La déflation qui afflige la zone euro pourrait miner la croissance économique dans l'Union européenne (UE) et réduire les occasions d'affaires dans le deuxième marché d'exportation du Québec.
En 2014, les entreprises québécoises ont expédié pour 8,9 milliards de dollars de marchandises dans l'UE, selon Statistique Canada. Comme le Québec y achemine 12 % de ses exportations, la déflation dans la zone euro est un enjeu de taille pour nos exportateurs, car elle pourrait réduire la demande locale dans les 19 pays de l'union monétaire.
Pourquoi ? Parce que si elle se prolonge, la déflation pourrait forcer les entreprises européennes à baisser leurs prix pour tenter de vendre leurs produits, mais aussi à abolir des emplois et à diminuer les salaires. Conséquence ? La réduction de la demande nationale provoquerait de nouvelles baisses de prix.
La situation dans la zone euro est préoccupante. Les prix baissent depuis trois mois, notamment en raison de la chute de 48 % du prix du baril de pétrole depuis six mois ; il était à 49,59 $ le 2 mars, selon Bloomberg.
En décembre, les prix ont diminué de 0,2 %, révélait Eurostat. En janvier, ils ont chuté encore de 0,6 %, tandis qu'en février les prix ont reculé de 0,3 %. Pour l'ensemble de 2015, ils devraient baisser en moyenne de 0,1 %, prévoyait la Commission européenne (CE) le 5 février.
Une économie qui stagne
Si la déflation se confirme à long terme, l'économie de la zone euro ne pourra pas redémarrer, alors qu'elle stagne déjà. En 2014, le PIB de la zone euro devrait progresser de 0,8 %, selon l'Economist Intelligence Unit (EIU). C'est beaucoup moins que la croissance enregistrée au Canada (2,4 %), aux États-Unis (2,4 %) ou au Royaume-Uni (2,7 %), selon EIU.
Au début de février, la CE a écarté un scénario où l'union monétaire plongerait dans longue période de baisse généralisée des prix. De juin à octobre 2009, la zone euro avait connu une brève période de déflation, pour renouer ensuite avec l'inflation. La CE pense que l'histoire se répétera.
Cet optimisme n'est toutefois par partagé par tous les experts.
En janvier, dans un entretien au magazine Challenges, Howard Archer, d'IHS Global Insight, affirmait que la baisse marquée du prix du pétrole et son impact sur l'ensemble des prix faisaient en sorte qu'il semblait «de plus en plus probable» que la zone euro s'apprête à connaître plusieurs mois de déflation. Le 24 février, il disait tabler sur une période de déflation qui durerait jusqu'à l'automne.
Le pire scénario serait que la zone euro glisse dans une période prolongée de déflation comme celle que connaît le Japon depuis près de 20 ans. En juin 2014, la Banque du Japon a même mis en garde la zone euro contre le risque potentiel d'un scénario à la japonaise.
Chose certaine, si les prix ne baissent pas dans l'union monétaire à long terme, ils ne progresseront pas rapidement, du moins si l'on se fie au marché obligataire européen, selon les économistes. Actuellement, les obligations de l'Allemagne de deux et de cinq ans offrent un rendement négatif de 0,23 % et de 0,08 %, selon Bloomberg. Les investisseurs paient donc Berlin pour lui prêter des capitaux. Or, quand les rendements obligataires sont faibles dans une économie, cela signfie que les anticipations d'inflation sont également basses.
- 0,1 %: Les prix devraient baisser en moyenne de 0,1 % dans les 19 pays de la zone euro en 2015. Source : Commission européenne