Le REEE est un outil d'épargne formidable qui recèle de nombreuses possibilités. Comment en tirer le maximum ?
C'est un fait méconnu : le REEE est un des régimes d'épargne les plus généreux du... monde ! Philippe et Justine, parents d'un futur pompier, Xavier, un bambin de deux ans, viennent de saisir toute la pertinence du Régime enregistré d'épargne-études (REEE). «Je peux déjà compter sur un régime de retraite généreux de mon employeur, et j'hésite à cotiser au REER en 2014», explique Philippe, à l'emploi d'une municipalité. Sa conjointe, enceinte d'un deuxième enfant, aimerait bien pour sa part assurer l'éducation supérieure de leur marmaille sans ressentir les contraintes budgétaires associées au paiement des frais de scolarité, du logement et du matériel scolaire de plus en plus coûteux. «Dans une quinzaine d'années, je veux qu'on soit prêts», résume la jeune femme.
Le REEE est trop bien conçu pour ne pas s'en prévaloir ! Au même titre que les autres régimes d'épargne enregistrés, il permet d'épargner à l'abri de l'impôt. Bien que la cotisation à ce régime ne soit pas déductible du revenu (au contraire du REER, mais comme le CELI), elle entraîne automatiquement le dépôt de certaines subventions au compte, qui valent à elles seules leur pesant d'or.
Trois acronymes fort payants : SCEE, BEC et IQEE
La subvention canadienne à l'épargne-études (SCEE) est le premier incitatif versé par le gouvernement fédéral. «Ses taux modulés avantagent les familles à faible revenu», explique d'emblée Stéphane Leblanc, comptable agréé et associé en fiscalité chez EY (Ernst & Young).
Le deuxième incitatif fédéral est le Bon d'études canadien (BEC), qui prend la forme d'une contribution initiale de 500 dollars au REEE, et de paiements additionnels de 100 dollars par an pendant 15 ans. «Il s'agit d'une mesure conçue pour encourager les parents à faible revenu à constituer un REEE pour leurs enfants», ajoute le comptable. Pour être admissibles, les familles doivent recevoir en continu le supplément de la prestation nationale pour enfants (SPNE), une aide financière additionnelle versée mensuellement avec la Prestation fiscale canadienne pour enfants (PFCE). Un revenu familial net de moins de 25 356 dollars par an permet de recevoir le plein montant de SPNE.
Le gouvernement du Québec propose de son côté l'incitatif québécois à l'épargne-études (IQEE), une contribution forfaitaire équivalant à 10 % de la cotisation versée, jusqu'à concurrence de 250 dollars par an et par enfant. Un montant pour les droits non utilisés des années antérieures, également plafonné à 250 dollars par an, peut s'ajouter au montant de base. «Une majoration annuelle qui peut atteindre 50 dollars peut aussi être accordée en fonction du revenu», précise Stéphane Leblanc.
Qu'advient-il...
... quand l'enfant poursuit des études admissibles
«Il faut d'abord comprendre qu'il y a deux types d'actif dans le REEE : les paiements d'aide aux études (PAE), composés de la somme des subventions reçues et de la totalité des rendements générés depuis l'ouverture du compte, et les cotisations au régime», précise Maud Salomon, conseillère en sécurité financière et représentante en épargne collective chez Mica Capital.
Lorsque Xavier, l'aîné de Justine et Philippe, sera inscrit dans une institution d'enseignement postsecondaire, et jusqu'à six mois après la cessation de son inscription, les PAE qui lui seront versés pour l'aider à payer le coût de ses études seront imposés entre ses mains. Le montant maximal qui peut être versé à un étudiant au début de son programme de formation admissible lors des 13 premières semaines est de 5 000 dollars.
Philippe et Justine pourraient, après réception de ce premier versement, choisir de retirer les cotisations qu'ils ont effectuées au régime, sans conséquence fiscale ni pénalité aucune sur les subventions gouvernementales reçues, dans l'objectif de réaliser d'autres projets. «Mieux, en les transférant au REER, ils feraient travailler le même argent à deux reprises», ajoute Maude Salomon.
... si l'enfant ne poursuit pas ses études ?
Dans cette éventualité, c'est le type de régime - individuel ou familial - qui dicte la suite des choses. Stéphane Leblanc favorise plutôt la constitution d'un REEE familial. «Si le premier enfant ne poursuit pas d'études postsecondaires, les sommes accumulées pourront bénéficier à un autre enfant de la famille désigné au contrat», souligne-t-il.
À défaut d'un autre bénéficiaire, le REEE sera démantelé de la façon suivante :
1. Puisque les cotisations effectuées par le souscripteur du REEE lui appartiennent, le capital d'origine peut être récupéré par le parent.
