ANALYSE - Des États-Unis à la France en passant par le Japon, les appels à la raison fusent de toute part pour que le Congrès adopte le budget et mette fin au «shutdown» du gouvernement américain. Le temps presse. Des centaines de milliers de fonctionnaires ont été licenciés sans salaire, des centaines de fournisseurs pâtissent, et les banques américaines se préparent à un défaut de paiement de Washington, le 17 octobre. Peut-on imaginer pire scénario pour tuer dans l'oeuf la reprise économique aux États-Unis et au Canada?
Le noeud du problème, c'est qu'une frange radicale du parti républicain - les membres du Tea Party - profite du processus budgétaire pour tenter d'anéantir la réforme de la santé de Barack Obama, le Obamacare, comme on dit aux États-Unis. Une frange qui refuse d'adopter les crédits budgétaires tant que le président ne renoncera pas à son projet.
Or, les Américains ont tranché en faveur de cette réforme en réélisant Obama en 2012, soulignent des analystes.
C'est pourquoi les républicains doivent mettre de l'eau dans leur vin. Et consacrer leur énergie à trouver un compromis avec les démocrates sur des mesures budgétaires directement liées à la saine gestion des fonds publics. Sans quoi, l'incertitude affectera à coup sûr la reprise économique aux États-Unis, d'autant plus si le pays se retrouve en défaut de paiement le 17 octobre - date à laquelle l'État atteindra le seuil maximum légal de ce qu’il peut emprunter, communément appelé le plafond de la dette.
Des entrepreneurs en colère
Une incertitude qui commence à faire beaucoup de mécontents chez les alliés mêmes des républicains, les entrepreneurs américains. Cité par le magazine Bloomberg Businessweek, un fournisseur de fournitures du gouvernement ne mâche pas ses mots pour décrire l'attitude des républicains: «C'est comme si les républicains jouaient aux kamikazes avec l'économie américaine. Pour un homme d'affaires, cela défie toute raison et toute logique.» Un enjeu qui commence sans doute aussi à inquiéter les entreprises canadiennes qui font affaires aux États-Unis.
Chose certaine, le parti républicain n'est plus aussi près d'America Inc. et des intérêts des entrepreneurs, comme il l'était encore à l'époque des présidents Ronald Reagan ou de George Bush père. L'intérêt numéro un des républicains n'est plus l'économie américaine, mais plutôt la réduction de la taille de l'État, déplorent beaucoup d'analystes.
Une obsession du Tea Party qui nuit à l'ensemble du parti républicain, soulignait ce vendredi dans le Financial Times un analyste du R Street Institute, un think tank de droite. «Personne ne doit douter de la sincérité des républicains du Tea Party au Congrès derrière le shutdown du gouvernement. On doit plutôt se questionner sur leur jugement.»
En paralysant ainsi le gouvernement américain, les républicains nuisent à l'économie américaine. Ils mettent des bâtons dans les roues des entrepreneurs et des fournisseurs qui dépendent des approvisionnements gouvernementaux. Enfin, leur entêtement risque de pousser les États-Unis vers un défaut de paiement.
Un scénario catastrophique qui ferait bondir les coûts d'emprunt du gouvernement américain, sans parler de l'impact sur le dollar américain. Le parti républicain qui a historiquement eu à coeur la santé économique des États-Unis est-il mort ou en phase terminale? Difficile de trancher avec certitude. Cela dit, l'entêtement des républicains du Tea Party laisse songeur. Très songeur même.