Thérèse Grenier et Claude Roulez forment un couple à la semi-retraite, parents de deux filles trentenaires et grands-parents comblés. Propriétaires récents d'une nouvelle maison à Saint-Hyacinthe, ils vivent confortablement, mais une question les taraude : pourront-ils léguer assez d'argent à leurs enfants ?
«Si je meurs aujourd'hui, j'ai beaucoup d'argent à léguer, mais je ne sais pas quel sera le montant si je vis jusqu'à 90 ans», laisse tomber Claude Roulez, machiniste de métier. La date de son grand départ est en effet une variable qui complique un peu le calcul en ce qui concerne la valeur de son héritage. Comment savoir ce qu'on laissera derrière ?
Déjà, un portrait à jour et complet de sa situation financière permet d'apaiser bien des inquiétudes. «On a rédigé un testament notarié il y a dix ans, mais il faudrait le changer, parce qu'on a acheté une nouvelle maison depuis», explique Thérèse Grenier.
Au-delà du testament actualisé, effectuer un inventaire de ses biens ainsi qu'un bilan successoral évitera à tout le moins aux proches de jouer au détective au moment du décès.
Par définition, l'inventaire des biens permet d'établir tout ce qu'on détient et ce qu'on veut léguer. Un planificateur financier peut ensuite rédiger le bilan successoral, une liste qui établit la valeur des biens. «Cela permet d'estimer aujourd'hui l'impôt à payer sur la succession», explique Angela Iermieri, porte-parole de Desjardins Gestion de patrimoine et planificatrice financière.
À leur premier testament, Thérèse et Claude avaient omis de dresser l'inventaire des biens, mais comptent bien se rattraper cette fois-ci. «J'aimerais faciliter la vie de nos filles, qu'elles sachent où s'adresser et qu'elles aient tous les papiers en main à notre décès», dit Thérèse.
Ils prévoient aussi une rencontre de famille, au début de 2016, pour transmettre leurs documents à leurs filles et discuter du contenu du testament avec elles. «Ce n'est pas une question délicate pour nous», affirme Claude.
Pour leur remettre une succession clés en main, ils pourront inclure dans leur inventaire tous les biens et les dettes, mais également les renseignements personnels, la liste des documents importants et leur emplacement, ainsi que les coordonnées des professionnels à consulter, comme le notaire.
La succession face à l'impôt
À la succession, tous les biens légués sont réputés être vendus à leur valeur marchande. La différence entre le prix à l'acquisition et à la vente, soit le gain en capital, doit être déclarée.
Claude et Thérèse pourront utiliser plusieurs stratégies fiscales pour réduire l'impôt à payer sur la succession, et ce, de manière totalement légale. Elles seront toutes prévues dans le testament. La première est de léguer ses biens au conjoint, afin que celui-ci n'ait pas à payer d'impôt sur le gain en capital jusqu'à ce qu'il les donne, les vende ou décède.
Le couple possède aussi des REER et des CELI. Ils peuvent être légués au conjoint survivant, le dispensant de l'impôt tant qu'il ne retire pas ses REER, ce qui devient obligatoire à 71 ans. Si le REER est transféré aux enfants, l'impôt sera exigible au décès et les enfants hériteront de ce qui restera. De plus, une résidence principale n'est pas imposée, mais une résidence secondaire, comme un chalet, l'est. Faire don de ses biens permet aussi de payer l'impôt maintenant plutôt qu'à la succession.
S'il y a des dettes, celles-ci sont réglées par la succession. «Les créanciers sont toujours payés avant les héritiers», rappelle Angela Iermieri.
La planificatrice financière conseille de prendre une assurance vie le plus tôt possible afin de maximiser son investissement. Celle-ci permettra d'éponger les dettes à la succession et de payer des arrangements funéraires. Daniel Beausoleil, notaire, y voit un autre avantage : «Il n'y a aucun impôt à payer sur l'assurance vie. Ce sont des liquidités non imposables qui offrent de belles options pour répartir de façon égale les avoirs d'un patrimoine».
C'est ce qu'ont fait Claude et Thérèse, qui ont aussi pris une assurance de soins de longue durée en cas d'invalidité ou de perte d'autonomie importante. «Si les primes ne sont pas utilisées à nos 85 ans, elles vont directement à la succession. Ça fait un très bon montant non imposable», dit Thérèse.
Puisque le couple a été prévoyant et ne vit que de ses pensions, économisant ses salaires de semi-retraités, ses dettes sont minimes. Il pourra donc léguer sa maison, ses biens, ses REER et CELI ainsi que les primes de ses assurances vie à ses deux filles, une somme de plusieurs centaines de milliers de dollars.
Même si le montant est appelé à diminuer avec le temps, il satisfait le couple. Grâce au bilan successoral, leurs craintes sont apaisées quant à l'avenir de leur famille. «Mon prochain objectif, après avoir payé la maison, c'est d'investir dans les études de mes petits-enfants», affirme Thérèse, pleine d'espoir.
Consultez nos vidéos sur les enjeux relatifs à la succession sur notre site Web, à lesaffaires.com/dossier/preparer-sa-succession.
Préparer sa succession
Série 2 de 6. Plus de 50 % de la population n'a pas de testament, dont près de 25 % des 55 ans et plus. Ce qui est susceptible d'entraîner certaines complications pour les proches au décès. Dans une série de six reportages, nous explorons les enjeux liés à la transmission du patrimoine lors du décès et des pistes de solution qui peuvent être empruntées.