Plusieurs actions privilégiées, en particulier celles des banques canadiennes, atteignent actuellement un sommet pour les 52 dernières semaines. Les investisseurs doivent toutefois être prudents avant d'en acheter dans un contexte où les taux d'intérêt sont bas, affirment les experts.
Il faut savoir que les actions privilégiées ne sont pas aussi sécuritaires que les obligations. En effet, l'émetteur n'est pas tenu de verser les dividendes, contrairement aux intérêts sur les obligations. Et les détenteurs d'actions privilégiées n'ont aucun recours pour exiger le remboursement de leur capital en cas de liquidation de l'entreprise.
" Si l'émetteur réduit ou supprime le dividende, le cours des actions pourrait chuter ", dit Kate Warme, stratège du marché canadien chez Edward Jones. À preuve, lorsque Nortel Networks s'est placée sous la protection des tribunaux en janvier 2009, ses actions privilégiées émises au prix de 24 $ ne valaient plus que 0,05 $.
Par ailleurs, il existe plusieurs sortes d'actions privilégiées et, par conséquent, elles n'évoluent pas toutes de la même façon.
Très sensibles aux variations des taux
Actuellement, ce sont les actions privilégiées perpétuelles à taux fixe qui offrent le meilleur rendement. Celui-ci s'établit en moyenne à 5,8 %, précise James Hymas, président d'Hymas Investment Management. En ajoutant l'avantage fiscal que procurent les dividendes, soit en multipliant par 1,36, on obtient un rendement obligataire de 7,89 %. " Or, les obligations de sociétés de longue échéance, assez semblables à ces actions, procurent un rendement moyen de 5,5 %. L'écart est de 2,39 points, ce qui est supérieur à la moyenne historique ", explique-t-il.
Par contre, cet écart reflète la perception du marché qui craint qu'une hausse des taux d'intérêt ne fasse chuter le cours de ces actions. " C'est que les actions privilégiées perpétuelles à taux fixe sont beaucoup plus sensibles aux mouvements de taux que les obligations ", dit Mme Warme.
De plus, les actions privilégiées perpétuelles n'ont pas d'échéance. " Vous risquez donc de détenir un mauvais placement à perpétuité, prévient David Tremblay, gestionnaire du Fonds Omega actions privilégiées. C'est pourquoi il vaut mieux opter pour les actions de sociétés qui ont une meilleure cote de crédit, comme P1 ou P2. "
Enfin, les actions privilégiées perpétuelles sont rachetables au gré de l'émetteur. Normalement, il le fera seulement s'il peut émettre de nouvelles actions privilégiées offrant un dividende moins élevé que celui des titres en circulation.
" Si les taux d'intérêt montent, l'émetteur n'aura aucun intérêt à racheter les actions ", souligne Mme Warme. L'investisseur restera donc coincé avec des titres déprimés, dont le rendement sera moins attrayant que celui des nouveaux titres émis.
Des actions moins risquées
Certaines actions privilégiées sont rachetables à une date précise au gré du détenteur. Ces actions privilégiées ont l'avantage d'être moins sensibles aux taux d'intérêt. " Mais ces actions procurent des rendements un peu plus faibles (environ 4,8 % présentement) et s'échangent à un cours près de leur moyenne historique ", indique M. Tremblay.
" Par contre, comme leur échéance atténue le risque, on peut accroître le rendement en achetant des titres ayant une cote de crédit moindre, c'est-à-dire P3 ", ajoute-t-il. M. Tremblay conseille en outre les actions privilégiées rachetables de Patrimoine Dundee (DW.PR.A) et de Pages Jaunes (YPG.PR.A).
Les émetteurs d'actions privilégiées perpétuelles à taux rajustés modifient périodiquement (normalement après cinq ans) les taux applicables aux dividendes pour les adapter aux taux d'intérêt. Le rendement de ces actions fluctuera donc au même rythme que les taux d'intérêt.
Par conséquent, ces actions privilégiées offrent une bonne protection contre l'inflation. " Le seul problème, c'est que leur rendement moyen est de 3,4 %, ce qui est nettement moindre que celui des actions privilégiées perpétuelles à taux fixe et légèrement sous la moyenne historique ", explique M. Tremblay. Il recommande les actions privilégiées à taux rajustés d'Industrielle-Alliance (IAG.PR.C) et d'Energex (INE.PR.A).
Bruce Kent, portefeuilliste chez RBC Dominion valeurs mobilières, suggère pour sa part celles d'Emera (EMA.PR.A), de Financière Power (PWF.PR.P), de Fairfax Financial (FFH.PR.E) et de Fortis (FTS.PR.H).