Ottawa doit libéraliser la production laitière au Canada et permettre les exportations et les importations de produits laitiers, selon le Conference Board du Canada. Une réforme qui pourrait créer des milliers d'emplois dans l'industrie et permettre aux consommateurs de bénéficier de prix plus compétitifs sur les tablettes des épiceries.
Au Canada, la production de lait est assujettie au système de la gestion de l'offre, qui a été mis en place par le gouvernement fédéral et les provinces durant les années 1970.
Ce système repose sur trois piliers: la planification de la production pour répondre à la demande canadienne en lait, en oeufs et en volaille; le contrôle des importations grâce à des tarifs douaniers élevés (de 200 à 300 %); la mise en place de politiques couvrant les coûts de production des agriculteurs.
L'Organisation mondiale du commerce (OMC), qui régule les échanges internationaux, tolère ce système. Elle interdit par contre au Canada d'exporter du lait de vache, puisqu'il bloque les importations de lait.
Dans une étude qui vient de paraître, le Conference Board du Canada prétend que ce système est inefficace et inéquitable.
Ainsi, selon le think tank de droite, la gestion de l'offre protège les producteurs laitiers contre la concurrence et limite les possibilités de croissance sur les marchés étrangers, où la demande en lait explose.
S'inspirer de la Nouvelle-Zélande
Selon le Conference Board, le Canada pourrait s'inspirer de la Nouvelle-Zélande. Ce petit pays de 4,3 millions d'habitants exporte 97 % de sa production laitière et il fabrique à lui seul près de 30 % des produits laitiers vendus dans le monde.
Le Conference Board estime que les producteurs laitiers canadiens auraient d'importantes occasions d'affaires à saisir en Asie. «Les flux commerciaux mondiaux actuels donnent en fait à penser qu’il serait possible d’expédier des produits laitiers du Canada en Asie à relativement peu de frais», écrivent les auteurs de l'étude.
De nouveaux marchés qui pourraient même propulser la production laitière au Canada.
Ainsi, si nos producteurs avaient un franc succès à l'étranger dans les 10 prochaines années et que leur exportations atteignaient des volumes équivalant à la moitié de ceux de la Nouvelle-Zélande, la production canadienne annuelle passerait de 8 à 20 milliards de litres de lait, selon le Conference Board.
Le cas échéant, cela se traduirait par une augmentation d’environ 14 % de l’emploi dans l’industrie. Plus de 5 000 emplois seraient créés dans la production primaire et quelque 3 000 dans la transformation, pour un gain total de plus de 8 500 postes.
De plus, le Conference Board estime qu'une harmonisation des prix canadiens aux prix mondiaux du lait - un processus nécessaire si on libéralisait la production laitière au Canada - transférerait des producteurs aux consommateurs des bénéfices excédentaires immédiats d’environ 2,3 milliards de dollars canadiens.
«Les Canadiens à faible revenu, en particulier, profiteraient davantage des prix en baisse, car ils consacrent une part plus importante de leur revenu (selon le panier de provisions nutritif – Canada) aux produits laitiers», écrivent les auteurs de l'étude.
Les arguments en faveur de la gestion de l'offre
Ce n'est pas la première fois qu'un organisme comme le Conference Board, des économistes ou des pays demandent au Canada d'assouplir ou d'éliminer son système de la gestion de l'offre.
Dans l'accord de libre-échange Canada-Union européenne signé en octobre (mais qui reste à être ratifié), Bruxelles a d'ailleurs obtenu une augmentation des quotas d'importation des fromages européens, au grand dam des producteurs canadiens de fromages.
Aussi, l'industrie laitière canadienne a depuis toujours des arguments pour défendre la gestion de l'offre. Selon Les producteurs laitiers du Canada, ce système procure plusieurs avantages aux producteurs, aux transformateurs et aux consommateurs au pays.
Pour les producteurs, la stabilité des prix et de l’approvisionnement leur permet de réaliser «un revenu juste et prévisible», tout en limitant les conséquences du coût des produits laitiers pour le Canadien moyen.
Pour leur part, les transformateurs sont assurés d’un approvisionnement stable et prévisible. Une prévisibilité qui ressemble en plusieurs points à une politique d’assurance à faible risque. Ce qui permet aux transformateurs de planifier et d’investir dans leurs usines et leur matériel.
Quant aux consommateurs, ils ont accès à des produits laitiers locaux, de qualité et à des prix abordables, selon Les producteurs laitiers du Canada. Ces dernières années, la crise alimentaire a fait bondir les prix de détail partout dans le monde. Mais pas au Canada, où les prix à la production et de détail sont demeurés stables, souligne l'industrie.