Les importations chinoises de produits agricoles sont en forte hausse. De 2005 à 2008, elles ont presque doublé, pour atteindre 58,3 milliards de dollars américains (G $ US). Elles ont légèrement reculé en 2009, à 52 G $ US, en raison de la crise économique.
Cette hausse des importations agricoles est une tendance lourde, selon Zhan Su, titulaire de la chaire Stephen-Jarislowsky en gestion des affaires internationales de l'Université Laval. " La Chine subit une pression de plus en plus importante pour trouver à l'étranger de quoi satisfaire une partie de ses besoins alimentaires ", dit-il. Il précise que le pays n'est pas dans une situation critique, mais qu'il n'est plus autosuffisant.
Les pays d'Amérique du Nord profitent de l'appétit chinois. Cette année, les exportations de produits agricoles des États-Unis vers la Chine bondiront de 25 %, pour atteindre 14 G $ US.
Au Canada, les expéditions de produits agricoles ont été multipliées par quatre de 2006 à 2009, pour atteindre 2,5 milliards de dollars canadiens (G $). Pour ce qui est des six premiers mois de 2010, nos exportations atteignent déjà 1,5 G $, selon Agriculture et Agroalimentaire Canada.
" Nos producteurs ont toujours exporté en Chine, mais actuellement, nos expéditions sont clairement à la hausse ", confie Ian Wishart, un agriculteur du Manitoba et président de Keystone Agricultural Producers, l'association des fermiers manitobains.
Les agriculteurs canadiens y envoient surtout des graines, des fruits oléagineux ainsi que d'autres fruits.
Le Québec profite peu de cette tendance. La province exporte peu et ses volumes stagnent. En 2009, les exportations ont totalisé 43,3 millions de dollars, en tenant compte des aliments transformés. " Il pourrait y avoir des débouchés pour le porc québécois ", souligne Charles-Félix Ross, économiste en chef de l'Union des producteurs agricoles.
Plusieurs facteurs expliquent la hausse des importation chinoises de denrées.
L'agriculture face à Dame Nature
Inondations, sécheresses : les aléas de la nature ont chambardé l'agriculture chinoise au cours des dernières années.
Par exemple, l'an dernier, l'hiver a été très froid - il a beaucoup neigé - et l'été, très chaud, explique Ting-Sheng Lin, spécialiste des réformes économiques en Chine, à l'UQAM. " Cela a réduit la quantité et la qualité des récoltes ", ajoute-t-il.
Pour compenser cette baisse de l'offre locale, la Chine s'est tournée vers les marchés étrangers.
La forte urbanisation que connaît la Chine depuis quelques décennies entraîne une diminution du nombre de terres cultivables. Cette situation nuit à l'offre agricole locale.
Aujourd'hui, environ 45 % des Chinois sont urbains. Et cette proportion s'accentuera au cours des prochaines années. " Le gouvernement veut accroître le taux d'urbanisation d'un point de pourcentage par année ", souligne Zhan Su, spécialiste de la Chine de l'Université Laval.
Nouvelles habitudes alimentaires
L'émergence d'une classe moyenne en Chine - concentrée dans les grandes villes de la côte Est - change la demande alimentaire.
" Ils consomment plus de viandes et de protéines ", remarque Ian Wishart, Keystone Agricultural Producers, en précisant que le Canada exporte du porc en Chine.
De leur côté, les agriculteurs chinois importent beaucoup de soya pour nourrir des animaux et répondre à cette demande en protéine.
Des tarifs douaniers à la baisse
La baisse graduelle des tarifs douaniers - la Chine est membre de l'Organisation mondiale du commerce depuis 2001 - n'est pas étrangère à cette tendance. Cela facilite en effet l'entrée des produits agricoles étrangers sur le marché chinois.