Tous les investisseurs désirent plus de rendement pour moins de risque. Toutefois, un investisseur ne peut espérer bénéficier d'un rendement supérieur sans investir dans des actifs qui offrent une prime de rendement liée au risque. Une prime de risque n'est pas une garantie de rendement positif, mais un soutien à la réalisation d'une performance intéressante à long terme.
Par exemple, considérons un placement qui offre une probabilité de 50 % d'enregistrer un gain de 115 $, et 50 % d'en réaliser un de 95 $, pour un gain total espéré de 105 $. Dans cet exemple, l'investisseur exige une prime de rendement de 3 % pour supporter ce risque, alors que le taux sans risque est de 2 % (soit un rendement exigé de 5 %). Il sera prêt à payer 100 $. Ainsi, même si le rendement exigé comporte une prime de risque, l'investisseur est quand même exposé à une probabilité de 50 % de perdre 5 $ si le scénario de 95 $ survient. Sa compensation est une probabilité de 50 % de réaliser un gain de 15 $ si le scénario de 115 $ se produit.
L'objectif de l'investisseur est de choisir des actifs qui offrent des primes de risque, tout en réduisant l'impact de scénarios défavorables. La diversification des actifs risqués est la meilleure façon de minimiser cet impact et d'atteindre les objectifs de rendement à long terme. Il faut savoir qu'une répartition des actifs sans risque ne diversifie pas un portefeuille ; elle ne fait que réduire proportionnellement le risque et la prime de risque espérée. Un investisseur qui investit 50 % en actions et 50 % en actifs sans risque (tels les bons du Trésor) détient un portefeuille qui offrira exactement la moitié de la prime de risque et du risque des actions.
Diversifier le risque, augmenter le rendement
La diversification d'actifs risqués, telles les actions et les obligations, accroît donc le rendement excédentaire par unité de risque. Toutefois, cet accroissement sera plus significatif si les différentes composantes de portefeuille contribuent de manière plus équilibrée au risque total du portefeuille.
Par exemple, les investisseurs qui possèdent un portefeuille dont la répartition est de 70 % en actions et de 30 % en obligations doivent savoir que plus de 90 % du risque total du portefeuille est attribuable aux actions. Au contraire, si la répartition est inversée à 30 %/70 %, la contribution des deux composantes au risque global est mieux équilibrée. Dans ce dernier cas, le rendement par unité de risque sera généralement plus élevé.
Évidemment, même si une répartition 30 %/70 % offre un rendement supérieur par unité de risque, cette répartition n'offre pas nécessairement le rendement désiré par l'investisseur. Un défi important en gestion de portefeuille est de structurer le portefeuille de manière à obtenir une diversification plus efficace et, en même temps, de dégager une prime de rendement suffisante. Cela demeurera un de nos thèmes au sein des prochains articles, mais voici déjà trois éléments de réponse.
Le premier élément est lié à la volatilité des rendements et aux frais de gestion. Plus un portefeuille est volatil et plus cette volatilité ampute le rendement composé du portefeuille. Or, un portefeuille dont le risque total est dominé par une composante risquée offre une diversification moins efficace, ce qui amputera davantage le rendement annuel moyen réalisé.
D'autre part, si les frais de gestion sont plus élevés en actions qu'en obligations, une répartition plus importante en actions accroîtra le niveau moyen des frais du portefeuille. Par exemple, nous pourrions démontrer que, même si le rendement annuel typique visé avant les frais sur un portefeuille 70/30 était approximativement de 2,2 % plus élevé annuellement que celui d'un portefeuille 30/70, la volatilité et les frais excédentaires des fonds de placement du portefeuille 70/30 pourraient réduire l'écart cumulatif de performance à long terme à 1,2 % seulement entre ces deux portefeuilles.
Le second élément est lié à la contribution au risque du portefeuille. Le fait de combiner une composante d'actions de type valeur (par exemple à haut rendement en dividende) avec une composante d'obligations de durée longue intégrant une répartition des crédits corporatifs élevée, permettra une diversification plus efficace à long terme que la combinaison d'une composante en actions plus risquée et d'une composante en obligations de durée faible, comportant une faible répartition en crédits corporatifs. Les risques sont mieux équilibrés dans le premier cas que dans le second.
Le troisième élément est lié à l'instabilité des primes de risque. Les investisseurs exigent des primes plus élevées en situation de marché défavorable et plus faibles en situation de marché favorable. Ainsi, acheter le marché quand tout va bien entraîne le paiement d'une prime de risque plus faible par le vendeur. D'un autre côté, vendre en période difficile implique un paiement d'une prime de risque plus élevée à l'acheteur. Il faut, dans la mesure du possible, éviter ce type de comportement qui explique en grande partie pourquoi le petit investisseur ne parvient généralement pas à réaliser le rendement des indices boursiers à long terme.
En collaboration avec l'Association CFA Montréal, qui représente des professionnels de la finance des marchés de Montréal, Les Affaires présente d'ici l'été une série sur la gestion de placement. L'objectif : aider l'investisseur à bâtir un solide plan d'investissement.
Par Jacques Lussier, CFA, chef de stratégies, Christian Felx, CFA, gestionnaire de portefeuille, et Richard Guay, CFA, professeur titulaire en finance et Fellow Cirano.