 jours avant l’annonce de l’ouverture du magasin. Le premier avril, les employés du magasin de Ste-Foy ont fait la même démarche avec les Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce (TUAC), 5 jours avant l’annonce de l’ouverture.
«Ce n’est pas un choc, répond Robert McKenzie, directeur personne et culture de Rona, propriétaire de la bannière Réno-Dépôt. Nous avons permis à des employés d’autres magasins qui le souhaitaient de changer d’établissement. Certains d’entre eux étaient déjà syndiqués et voulaient le rester. Si nous avions voulu éviter la syndicalisation, nous aurions embauché du nouveau personnel.»
En entrevue, les représentants de Rona, des TUAC et des Teamsters s’entendent pour dire que les relations de travail sont bonnes, et ils rappellent que la présence de syndicats dans les magasins Rona et Réno-Dépôt date de nombreuses années.
Une exception?Une exception?
Deux dossiers ont relancé le débat sur la syndicalisation dans le commerce de détail au début de l’année : l’affrontement entre la Confédération des syndicats nationaux (CSN) et Alimentation Couche-Tard et la désaffiliation des employés du Walmart de Saint-Hyacinthe.
On oublie toutefois que, même dans le commerce de détail, il y a des processus de syndicalisation sans histoire. «Les relations de travail chez Rona se déroulent bien, répond Louis Bolduc, directeur de la branche québécoise des TUAC. Ce n’est pas une exception. Les conflits sont très rares.»
Le Conseil du patronat du Québec est l’un des intervenants qui a eu l’occasion d’alimenter le débat sur plusieurs tribunes, notamment sur LesAffaires.com. Sans remettre en question le droit de se syndiquer, son président, Yves-Thomas Dorval, avait indiqué que les faibles marges de profit dans l’industrie du détail limitaient les gains salariaux possibles pour des employés qui se syndiqueraient.
La marge du bénéfice d’exploitation de Rona est de 7,17% à son exercice 2010. En comparaison, Couche-Tard a enregistré une marge d’exploitation de 2,69%. Metro, dont certains de ses magasins sont syndiqués, avait une marge de 5,16% lors de son dernier exercice. Pour l’ensemble de ses activités à l’échelle mondiale, Walmart a une marge de 6,05% pour l’exercice 2011 terminé en janvier.
Le directeur des TUAC s’oppose à l’idée que le syndicat soit une source de pression sur la rentabilité d’une entreprise. «Notre but n’est pas de mettre une entreprise en faillite, défend M. Bolduc. La majorité des demandes des employés sont liées aux conditions de travail. Les employés demandent davantage de pouvoir connaître leur horaire d’avance que d’avoir une augmentation salariale.»
Sans se prononcer sur la réalité des autres détaillants, le directeur de Rona ne croit pas que la présence syndicale nuise à la rentabilité de son entreprise. «Nous sommes en situation de pénurie de main-d’œuvre : nous voulons attirer les travailleurs, explique M. McKenzie. Dans ce contexte, un établissement syndiqué n’est pas désavantagé par rapport à un concurrent où il n’y a pas de syndicat.»
Avoir une convention collective peut même faciliter la tâche des gérants, estime M. McKenzie. «Les employés peuvent formuler de nombreuses demandes à leurs gestionnaires, explique-t-il. Avec la convention, les gérants ont des critères établis pour prendre une décision, ce qui peut leur éviter de subir les frustrations d’employés.»
PLUS:
Fermeture Couche-Tard : les salariés réclament 1M$
Rona ajoute 250 000 pieds carrés de surface commercial