Une bouteille de Château Cheval Blanc, Saint-Émilion Grand Cru, 1947 à un prix moyen de 13 276 $, une autre de Baron Philippe de Rothschild Château Mouton Rothschild, Pauillac, 1945 à 17 915 $ ou un Domaine de la Romanée-Conti, Grand Cru, Côte de Nuits, 2005 à un prix moyen de 23 717 $ ! En voyant ces sommes affichées sur le site wine-searcher.com, on a le tournis, sans même ouvrir les bouteilles !
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Au cours des dernières décennies, la spéculation autour des grands vins, ceux de Bordeaux et de Bourgogne surtout, a propulsé les valeurs à des niveaux stratosphériques. L'indice britannique Liv-ex Fine Wine 100, qui suit les variations de prix des 100 crus les plus prisés, dont une très large majorité de Bordeaux, avait grimpé de près de 200 % en cinq ans en 2011.
Ce genre de statistiques sur la hausse des valeurs fait sortir de ses gonds Iegor de Saint Hippolyte, le propriétaire de l'Hôtel des Encans de Montréal. «Cela vous fait rêver à un gain potentiel. Mais c'est de l'information tronquée. Ça fait saliver les gens, les naïfs. Il ne faut pas regarder le passé. Les prix sont le résultat de l'offre et de la demande, aujourd'hui.»
Cet observateur n'a pas tort. Car ce même indice Liv-ex Fine Wine 100 affichait en août un recul de 20,4 % sur cinq ans. Depuis le sommet atteint à l'été 2011, l'indice britannique décline. Un fonds spécialisé dans l'investissement dans les grands crus, le Fine Wine Fund de la firme britannique Wine Asset Managers affiche aussi des reculs en 2011 (- 19,1 %), en 2012 (- 11,7 %), en 2013 (- 3,9 %) et en 2014 (- 9,9). Mais en 2009 et en 2010, il avait respectivement gagné 7,6 % et 35,6 %. Depuis son lancement en 2006, son rendement annualisé est de 8,5 %.
Comme c'est le cas en Bourse, une foule de facteurs viendront influer sur les prix des grands crus. Bien sûr, en plus de la notoriété du domaine ou de la qualité du millésime, la rareté est un facteur important, puisque le nombre de consommateurs augmente tandis que la production des grands crus est plutôt stable. Au cours des dernières années, la Chine a joué un grand rôle dans la progression des prix. Les nouveaux riches chinois sont des amateurs de grands crus et ont contribué à l'explosion des prix. Les enchères sur les sites à Hong Kong sont souvent les plus élevées. Mais le ralentissement de la croissance chinoise a maintenant un impact à la baisse sur les prix dans le marché de la revente.
En plus des achats qui peuvent être faits à la SAQ dans ses succursales spécialisées, les encans «constituent une excellente façon de se bâtir une cave à vin», dit Guillaume Endo, qui a commencé à s'intéresser à l'univers du vin il y a deux ans, d'abord pour des raisons professionnelles. Son cabinet d'avocats avait des mandats de la part d'agences d'importation privées de vins, qui se multiplient au Québec. Selon lui, les encans sont la manière la plus rapide de mettre la main sur des crus réputés qui ne sont plus disponibles à la SAQ et qui ont déjà commencé à prendre de l'âge.
Au Québec, seul l'Hôtel des Encans de Iegor de Saint Hippolyte est autorisé à procéder à des enchères. «Nous en faisons une dizaine par année», dit Laurent Berniard, commissaire-priseur et spécialiste du vin. Ces encans sont faits sous la supervision de la SAQ, car la loi interdit à quiconque de vendre de l'alcool sans la permission du monopole d'État.
