La direction de Le Château a passé un bien mauvais quart d’heure ce mardi à l’occasion de son assemblée annuelle des actionnaires.
Pressée de questions, la direction s’est vite retrouvée sur la défensive, forcée d’admettre ne pas avoir prévu la baisse subite de ses ventes, menant l’entreprise à présenter ses pires résultats d’exercice des dernières années.
Dans l’exercice terminé le 28 janvier 2012, Le Château a vu ses revenus chuter de 5%, ses ventes comparables tomber de 8% et son bénéfice avant intérêts, impôts et amortissements (BAIIA) de 54%. Résultat : l’entreprise a affiché une perte de 2,4M$, comparativement à un bénéfice net de 19,6M$ lors de l’exercice précédent.
Remettant en question les stratégies de l’entreprise, un actionnaire a décrié les quelque 400 000$ accordés en rémunération aux 7 membres de son conseil d’administration et la rémunération de 2,2M$ pour les quatre principaux membres de la haute direction.
Par exemple, le salaire de base de la présidente du conseil et chef de la direction, Jane Silverstone Segal, a grimpé en deux ans de 888 462$ à 1M$, a-t-il décrié. «Pendant ce temps, la dette de l’entreprise a grimpé, ses liquidités ont fondu, l’entreprise ne verse plus de dividende et la valeur de son action, qui a déjà dépassé les 15$ (en 2007), ne vaut guère plus que 1,40$. (…) Un peu plus et il faudrait parler de penny stock »
Assise aux côté d’une Mme Silverstone Segal, de marbre, et portant des verres fumés durant toute la période des questions de l’assemblée, la présidente et secrétaire de l’entreprise, Emilia Di Raddo, a longuement tenté de défendre sa stratégie.
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Piquée au vif
Semblant piquée au vif, cette dernière a répondu en anglais seulement, aux questions et inquiétudes exprimées en français, qu’un changement d’image d’une entreprise nécessitait «de l’argent et du temps» et que «la stratégie prise, est la seule stratégie possible» à ce moment.
«Tout allait bien jusqu’à il y a deux ans, a-t-elle insisté. Au point de croire que nous allions éviter la récession américaine. Peut-être avons-nous été trop confiants? Je ne saurais dire. Il reste que l’histoire a montré que nous avons été frappés par une baisse des achats des consommateurs, ce qui fait que nous nous retrouvons avec les inventaires que nous connaissons actuellement.»
La valeur des stocks invendus de l’entreprise atteignait une valeur record de 127M$ le 28 avril, comparativement à 97M$ à la même période un an plus tôt. Pour faire face à cette croissance dramatique de son inventaire, Le Château a converti 24 magasins, situé dans des méga-centres, en magasin de liquidation, portant à 49 au total le nombre de magasins destinés à l’écoulement de marchandises en solde.
Sans donner de détails, Mme Di Raddo a aussi dit travailler à la mise en branle d’un programme de réduction de coûts et de transformation de la structure organisationnelle de l’entreprise afin de la rendre plus flexible.
L’implication de la direction mise en doute
En réponse, un actionnaire a déploré que malgré tant de confiance exprimée, si peu de membres de la haute direction et du conseil d'administration s’étaient risqués à acheter des actions de l’entreprise au cours de la dernière année. La seule exception est survenue tout récemment, du 20 au 22 juin, alors que Mme Segal a acheté 71 700 actions de Le Château, au prix unitaire de 1,15$, pour un peu plus de 82 000$.
«Si vous avez confiance, pourquoi ne pas en acheter ? À un prix aussi bas, ce serait pourtant le moment ? Malheureusement, vous dites avoir confiance, mais vous ne semblez pas prêts à y risquer votre propre argent.»
LIre la suite: la direction dit comprendre
Après l’assemblée, Mmes Silverstone Segal a décliné notre demande d’interview, nous invitant à nous adresser à d'autres, apparemment attendue pour une autre réunion.En entrevue, Johnny Del Ciancio, vice-président Finances, a déclaré que la décision d’investissement des membres de la direction demeurait une question personnelle qui ne pouvait se résumer à la stricte confiance d’un individu en l’avenir de l’entreprise.
Pour sa part, Franco Rocchi, vice-président principal, Ventes et exploitation, a dit «bien comprendre» la frustration de certains actionnaires, mais soutient demeurer «très optimiste» de voir Le Château parvenir à se relever de cette période difficile. «C’est parfois difficile de le remarquer sur le court terme, d’un trimestre à l’autre. Mais sur le long terme, il n’y a pas lieu de s’inquiéter.»
Selon les dernières données compilées par l'agence Bloomberg, Jane Silverstone Segal détient 23,8% de l'entreprise, fondé par son mari Herschel H. Segal, toujours membre du conseil d'administration. Ce dernier a profité à ce titre, d'une rémunération de 250 000$ au cours du dernier exercice financier. Le deux autres actionnaires en importance sont Franklin Resources Inc, avec 16,8% des actions, et Barry Gruman, avec 14,53% des actions.
Depuis le début de l'année, le titre de Le Château a chuté de 0,21$, ou de 12,73% à la Bourse de Toronto. Aujourd'hui, sa valeur est demeurée stable à 1,44$.