2. Les subventions, par contre, sont alors remboursées aux divers paliers de gouvernement.
3. Les paiements de revenu accumulé (PRA) (soit le rendement réalisé sur le capital et les subventions) peuvent être remis au souscripteur si deux conditions sont respectées. «L'enfant a plus de 21 ans et le régime est en vigueur depuis plus de 9 ans», explique Stéphane Leblanc. À défaut, cette composante du REEE sera remboursée au souscripteur après le 35e anniversaire du régime, ou au décès du bénéficiaire.
Cependant, quel que soit le moment du remboursement de l'ensemble de ces gains, il s'agit d'un retrait imposable, «au taux marginal du contribuable, plus un impôt supplémentaire combiné de 20 % dicté par les règles fiscales», dit-il. Le souscripteur pourrait cependant transférer les sommes concernées à son REER en totale franchise d'impôt.
De longues années pour fructifier
Vous avez finalement décidé de profiter des nombreux avantages du REEE. Quel type de régime vous conviendra le mieux ? Comment devriez-vous faire fructifier les sommes qui s'y trouvent ?
Les produits financiers admissibles au REER (CPG, obligations, fonds communs, actions) le sont généralement dans le REEE. «L'investisseur doit respecter son profil», rappelle Maud Salomon, qui est à l'origine du portail reee.ca. Lorsque l'échéance du décaissement se rapproche, elle s'assure de diminuer le risque de marché associé aux placements détenus en portefeuille. Ce moment ne sera pas nécessairement le même selon que l'enfant se dirige vers des études professionnelles ou qu'il a l'intention de faire un doctorat. «À plus de cinq à sept ans du décaissement, il peut s'avérer judicieux d'investir dans des fonds communs de croissance», suggère-t-elle.
Et les REEE collectifs ?
Ces derniers offrent la tranquillité d'esprit aux cotisants qui ne souhaitent pas s'engager dans la gestion des fonds. Un gestionnaire veille au grain, limitant cependant la répartition de l'actif à des titres prudents comme les bons du Trésor, les obligations gouvernementales et les CPG.
Ce type de régime bénéficie de la règle de l'attrition, selon laquelle l'ensemble des revenus de placement ne profite qu'aux bénéficiaires qui poursuivent des études admissibles. Un avantage pour certains, certes, mais qui se transforme en désagrément pour le cotisant dont l'enfant désigné ne fait pas d'études avancées. Ce parent doit donc notamment faire le deuil du rendement accumulé jusqu'à maintenant au bénéfice des autres étudiants. «Ce phénomène d'attrition est beaucoup moins important aujourd'hui qu'il ne l'était auparavant, puisque les paiements d'aide aux études sont désormais accessibles pour une multitude de programmes, d'institutions d'enseignement et de niveaux d'études postsecondaires», explique Isabelle Lessard, conseillère principale, communication et relations publiques chez Gestion Universitas, une des organisations réputées du secteur.
D'autres apprécient plutôt la discipline d'épargne qu'exige ce genre de régime. Le cotisant doit s'engager pour une durée prédéterminée et sans interruption à verser une mensualité obligatoire établie en fonction de l'âge de l'enfant au moment de l'adhésion.
Ces régimes sont plus complexes, et sont assujettis à des règles particulières. Les experts consultés vous recommandent donc d'analyser avec soin le prospectus du régime collectif choisi pour bien comprendre notamment la structure de frais qui y sont associés.
Aide financière aux études : les retraits éventuels du REEE n'ont aucun impact sur les montants accordés en prêts et bourses à l'étudiant.
35,6 G$ : Somme que les Canadiens détenaient dans leur REEE à la fin de 2012. - Source : Ressources humaines et Développement des compétences Canada
7 235 $ : Retrait moyen du REEE effectué par les étudiants en 2012 - Source : Ressources humaines et Développement des compétences Canada
Trois formules de REEE
REEE autogéré / Individuel
Idéal si vous n'avez pas de liens de parenté avec l'enfant pour lequel vous cotisez.
Vous pouvez nommer un seul bénéficiaire, y compris vous-même.
Aucune restriction ne s'applique en matière d'âge.
Vous souhaitez gérer les placements vous-même.
REEE autogéré / Familial
Idéal si vous avez plusieurs enfants, puisque vous pouvez nommer un ou plusieurs bénéficiaires.
Chaque bénéficiaire doit être lié par le sang ou par l'adoption et avoir moins de 21 ans au moment de sa désignation.
L'argent épargné peut être partagé entre les enfants désignés au REEE.
Vous souhaitez gérer les placements vous-même.
REEE collectif
Ces régimes mettent en commun le capital de plusieurs souscripteurs.
