Primeur. Alimentation Couche-Tard a discrètement mis en oeuvre une stratégie en vue de franchiser un petit nombre de ses établissements du Québec, a appris LesAffaires.com. Le détaillant de Laval a déjà commencé à solliciter les candidatures d’entrepreneurs.
Le projet en est à ses débuts, confirme dans un courriel Mélissa Lessard, directrice du marketing chez Couche-Tard. «Pour le moment et les prochains mois, nous en avons une très faible fraction [des magasins du Québec] sous analyse, explique-t-elle. Chaque succursale est étudiée tous les trimestres selon sa situation, sa rentabilité et son environnement.»
Le franchisage fait partie du modèle d’entreprise de la chaîne dans le reste du Canada et aux États-Unis. Au Québec, ses enseignes 7-jours et Tabatout sont exploitées sous le modèle de franchise.
Pour Couche-Tard, c’est une occasion de partager les risques et les coûts de l’exploitation de magasins tandis que la concurrence se fait plus vive et que les conditions du marché ont «évolué», explique Mme Lessard, qui n’a pas souhaité préciser de quelle façon le contexte avait changé.
«La franchise représente un moyen de continuer d’offrir à nos clients des points de vente, répond la directrice du marketing. Ainsi, Couche-Tard demeure présente partout.»
Pourquoi maintenant?
Lors du déploiement de Couche-Tard dans les années 1980 et 1990, Pierre Garceau, le pdg du Conseil québécois de la franchise (CQF), se demandait pourquoi on avait converti les établissements acquis en magasins corporatifs. Il accueille favorablement l’intérêt de la société pour le franchisage.
«Ça permet à des entrepreneurs de créer leur propre entreprise en franchise et de devenir leur propre patron, commente-t-il. Couche-Tard est une grande marque avec une équipe qui a eu un grand succès. Je vois cette nouvelle d’un très bon œil.»
La décision de Couche-Tard pourrait avoir un lien avec la campagne de syndicalisation que mène la CSN (auquel se sont affiliés les employés de neuf magasins), croit JoAnne Labrecque, professeure de HEC Montréal. En franchisant les commerces, Couche-Tard «change le style de gestion», ce qui transmet la gestion des relations de travail au franchisé.
«C’est une entreprise viable financièrement, constate Mme Labrecque. On choisit le système de franchisage pour supporter le développement d’une entreprise en partageant les risques et les investissements. Dans le cas de Couche-Tard, ce n’est pas pour la croissance du réseau.»
Couche-Tard nie que cette démarche ait un lien avec les syndicats ou avec le désir d’obtenir des liquidités pour financer d’autres acquisitions. «Nos intérêts dans cette approche sont d’ordre opérationnel, combinés à une volonté ferme de bien servir sa clientèle», répond Mme Lessard.
Couche-Tard a d’ailleurs franchisé l’établissement syndiqué de Saint-Liboire récemment, la plus grande installation de l’entreprise au Québec. Au moment de l’annonce de la recherche d’un acquéreur au printemps dernier, cette transaction était une pratique exceptionnelle pour l’entreprise sur le territoire québécois. Le porte-parole à l’époque, André Bouthillier, avait assuré que Couche-Tard ferait du respect de la syndicalisation un critère de sélection au moment de choisir le franchisé.
L’établissement syndiqué de Saint-Hubert a aussi été franchisé à la fin de l'année dernière.