C'est la rentrée scolaire, ces jours-ci, pour des centaines de milliers d'étudiants québécois. Chez plusieurs détaillants, le retour en classe se conjugue avec une forte hausse de l'achalandage, puisque cette période de magasinage, qui s'amorce en août, s'avère l'une des plus importantes de l'année.
«C'est une saison très importante, la deuxième plus achalandée de l'année après Noël», souligne Mark Hilton, vice-président du marchandisage chez Walmart Canada.
Pour Bureau en Gros, il s'agit même de la période de l'année au cours de laquelle ses ventes culminent. «La rentrée scolaire, c'est notre Noël !» affirme Steve Matyas, président canadien de ce détaillant de fournitures de bureau, en précisant que les ventes enregistrées lors du retour à l'école doublent par rapport à tout autre mois de l'année.
Chez Dollarama toutefois, cette saison entraîne une très faible hausse des ventes et n'est donc pas significative.
La rentrée des classes aurait généré des ventes au détail de 333 millions de dollars au Québec en 2013, en légère baisse par rapport à celles de 346 M$ enregistrées l'année précédente, indique le Conseil québécois du commerce de détail (CQCD). L'année dernière, les familles québécoises auraient dépensé en moyenne 576 $ ou 363 $ par enfant pour les fournitures scolaires. Les vêtements, souliers et autres accessoires de mode représentaient la part du lion avec des dépenses qui s'élevaient en moyenne à 300 $ par famille ou 200 $ par enfant.
La majorité (59 %) des dépenses en fournitures scolaires ont été effectuées dans les librairies, papeteries et magasins de fournitures de bureau, comparativement à 33 % dans les grands magasins et 7 % dans les pharmacies.
«La rentrée scolaire nous amène toujours plus de ventes, même si cette année s'annonce moins bonne», note Michel Grefford, copropriétaire des Librairies Boyer, créées en 1952, qui comptent cinq magasins en Montérégie.
Stagnation des dépenses
Ces dépenses risquent d'être encore au beau fixe pour la rentrée en cours. «Le contexte économique reste difficile. Avec les hausses du prix de l'essence, du panier d'épicerie, de l'électricité ou des taxes scolaires depuis un an, il reste moins d'argent dans le portefeuille», constate le pdg du CQCD, Léopold Turgeon.
Les Canadiens ne se précipiteront pas dans les magasins à l'occasion de la prochaine rentrée scolaire, note aussi la firme Ernst & Young (EY) qui prévoit une stagnation des ventes de vêtements, de chaussures et de fournitures scolaires.
«En raison de la hausse du prix du panier d'épicerie, de l'essence et des maisons neuves, de même que de la progression de l'inflation, les consommateurs ont moins d'argent à dépenser pour l'achat de vêtements et d'autres types d'articles habituellement associés à la rentrée scolaire», explique Daniel Baer, associé et leader du secteur canadien Commerce de détail et produits de consommation chez EY. D'autant, ajoute-t-il, qu'il y a aussi une tendance des consommateurs à privilégier davantage la réutilisation et le recyclage.
Walmart et Bureau en Gros s'attendent pour leur part à une hausse des ventes. «On prévoit une croissance d'environ 3 %», précise Steve Matyas, qui anticipe une augmentation des dépenses pour l'achat d'ordinateurs portables et de tablettes.
Les deux géants du détail notent par ailleurs que les ventes par l'intermédiaire des sites transactionnels en ligne sont en croissance. Par conséquent, «nous avons augmenté le nombre d'articles offerts en ligne», indique Mark Hilton, de Walmart Canada, en précisant toutefois que les consommateurs québécois sont moins enclins que ceux des autres provinces à magasiner sur Internet.
Faire ses devoirs
Les détaillants ont d'ailleurs aiguisé leurs crayons pour être fin prêts à attirer la clientèle dans leurs établissements. «On a fait nos devoirs pour répondre aux besoins des clients», dit Steve Matyas qui, à partir de la fin juillet, a parcouru le Canada et visité certains des quelque 300 magasins Staples, dont près de 80 affichent l'enseigne Bureau en Gros au Québec.
Dès la fin de la rentrée scolaire de l'année précédente, les dirigeants de Bureau en Gros travaillent avec leurs marchands, mais aussi avec des fournisseurs, des gens en éducation et d'autres partenaires afin d'établir une sélection d'articles scolaires. «On fait un post mortem, en incluant des groupes de discussion avec des professeurs et un sondage en ligne auprès de consommateurs, pour mieux connaître les besoins et les tendances», explique M. Matyas.
Walmart s'y prépare aussi longtemps d'avance. «On fait plusieurs recherches, des sondages, pour bien tâter le pouls», indique Mark Hilton. Ces enquêtes portent même sur les collations dans les cours d'école !
Walmart Canada a en effet réalisé un sondage révélant que 71 % des enfants d'âge scolaire rapportent leurs collations à la maison s'ils ne les aiment pas et que près de 10 % les donnent à un autre élève. Cela a incité le détaillant à offrir des idées de collations qui pourraient davantage satisfaire les papilles gustatives des enfants.
Autre constat : près des trois quarts des répondants d'un sondage réalisé pour Walmart ont déclaré que les bas prix étaient l'élément le plus important à considérer au moment de choisir leur destination de magasinage pour la rentrée.
Vive concurrence
Dans ses campagnes promotionnelles liées à la rentrée scolaire, Walmart mise d'ailleurs sur son vaste éventail de produits et ses bas prix pour satisfaire la clientèle. «Les clients peuvent tout trouver en faisant un seul arrêt», dit M. Hilton.
Bureau en Gros fait valoir que ses produits se composent de nombreux articles essentiels à la rentrée, tels que les sacs à dos, les reliures à anneaux ou le matériel électronique. De plus, «nous garantissons d'avoir les produits en stock et d'égaler les prix, même jusqu'à 30 jours après leur achat», assure M. Matyas.
Mais, «dans un contexte aussi concurrentiel, les détaillants ne doivent pas axer leur stratégie de vente seulement sur l'offre de prix attrayants», dit Daniel Baer.
Les Librairies Boyer, qui doivent faire face à ces géants du détail et à l'ouverture récente d'un Walmart à Châteauguay, mise d'ailleurs sur un service plus personnalisé. «On essaie d'avoir des prix concurrentiels, mais on ne peut pas offrir des cahiers ou des reliures à 5 ¢. Mais on connaît bien les besoins des professeurs et des enfants et on peut remplir les listes scolaires», précise Michel Grefford.
Les Librairies Boyer, qui ont distribué 75 000 dépliants dans les foyers des villes où il y a un magasin, comptent aussi sur la fidélité de la clientèle et sa volonté d'encourager des commerces locaux.