La saison des impôts coïncide avec le retour en force de drôles d’oiseaux prédateurs qui plument chaque année les pigeons qui tombent entre leurs griffes, soit des milliers de contribuables canadiens qui se font escroquer au moment de remplir leur déclaration de revenus.
Pas moins d’un Canadien sur cinq aurait été victime ou témoin d’une escroquerie en période d’impôt, selon un sondage de l’Association des comptables généraux accrédités du Canada (CGA-Canada).
En deux décennies de pratique, Pierre Brochu, CPA et CGA chez EPR, a entendu « toutes sortes d’histoires d’arnaques ».
« Les contribuables ne comprennent pas nécessairement tout ce qu’ils signent lorsqu’ils s’occupent de leurs impôts, dit-il. Les fraudeurs le savent et profitent en particulier de la saison des impôts pour abuser de la confiance de personnes qui sont loin d’être expertes en fiscalité. »
Face à l’ampleur du phénomène, contre quel type d’escroquerie doit-on se prémunir?
Un don qui rebondit
Première mise en garde : les faux organismes de bienfaisance.
Certains se font passer pour de grandes associations en usurpant leur nom. D’autres contactent les particuliers prétextant un suivi relatif à un don prétendument réalisé. Toutes font davantage la promotion des économies d’impôts qui seront réalisées qu’elles ne développent un argumentaire sur la cause à soutenir.
« L’arnaque consiste souvent à émettre un reçu pour impôt dont le code, qui doit se retrouver sur le reçu en question, sera inadmissible auprès de Revenu Canada », commente Jacqueline Lemay, CPA, CA, experte en juricomptabilité.
En fin de compte, la perte est double pour les victimes qui voient non seulement leurs dons, mais aussi le remboursement d’impôt tant espéré s’envoler dans la nature.
« Il est pourtant facile de vérifier qu’un organisme est enregistré auprès de Revenu Canada, et de s’assurer que le nom et l’adresse correspondent », explique Mme Lemay.
Attention aux faux-semblants
Attention aux faux-semblants
Des promotions alléchantes sur le remboursement d’impôt aux calculs d’honoraires douteux, les pseudo-experts en déclaration de revenus qui s’improvisent comptables en période d’impôt sont légion.
« Il ne faut pas avoir une confiance aveugle en son comptable, prévient M. Brochu. Ce n’est parce qu’on fait les impôts des autres que l’on est fiscaliste. » L’expert constate, chaque année, que des « spécialistes » parviennent facilement à berner les clients qui leur ont fait confiance.
Le stratagème de ces maîtres de l’arnaque consiste à détourner les remboursements d’impôts des particuliers ou à falsifier les déclarations qui se retrouvent entre leurs mains.
« Les gens sont prêts à signer un chèque en blanc à la personne qui se chargera de leurs impôts ou à la payer en argent comptant, déplore M. Brochu. Ils laissent aussi le supposé spécialiste recevoir les avis de cotisations à son adresse. Il s’est donc parfois écoulé plusieurs années avant qu’ils ne s’aperçoivent que l’argent n’a jamais été réellement versé à l’État. »
Dans ce laps de temps, le préparateur de la déclaration peut alors agir à sa guise pour que ces sommes atterrissent dans ses poches ou bénéficient à d’autres.
CGA-Canada invite à la plus grande vigilance en rappelant que même si « les victimes de ce type de fraude ne sont généralement pas au courant des actions du spécialiste (…) elles en sont pourtant tenues pour responsables ».
D’où l’importance de vérifier la réputation du professionnel avec qui on a décidé de faire affaire auprès de l’ordre des CPA. « D’autant plus qu’en cas de recours, les délais peuvent être très longs, ajoute Jacqueline Lemay. Même si on retrouve l’individu, ça ne veut pas dire qu’on récupèrera l’argent vite. »
Nul n’est à l’abri de ce type de fraude. Face à la recrudescence des cas de vol d’identité, Mme Lemay déconseille en outre de divulguer « en tout temps » des informations personnelles, comme un numéro d’assurance sociale, par téléphone ou en répondant à de prétendus courriels envoyés par Revenu Québec ou Revenu Canada.