L'Europe n'est pas dans la même situation que le Japon, mais les pressions déflationnistes dans la zone euro sont de plus en plus préoccupantes pour les Européens et les investisseurs.
Le 5 février, la Commission européenne a indiqué que les prix devraient baisser en moyenne de 0,1% dans la zone euro cette année. Et la CE est plus pessimiste qu'en novembre, alors qu'elle prévoyait une hausse des prix de 0,8% en 2015.
Il faut dire que les prix baissent constamment ces derniers mois. En décembre, ils ont diminué de 0,2%; et en janvier, le recul était 0,6%, selon Eurostat.
Bon nombre d'économistes affirment que la dégringolade des prix du baril du pétrole est la principale cause des pressions déflationnistes dans la zone euro.
Mais la chute du cours de l'or noir n'explique pas tout. Par exemple, en décembre, l'inflation s'établissait à 1,5% au Canada, selon Statistique Canada.
À court terme, une baisse générale des prix pourrait même être positive, soulignent certains analystes. Car, toute chose étant égale par ailleurs, elle peut être assimilable à une baisse d'impôt, ce qui stimulerait les dépenses de consommation.
C'est quand la baisse générale des prix s'étale dans le temps qu'elle devient un véritable cauchemar, font remarquer les économistes.
Pourquoi la déflation est un cauchemar
Pourquoi? Les salaires baissent. Les dépenses de consommation reculent. Les ventes et les revenus des sociétés déclinent - ce qui les incite à réduire leurs prix. Cela s'est produit aux États-Unis, dans les années 1930, et au Japon, depuis près de 20 ans.
Pis encore, tous les agents économiques - consommateurs, entreprises, gouvernements - voient leur niveau d'endettement bondir puisque les dettes ne changent pas en valeur nominale.
L'horizon s'assombrit aussi pour les investisseurs. Car la déflation à long terme provoque généralement une stagnation économique, voire une dépression. Rien pour stimuler la valorisation des actions des entreprises cotées en Bourse.
Reste à savoir maintenant si les pressions déflationnistes dans la zone euro seront seulement temporaires. Beaucoup d'analystes soutiennent que le prix du baril de pétrole est appelé à augmenter dans les prochains trimestres de 2015, voire en 2016.
Mais cela sera-t-il suffisant pour relancer l'ensemble des prix dans la zone euro?
Rien n'est moins sûr, car la zone euro affiche plusieurs faiblesses.
Les faiblesses inquiétantes de la zone euro
À long terme, son potentiel de croissance économique est limité en raison du déclin démographique de l'Europe.
À moyen terme, les politiques d'austérité dans certains pays de la zone euro n'ont rien pour stimuler l'activité économique, bien au contraire.
À court terme, la Banque centrale européenne (BCE) n'a pas la même marge de manoeuvre qu'une banque centrale typique pour stopper la déflation à long terme.
Dans une analyse publiée dans Les Échos en 2014, l'économiste Sylvain Fontan soulignait que le Japon est une nation souveraine sur le plan monétaire avec une banque centrale, qui n'est pas indépendante du pouvoir politique.
En revanche, la zone euro est un espace politique fragmenté, qui a une banque centrale indépendante avec un mandat - ou une mission - restrictif.
Par exemple, la BCE a eu toutes les misères du monde à déployer un semblant de politique d'assouplissement quantitatif, comme la Réserve fédérale aux États-Unis.
La situation de l'Europe n'est certes pas aussi précaire que celle du Japon, avant que le pays ne soit affecté par une déflation rampante, à compter de la fin des années 1990. Quelques années plus tôt, l'éclatement d'une bulle immobilière avait plongé l'économie japonaise dans la tourmente.
Cela dit, le risque que la zone euro plonge durablement dans une déflation à long terme est réel. C'est pourquoi les investisseurs auraient tout intérêt à considérer ce risque dans leurs stratégies de placement en Europe.