Certains petits investisseurs et gestionnaires croient qu'il faut investir tout son capital. Pour eux, conserver des espèces ou des titres à court terme, c'est de l'argent qui ne travaille pas. D'autres, au contraire, affirment que garder un petit coussin permet de profiter des occasions lorsqu'elles se présentent. Sans liquidités, on se verra parfois contraint de regarder passer le train.
Avis partagés, comme pour tout ce qui a trait aux stratégies de placement et à la répartition d'actifs. Et ces avis vont se moduler selon que le marché boursier est jugé cher ou abordable.
Plus de liquidités
Stéfane Marion, économiste et stratège en chef à la Banque Nationale Financière, vient justement d'augmenter de 5 à 10 % la pondération en liquidités de son portefeuille modèle. " En raison de la volatilité et de l'incertitude qui plane sur l'économie mondiale, mon équipe a décidé de réduire de 60 à 55 % la pondération en actions et d'augmenter à 10 % celle des liquidités ", explique-t-il.
Ce n'est pas parce qu'il craint un recul des Bourses, mais plutôt parce qu'il estime que le rapport risque-rendement, aux niveaux actuels, ne justifie plus d'être surpondéré en actions. " Et si des occasions se présentent, les 10 % en liquidités pourront être redéployés ", dit-il.
M. Marion souligne que cette répartition d'actifs est celle d'un portefeuille modèle, qui ne s'applique pas à tous les épargnants. " Quand les gens vieillissent, il vaut mieux habituellement avoir plus de liquidités disponibles pour faire face aux imprévus ", souligne-t-il.
De l'argent qui ne travaille pas
À titre de gestionnaire chez Cote 100, Marc L'Écuyer conserve un minimum de liquidités dans ses portefeuilles. " En règle générale, nous essayons d'être pleinement investis. Quand on garde 10 % d'encaisse, c'est autant d'argent qui ne travaille pas. Nous n'avons de normes, mais habituellement, la part d'encaisse en portefeuille est inférieure à 5 %. "
La stratégie de M. L'Écuyer consiste à conserver des titres de qualité à long terme. Pas question de se livrer à du market timing, c'est-à-dire de faire des transactions à court terme en tentant de prévoir les creux et les sommets de certains titres.
" Si de bonnes occasions de placement se présentent, il est toujours possible de vendre des titres qu'on détient afin de se donner une marge de manoeuvre ", ajoute-t-il.
Investir régulièrement
Injecter régulièrement de l'argent frais dans son portefeuille est une autre bonne façon de toujours disposer d'une marge de manoeuvre, souligne Jeffery Lusher, vice-président et directeur, gestion de placement, chez BMO Banque privée Harris. Ce faisant, on dispose toujours d'un peu de liquidités pour tirer profit d'une occasion de placement intéressante.
Si les petits investisseurs conservent trop de liquidités, les émotions risquent d'influer sur leurs décisions de placement, dit M. Lusher.
" Le risque de se tromper est trop élevé, explique-t-il. Nous, en tant que gestionnaires, n'avons pas d'émotions - ou du moins nous tentons d'en avoir le moins possible. Bien sûr, nous pouvons aussi nous tromper. Mais lorsque nous croyons prendre la bonne décision, il n'y a pas de raison de conserver trop de liquidités dans nos portefeuilles. "
D'autant plus, noteront certains, que détenir des espèces ou des titres très liquides à court terme, comme des bons du Trésor, ne rapporte que des grenailles. Il n'y a donc pas un grand intérêt - sans jeu de mots - à détenir beaucoup de liquidités.
De 0 à 10 %, chacun y trouvera son compte, selon son approche de placement, son évaluation de la situation des marchés et sa tolérance au risque.