L'avionneur européen Airbus devait annoncer lundi la construction d'une chaîne d'assemblage en Alabama, établissant une tête de pont aux États-Unis que Boeing a accueillie comme une déclaration de guerre.
Le PDG d'Airbus Fabrice Brégier est arrivé dimanche à Mobile, en Alabama, où il devait confirmer à 10H00 l'implantation du constructeur aux États-Unis, où il estime que 40% des avions devront être remplacés dans les 20 prochaines années.
La chaîne d'assemblage sera construite avec le soutien des autorités locales pour produire jusqu'à 40 monocouloirs A320 par an à partir de 2016, selon des sources proches du dossier.
En prenant une "carte d'identité américaine", Airbus espère pouvoir se battre à armes égales avec Boeing, en jouant sur les prix et les délais de production, a déclaré Marwan Lahoud, directeur de la stratégie.
Airbus, comme Boeing, ont des carnets de commandes tels qu'avec leur rythme de production actuel ils ne peuvent pas satisfaire la demande avant de longues années. "Nous devons de toute façon monter la cadence", a poursuivi M. Lahoud en expliquant le pari de l'avionneur.
"Si on va voir un patron de compagnie américaine en lui disant 'c'est fabriqué ici', la seule question qu'il posera c'est: où est mon avantage compétitif ? Est-ce moins cher, sera-ce livré plus vite ?".
Or Airbus a déjà pris une longueur d'avance sur Boeing en décidant en décembre 2010 de remotoriser son best-seller A320 pour offrir aux clients des avions consommant 15% de kérosène en moins que les modèles actuels.
Les premiers A320 Neo doivent sortir en 2015, deux ans avant le modèle correspondant de Boeing, le 737 MAX.
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Éviter les risques de change
Sans attendre l'officialisation des projets de son concurrent européen, Boeing a tiré une violente bordée dès vendredi.
La firme de Seattle avait mené une campagne virulente et victorieuse contre son rival, obligeant en 2011 le Pentagone à revenir sur sa décision de confier à Airbus le renouvellement de sa flotte d'avions ravitailleurs, un marché de 35 G$ US.
Prêtant à Airbus la "promesse de déplacer des emplois d'Europe vers les États-Unis", il affirme que les aides "illégales" qu'Airbus a reçues des gouvernements européens ont détruit des "milliers d'emplois américains".
En réalité, l'Organisation mondiale du commerce (OMC) a jugé que Boeing comme Airbus avaient bénéficié d'aides gouvernementales excessives, dans des décisions que chacune des parties interprète à son avantage.
Airbus cherche à réduire ses coûts en assemblant des appareils aux États-Unis. Il évitera ainsi le risque de change: les avions se vendent sur le marché mondial en dollars, alors qu'il produit essentiellement en Europe.
Mais l'avionneur se défend de vouloir transférer de la charge de travail d'Europe vers les États-Unis. L'assemblage d'un avion ne représente que 5% de sa valeur, le reste représente des commandes pour les fournisseurs et les sous-traitants qui montent les différentes sections l'appareil, soulignent les dirigeants de l'entreprise.
Ils devaient défendre ce raisonnement devant les syndicats des différents sites du groupe qui se réunissent lundi en comité de groupe européen.
L'Allemagne, un des deux pays avec la France qui cherchent à peser sur la stratégie d'Airbus et de sa maison mère EADS, a déjà donné un blanc seing au projet américain de l'avionneur.
Peter Hintze, coordinateur du gouvernement allemand pour l'aéronautique qui reprochait il y a quelques mois à EADS de ne pas créer assez d'emplois en Allemagne, a estimé qu'une usine aux États-Unis, "est un véritable plus pour les Européens dans le cadre de la compétition avec Boeing".