Les grands acteurs tels Ubisoft restent la colonne vertébrale de l'industrie du jeu vidéo au Québec. Cependant, l'émergence d'une vague de petits développeurs indépendants transforme tranquillement mais sûrement le paysage.
On les appelle communément les indies. Les studios indépendants continuent de croître au Québec. Ils sont propulsés par «les innovations technologiques, que ce soit sur le plan de la réseautique, de la capacité des bandes passantes ou des réseaux de distribution en ligne», dit Sylvianne Pilon, gestionnaire de projet et responsable de la formation chez TechnoCompétences, le comité sectoriel de main-d'oeuvre des TIC.
Christian Roy, président de ByHumans, un studio indépendant montréalais, est du même avis. Il cite l'exemple d'Unity 3D. Ce logiciel est à la création de jeux ce que Wordpress est à la construction de sites Internet ou YouTube à la diffusion de vidéos. «Ce type d'outils nous facilite la tâche», dit-il.
La démocratisation de l'industrie découle aussi - et surtout - de la popularité des plateformes mobiles et du jeu en ligne. «Le mobile a mené à la création de nombreuses start-ups. Les indies offrent quelque chose de différent», dit Samuel Girardin, pdg de Game On Audio et administrateur chez Alliance numérique.
Miser sur le transmédia
Il n'y a pas que la prolifération de nouveaux studios qui souffle sur l'industrie. Le pdg de Frima Studio, Steve Couture, constate une intensification de ce qu'on appelle le transmédia, soit le développement d'un contenu narratif déployé sur plusieurs médias.
L'entreprise de Québec, qui souffle 10 bougies cette année, est le plus important studio indépendant du pays, avec 350 employés. Elle mise sur cette voie qu'elle considère très prometteuse. «Nous développons actuellement une série d'applications jeunesse dont les personnages devraient se retrouver dans une série télévisée», dit M. Couture. Cependant, Frima n'a pas encore signé de contrat de coproduction.
Steve Couture estime que les studios québécois gagnent à déployer leurs jeux sur plusieurs plateformes. Frima s'est engagée dans cette voie. «Mon ambition est que d'ici cinq ans, Frima développe des marques qui soient déclinées un peu partout. Je veux des produits jeunesse qu'on pourra regarder à la télévision ou au cinéma avec nos enfants et qui nous permettront de jouer avec les mêmes personnages sur les tablettes.»
LES DÉFIS DES GRANDS STUDIOS
LES DÉFIS DES GRANDS STUDIOS
Les studios indépendants prolifèrent, mais les grands studios sont, de loin, les plus importants recruteurs de l'industrie.
Au cours des 10 dernières années, la part de l'emploi total des firmes québécoises de plus de 100 employés est passée de 30 à 90 % dans l'industrie, selon l'étude annuelle sur l'emploi de TechnoCompétences.
Il n'en reste pas moins que les défis des grands développeurs sont considérables. La diversification des plateformes pousse les firmes à faire des choix de segments de marchés et de plateformes. De grands développeurs misent sur la diffusion d'un même contenu sur plusieurs types de plateformes.
Les grands studios bénéficient au même titre que les petits des nouveaux réseaux de distribution en ligne.
Par ailleurs, les joueurs ne consomment plus les jeux de console de la même façon. «Depuis la crise économique, le joueur s'informe beaucoup plus sur la qualité du jeu. Du coup, il en achète moins», dit Samuel Girardin, pdg de Game On Audio.
Est-ce que ces transformations expliquent les suppressions d'emplois effectuées au cours des derniers mois chez Funcom et Electronic Arts et la faillite de THQ ? M. Girardin n'y voit que le signe d'une industrie qui continue de s'adapter. Un point de vue qui rejoint celui de Jayson Hilchie, président de l'Association canadienne du logiciel de divertissement : «Même si des studios ont cessé leurs activités et que d'autres ont changé les types de jeux qu'elles développent, l'optimisme règne au sein de l'industrie canadienne.»
L'industrie en quelques chiffres
2,3 G$ Chiffre d'affaires de l'industrie canadienne du jeu vidéo
27 000 Nombre d'emplois directs et indirects au Canada
8 900 Nombre d'emplois liés à l'industrie au Québec
329 Nombre de studios de développement au pays
72 000 $ Salaire moyen dans les studios de développement
712 % Croissance des emplois de 2002 à 2012 au Québec
Sources : TechnoCompétences et Association canadienne du logiciel de divertissement