Même s’ils ont l’impression que ça ne les concerne pas, les détaillants devraient suivre de près le dossier du pipeline Keystone XL. « C’est la décision à suivre dans les 30 prochains jours », a déclaré Carlos Leitao, économiste à la Banque Laurentienne, au congrès annuel du Conseil québécois du commerce de détail (CQCD) qui se tient actuellement à Montréal. Cet oléoduc doit transporter le pétrole issu des sables bitumineux de l’Alberta jusqu’au Golfe du Mexique.
«La décision [de le construire ou pas] sera un signe précurseur de la reprise ou de la non-reprise», a ajouté l’expert, qui a qualifié à plusieurs reprises l’année 2013 «d’année de transition». Une transition vers quoi? Se qualifiant de personne plutôt pessimiste, Carlos Leitao a évoqué deux scénarios.
Soit les États-Unis «nous tireront vers le haut avec eux, car la reprise de leur économie semble s’enraciner», ce qui stimulera nos exportations de ressources naturelles, soit le Canada se dirige vers «une japonisation de son économie», c’est-à-dire une longue stagnation.
L’économiste a mentionné à LesAffaires.com qu’il évaluait les risques de «japonisation» à 20 %. «Ce n’est pas insignifiant, c’est quand même une chance sur cinq.»
Marges de profit comprimées
Christian Bourque, vice-président chez Léger Marketing, a ensuite pris la parole pour décrire l’état d’esprit des consommateurs. «De 1993 à 2008, ils avaient toujours le pied sur le gaz. Depuis 2008, ils ont un pied sur le gaz et un autre sur le frein. Ils se sentent toujours à la veille d’une crise. Ils ont l’impression qu’ils n’auront pas plus d’argent qu’hier et qu’ils doivent faire plus avec moins.»
En conséquence, les Québécois cherchent «de la valeur», une situation que les détaillants doivent absolument comprendre, a-t-il plaidé. Carlos Leitao lui a donné raison avant d’indiquer que les prochaines années (au moins jusqu’en 2015) seront marquées par «des marges de profit comprimées» pour les commerçants.
Face à des clients pressés par le temps, exigeants et prudents, les détaillants ne peuvent plus se permettre «d’en échapper une», a insisté Christian Bourque. «On rentre dans l’ère de Trip Advisor. Vous êtes aussi bon que la dernière expérience que vous avez offerte.»
Les technos offrent de nouvelles occasions, page 2
Jean-Stéphane Tremblay, vice-président exécutif de FGL Sports (anciennement Forzani), a pris le micro pour rappeler aux détaillants que les nouvelles technologies sont «des menaces stimulantes» et qu’elles «donnent des occasions additionnelles de joindre les consommateurs». Il a utilisé sa tribune pour présenter le nouveau magasin laboratoire Sport Chek de Toronto (ouvert depuis la fin janvier) qui utilise une foule de nouvelles technologies.
Ce genre de test coûte une fortune, a-t-il admis, mais un deuxième point de vente du genre ouvrira ses portes à Edmonton avant la fin de l’année. Les Montréalais devront attendre en 2014 pour tester les écrans tactiles, kiosques de personnalisation des vêtements et tapis roulants intelligents.
Engagements du nouveau pdg
Le nouveau pdg du CQCD, Léopold Turgeon, a brisé les habitudes du congrès en étant lui-même le premier conférencier. «Nous avons l’obligation de constamment nous réinventer» a-t-il lancé à l’assistance de 450 personnes. À son avis, le secteur de la vente au détail n’est pas en crise mais plutôt en mutation, d’où son conseil aux détaillants : «prenez votre place» dans la nouvelle réalité. Cette expression est d’ailleurs le thème du congrès de deux jours.
Léopold Turgeon a profité de l’occasion pour révéler que le CQCD lancerait un nouveau portail Web pour mieux accompagner les détaillants et ferait la tournée du Québec pour y promouvoir la vente au détail «sur toutes les tribunes». Et il a également pris quatre engagements: entretenir des liens avec les écoles (cégeps et universités), être plus présent pour les membres, inclure les consommateurs dans les réflexions stratégiques et faire rayonner l’industrie.
«Le commerce de détail, j’y crois. J’y crois autant que vous», a-t-il conclu.