Augmenter la limite de cotisations au compte d’épargne libre d’impôt (CELI) à 10 000$ est une décision sensée, croit Douglas Porter, économiste en chef de la Banque de Montréal (BMO). Puisque les titres à revenus fixes procurent un rendement famélique, il est normal de laisser un peu plus d’argent entre les mains des épargnants, selon lui.
«L’impôt sur les titres à revenus fixes se fait sur des taux d’intérêt inférieurs à l’inflation, rappelle l’économiste rencontré lors d’un passage à Montréal. Autrement dit, le rendement réel après impôt est négatif.»
Le gouvernement fédéral a augmenté le plafond du CELI à 10 000$ dès 2015. Ce maximum annuel sera maintenu pour les années à venir, si le prochain gouvernement élu à l’automne ne change pas de cap. Les libéraux et les néo-démocrates, pour leur part, ont promis de renverser cette promesse s’ils remportaient le pouvoir. Cette mesure ne profiterait qu’aux particuliers aisés (qui auront les moyens d’épargner 10 000$ chaque année), dénoncent les deux partis d’opposition.
L’allègement fiscal a aussi soulevé des critiques pour son coût. Au cours des cinq prochains exercices, le relèvement de la cotisation maximale de 5500$ à 10 000$ réduira de 1,135 G$ les revenus d’Ottawa. Les provinces devront, elles aussi, compenser certaines baisses fiscales. Avant même le relèvement du plafond, le directeur parlementaire du budget avait indiqué que le coût du CELI pourrait atteindre 0,6% du PIB en 2080.
Si la récompense offerte aux épargnants qui investissent dans les titres à revenus fixes est mince, Ottawa, pour sa part, profite des faibles taux d’intérêt, qui lui permettent de réduire son service de la dette, estime M. Porter. «La compensation offerte aux épargnants est somme toute modeste en comparaison.»
Questionné sur l’idée de plafonner le montant maximal pouvant être mis dans un CELI au cours d’une vie, M. Porter dit voir cette proposition d’un œil favorable.
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Baisse d’impôt et déséquilibre fiscal
Toujours en ce qui concerne les finances publiques, M. Porter affirme que le fractionnement de revenus et la bonification des allocations familiales donneront un coup de fouet à l’économie. «Ce sera 9 G$ qui retourneront dans l’économie canadienne cet été, commente-t-il. Ça va stimuler les dépenses en consommation.»
Il exprime toutefois un désaccord avec un aspect du budget publié mardi. On peut lire dans le document «qu’il n’y a pas de déséquilibre fiscal au Canada». «En tout respect, je ne suis pas d’accord», répond l’économiste.
Tandis que le fédéral affiche des finances relativement saines, les provinces qui ont la responsabilité du système de santé se trouvent dans des postures plus difficiles.
«Lorsqu’on regarde les prévisions du directeur parlementaire du budget, on constate que la dette fédérale diminue à long terme, mais que celles des provinces montent. En raison leurs compétences respectives, le gouvernement fédéral est en relative bonne forme, contrairement aux provinces. Nous devrons trouver une manière de combler le fossé qui sépare les deux paliers de gouvernement.»