Les bouteilles mises aux enchères proviennent de collectionneurs, de successions, de saisies judiciaires ou encore de restaurants. «Nous avons eu les 15 000 bouteilles du restaurant Le Latini lorsqu'il a fermé ses portes», donne en exemple M. Berniard. Ce dernier vérifie la qualité des produits, s'assure notamment des conditions de conservation. Car on veut que les clients soient satisfaits et reviennent. «Nous avons déjà eu un client qui avait un Carré d'as à vendre, soit une caisse contenant quatre bouteilles de chacun des quatre plus grands Bordeaux (Latour, Margaux, Haut-Brion et Pétrus du millésime 2000). Or, sa caisse avait été conservée dans son salon, à 22 degrés. Nous étions consternés. Cela vaut entre 20 000 $ et 30 000 $. On lui a dit, dommage, mais on ne peut pas prendre ce vin en consignation.»
Habituellement, les encans comportent de 500 à 600 bouteilles, divisées en lots. Tout se passe sur le Web. Les lots sont affichés une dizaine de jours auparavant. Pour pouvoir enchérir, il faut s'enregistrer sur le site de l'Hôtel des Encans et y ouvrir un compte. M. Berniard estime que de 200 à 300 personnes participent à chacun des encans. La base de données de l'Hôtel comporte le nom d'environ 6 000 clients acheteurs de grands vins.
Si les encans sont une voie rapide vers la vente ou l'acquisition de grands crus, ils ne sont pas gratuits, évidemment. Pour les vendeurs, l'Hôtel retiendra 20 % du prix de l'enchère plus les taxes. Même chose à l'achat. L'acquéreur paiera 20 % de plus que le prix d'adjudication, là encore taxes en sus. Il faut en tenir compte dans ses enchères !
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L'importation privée
Si on trouve de belles bouteilles à l'étranger, on peut en importer à des fins personnelles. Tout le monde sait qu'après 48 heures hors du pays, on peut rapporter 1,5 litre (l) par personne (soit deux bouteilles de 750 ml) en franchise de taxes. Mais on peut aussi en rapporter davantage, cette fois en payant les droits de douane, la majoration de la SAQ et les taxes. Jusqu'à concurrence de 9 l, soit une caisse de 12 bouteilles de 750 ml, on peut simplement se présenter à la douane, déclarer ses achats avec factures à l'appui et payer les frais requis.
Au-delà de 9 l, mais en deçà de 45 l (soit cinq caisses de 12 bouteilles de 750 ml), il faut obtenir une autorisation d'importation de la SAQ. Le processus se fait sur le site Internet de la SAQ, sur lequel on trouvera le détail de la marche à suivre. Il faut savoir que la SAQ prélèvera sa marge (la «majoration») et qu'il faudra payer la taxe d'accise, la TPS et la TVQ. La facture finale pour ce que l'on croyait être une bonne affaire finira par l'être... beaucoup moins.
Pour se simplifier la vie, on peut toutefois passer par une agence d'importation privée. Il en existe une quarantaine au Québec qui pourront, moyennant commission, faire les démarches requises.
Une cave à vin
Évidemment, une collection nécessite un lieu d'entreposage, car une température constante (de 12 à 14 degrés Celsius) et un taux d'humidité stable (de 50 % à 80 %) sont deux conditions essentielles pour une maturation optimale du vin au fil des années.
Si l'on s'en tient à quelques dizaines ou centaines de bouteilles, des celliers peuvent faire l'affaire. Mais si on veut accumuler des milliers de bouteilles, une cave est essentielle. Les coûts varient selon l'espace requis, l'isolation et le nécessaire appareil de climatisation (ces derniers se vendent entre 1 000 $ et 5 000 $ environ). Pour sa cave de 2 500 bouteilles, Sylvain Huet estime avoir investi au total de 3 000 à 4 000 $.
Si on a des bouteilles de grand prix, mieux vaut aussi les assurer. Encore une fois, les primes vont varier selon la valeur. M. Huet débourse quelques milliers de dollars de plus par année en assurances.
Enfin, la SAQ loue des celliers qui sont situés à son siège social (Au-Pied-du-Courant) et à ses succursales d'Outremont et de l'Île-des-Soeurs. Les celliers ont une capacité qui varie de 400 à 4 000 bouteilles. Le coût annuel est de 2,45 $ par bouteille, plus TPS et TVQ.
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