Les activités de crédit non réglementées en Chine - «shadow banking», en anglais - représentent un risque majeur pour l'économie mondiale, affirme le président et chef de la direction de la Caisse de dépôt et placement du Québec, Michael Sabia.
«Je pense que cela représente une vulnérabilité qui a le potentiel de déstabiliser le monde», a déclaré ce mercredi le patron de la Caisse de dépôt, lors d'un déjeuner-causerie organisé par l'association CFA Montréal.
Le 1er octobre 2014, le Fonds monétaire international (FMI) faisait également part de ses inquiétudes à l'égard des activités de crédit non réglementées en Chine.
«Parmi les économies de marché émergentes, la taille et la croissance des activités de shadow banking en Chine sont particulièrement marquantes et nécessitent un suivi particulier», indiquait le FMI sur un ton diplomatique, masquant à peine son inquiétude.
Une préoccupation partagée par Michael Sabia. «Personnellement, je m'inquiète du système de shadow banking en Chine», a-t-il dit, notamment en raison du niveau d'endettement élevé en Chine.
Selon le FMI, cette finance non réglementée progresse à une vitesse deux fois supérieure à celle du crédit bancaire réglementé, et représentait 35% du PNB chinois en mars 2014.
Par ailleurs, Michael Sabia s'est également dit préoccupé par les risques géopolitiques dans le monde, surtout au Moyen-Orient, une région qui n'est pas «très stable», selon lui.
De concert avec d'autres pays sunnites, l'Arabie saoudite a par exemple commencé le 26 mars à bombarder les positions des rebelles chiites au Yémen, les Houthis. Ces derniers sont soutenus par l'Iran, un pays chiite et rival traditionnel de l'Arabie saoudite.
Selon des analystes, cette opération militaire de l'Arabie saoudite au Yémen déstabilise encore plus le Moyen-Orient, car elle accroît le risque d'une guerre directe - elle est indirecte actuellement - entre le royaume saoudien et l'Iran, en plus de favoriser l'expansion du groupe État islamique (EI).
Décalage important entre les marchés et l'économie
Décalage important entre les marchés et l'économie
Enfin, le patron de la Caisse de dépôt s'est dit préoccupé par «l'absence de croissance» économique dans le monde, ainsi que par le «décalage important» entre la performance des marchés financiers et la conjoncture économique.
Par exemple, à l'exception des États-Unis, les sources de croissance ne sont pas nombreuses dans le monde, selon Michael Sabia.
Malgré le ralentissement de la croissance de son PIB à environ 7% par année, la Chine va quand même bien. Mais sa performance a moins d'impact sur la croissance de l'économie mondiale.
Pour sa part, l'économie indienne va mieux (son rythme de croissance pourrait même surpasser celui de la Chine en 2016, selon le FMI), mais Michael Sabia fait partie des observateurs qui demeurent prudents face à la reprise en Inde.
Quant au décalage entre la performance des marchés et la conjoncture économique, le président de la Caisse dit qu'il s'agit d'une grande source d'inquiétude pour lui.
À son avis, les banques centrales devront à un moment où l'autre normaliser leur politique monétaire, ce qui aura un impact sur l'économie et la finance.
Le grand défi pour les banques centrales, c'est qu'elles devront faire ces ajustements, «mais sans créer une crise sur les marchés», insiste Michael Sabia.