Idéal si vous ne souhaitez pas gérer vous-même le capital à investir.
Il ne peut y avoir qu'un seul bénéficiaire au contrat.
Nul besoin d'avoir de liens de sang avec le bénéficiaire ni d'être son parent adoptif.
Des règles supplémentaires encadrent ce type de régime.
Principaux émetteurs [REEE collectifs]
- Consultants C.S.T.
- Corporation REEE Global
- Gestion Universitas
- Fonds d'Études pour les enfants
- La Première financière du savoir
Certaines vérifications s'imposent avant de choisir un REEE autogéré auprès d'une institution financière. Certaines grandes banques canadiennes offrent des régimes sans frais, d'autres accordent une exonération lorsque le solde du compte est supérieur à 25 000 dollars, et plusieurs banques facturent des frais de gestion annuels de 50 dollars en début d'année.
Trois astuces payantes, payantes!
1. Un REEE familial financé par le gouvernement
C'est lorsque le revenu net familial est au plus bas que la subvention canadienne à l'épargne-études (SCEE) et l'incitatif québécois à l'épargne-études (IQEE) s'avèrent les plus généreux ! L'idéal est donc d'ouvrir un REEE lors du congé de maternité en s'assurant que l'enfant a son numéro d'assurance sociale. Les parents pourraient dès lors rediriger la prestation universelle pour la garde d'enfants (PUGE) que le gouvernement fédéral leur verse (100 dollars par mois et par enfant de moins de 6 ans) et constituer ainsi un REEE sans sortir un cent de leur poche !
2. Mieux vaut tard que jamais !
Les enfants de 16 et de 17 ans ne peuvent obtenir de subventions que si un montant de 2 000 dollars a déjà été cotisé au préalable au REEE ou si des cotisations de 100 dollars y ont été effectuées chaque année depuis que l'enfant a 12 ans. Si le parent s'y prend tard, il aurait avantage à placer 2 000 dollars au moins dans un REEE quand l'enfant aura 15 ans. Ensuite, pour obtenir le maximum de subventions, le cotisant devra déposer jusqu'à 5 000 dollars au cours des deux années suivantes pour obtenir jusqu'à 3 600 dollars de subventions sur les 12 000 dollars cotisés. «Avec un rendement assuré de 30 %, cela vaut même la peine d'emprunter pour contribuer à un REEE durant les dernières années d'admissibilité aux subventions», calcule Annie Boivin, vice-présidente, planification fiscale et successorale, Gestion de patrimoine TD.
3. Retirer, déposer de nouveau... et recommencer
Une fois votre aîné inscrit à des études admissibles, retirez annuellement une partie du capital REEE, afin de le réinvestir immédiatement au profit d'un deuxième enfant. Vous pourrez ainsi bénéficier des subventions sur ce même argent ! Répétez cette manoeuvre chaque année, dans l'objectif de multiplier le pécule disponible !
Une assurance pour combler de grandes ambitions
Vous caressez peut-être de grandes ambitions pour votre rejeton, comme des études en neurochirurgie ou dans un domaine scientifique au Massachusetts Institute of Technologies (MIT) ? Si vous croyez pouvoir optimiser les contributions au REEE, vous pourriez aussi acheter une assurance vie universelle sur la tête de votre futur génie. Ce produit vous permet d'abord de lui garantir une prime minime pour une assurance vie, toute sa vie durant. Il offre aussi la possibilité de faire fructifier de l'argent.
Il suffit de verser davantage que la prime minimum. Les sommes versées en surplus s'apprécient à l'intérieur d'un fonds d'investissement, à l'abri de l'impôt. Enfin presque, car l'assureur paie une taxe de 2,55 % sur les primes d'assurance au Québec en plus d'un impôt de 15 % sur les revenus de placement. Évidemment, ces charges sont refilées au bout du compte aux assurés, mais c'est moins que l'impôt sur les gains en capital.
Il y a un impôt à payer sur les gains en capital lorsqu'on retire l'argent, entre les mains du propriétaire de la police. Le montant d'impôt est déterminé en fonction d'un savant calcul réalisé par l'assureur. Et celui-ci peut imposer d'autres frais de rachat. Bref, une option complexe pour les parents qui ont les poches profondes.
En cas de deces du souscripteur du REEE :
Puisque les cotisations appartiennent au souscripteur initial, elles seront léguées aux héritiers légitimes, qui peuvent, a leur gré, les laisser dans le régime ou les retirer sans incidence fiscale. Pour s'assurer que ses cotisations servent aux études du bénéficiaire de REEE, le souscripteur doit, dans son testament, lui léguer spécifiquement les sommes contenues dans le régime.