Les fournisseurs de technologies de pointe sont confortablement assis sur des liquidités colossales qui leur donnent une aura d'invincibilité aux yeux des investisseurs.
C'est le cas aux États-Unis, où les 10 plus importants fournisseurs disposent d'une encaisse totalisant 222 milliards de dollars américains (G$ US), mais aussi au Canada, à une plus petite échelle.
Une analyse réalisée par Les Affaires indique que 21 fournisseurs de technologies canadiens disposent de liquidités totalisant 3,8 milliards de dollars (G$), dont la moitié est dans les caisses du fabricant des appareils intelligents BlackBerry, Research In Motion (RIM). Pour 13 d'entre elles, ces liquidités équivalent à plus du cinquième de leur valeur boursière, une proportion très élevée.
Du capital pour rassurer
Derrière ces millions de dollars se cache la dure réalité des fournisseurs de technologies de petite taille. Pour ces derniers, compter sur un coussin financier est une nécessité. Il leur permet de démontrer à leurs clients et à leurs partenaires qu'ils ont les reins solides.
Certaines entreprises vendent leurs produits et services à peu de clients. Cette dépendance les fragilise et rend leurs résultats trimestriels très volatils. Par exemple, le petit fournisseur de systèmes de surveillance vidéo March Networks, dont l'encaisse de 42,8 millions de dollars (M$) équivaut à 60 % de sa valeur boursière, a réalisé plus du tiers de ses revenus auprès de Walmart au cours du dernier trimestre, clos le 31 juillet. L'entreprise ontarienne vient de redevenir rentable, après avoir connu trois années déficitaires.
Le fournisseur d'équipements de transmission pour Internet sans fil DragonWave, dont l'encaisse représente 42,5 % de sa valeur boursière, tire 85 % de ses revenus d'un seul client, l'américaine Clearwire.
Bridgewater Systems, un fournisseur de logiciels d'authentification pour l'accès aux réseaux sans fil, tire la plupart de ses revenus de trois ou quatre produits et de la force de partenaires comme Alcatel-Lucent et Cisco.
" Avoir de l'argent au bilan permet à ces entreprises de survivre pendant les périodes troubles. Plusieurs sociétés ont aussi besoin d'un coussin pour franchir le cap des 100 M$ de revenus, un seuil que beaucoup de petits fournisseurs de technologies n'atteignent jamais ", souligne Ralph Garcea, analyste chez Northland Capital.
Cet instinct de survie explique la raison pour laquelle si peu de ces entreprises versent ou comptent verser un dividende à leurs actionnaires. Seulement 6 des 21 entreprises répertoriées offrent un dividende : Enghouse Systems, Mosaid Technology, Technologies interactives Mediagrif, Wi-Lan, Gennum et MKS.
Les dividendes gagneront en valeur
Les entreprises de petite taille qui en ont les moyens devraient envisager de verser un dividende ou de l'augmenter pour fidéliser leurs actionnaires et pour attirer de nouveaux investisseurs.
" Le versement régulier d'un dividende impose une discipline financière qui prendra de la valeur aux yeux des investisseurs. Cette obligation peut freiner l'élan dépensier des dirigeants quand une vague de transactions déferle sur leur industrie ", explique Scott Penner, analyste chez TD Newcrest.
Brian Piccione, de BMO Marchés des capitaux, place lui aussi les dividendes en haut de sa liste de critères de sélection. " À mon avis, il est bien difficile de mesurer à quel point les acquisitions créent véritablement de la valeur pour ceux qui ont des actions de l'acquéreur. De plus, les petites entreprises n'ont pas intérêt à racheter leurs actions, car cela rend leur titre encore plus difficile à négocier ", précise l'analyste.
Des cibles d'achat aussi
Les entreprises de technologies qui comptent sur une encaisse élevée peuvent aussi attirer l'attention d'acquéreurs. D'ailleurs, rares sont les entreprises de technologies canadiennes qui n'ont pas été, à une occasion ou une autre, l'objet de spéculation de la part des analystes financiers.
En théorie, toutes les entreprises peuvent être des cibles d'acquisition, puisqu'il est très coûteux pour les petits fournisseurs d'atteindre la masse critique nécessaire pour rivaliser avec les grands, dit M. Garcea.
Même Open Text, avec sa valeur boursière de 2,8 G$, n'est pas à l'abri d'une offre d'achat, puisqu'il est un des deux seuls fournisseurs de logiciels de collaboration et de gestion de fichiers encore indépendants.
Bien que les technos canadiennes n'aient pas l'envergure des vedettes américaines du secteur, certaines se démarquent. Voici cinq coups de coeur des analystes.
PENDANT CE TEMPS, AUX ÉTATS-UNIS
Avec une encaisse de 40 G$ US, le géant de la réseautique Cisco Systems trône en tête du palmarès des fournisseurs américains de technologies qui disposent du coussin financier le plus confortable. Cisco vient d'annoncer qu'elle partagera une partie de la cagnotte avec ses actionnaires, en commençant à verser un dividende d'ici juillet 2011 (qui procurera un rendement de l'ordre de 1 à 2 %).
Microsoft suit au second rang, avec 37 G$ US en poche. Le géant du logiciel verse un dividende depuis déjà six ans déjà, et vient de l'accroître de 23 % à 0,64 $ US par année, ce qui équivaut à un rendement de 2,5 %.