Devons-nous à tout prix être ambitieux pour réussir notre vie ? Le sommes-nous assez ? Le sommes-nous trop ? Pour répondre à ces questions et de nombreuses autres qui seront abordées dans cette série sur l'ambition professionnelle, Les Affaires s'est entretenu avec une quinzaine de personnes - entrepreneurs, psychologues, coachs et autres. Tous s'entendent sur deux constats plutôt contradictoires : l'ambition est souvent mal perçue... mais elle est essentielle !
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«C'est la source de motivation pour atteindre des objectifs plus grands que soi. Appliquée au monde des affaires, l'ambition est ce qui permet de créer de la valeur, de bâtir», dit Brigitte Simard, consultante chez Spencer Stuart. Malheureusement, ceux qui cherchent à se détacher de la mêlée sont souvent jugés suspects, comme s'ils n'avaient pas de bonnes valeurs. «Or, c'est le contraire ! Ils redonnent et contribuent à des causes.» Aux yeux de cette chasseuse de talents, le Québec aurait bien besoin d'un débat de société sur l'ambition : «On doit amener les gens à vouloir faire les choses avec plus d'impact.»
D'autant que le besoin d'ambition n'est pas que collectif. Sur le plan individuel, c'est ce qui donne un sens à nos actions. «L'ambition cible un rêve, quelque chose de tellement grand que ça donne le vertige», fait valoir Catherine Privé, pdg d'Alia Conseil, une firme de management et de développement organisationnel. C'est ce qui mène au dépassement de soi.
Ça permet aussi une certaine cohérence. «L'ambition, c'est d'abord s'occuper de soi», explique Gisèle Casavant, vice-présidente de Stratégies Conseils JLB. Qu'est-ce qui me dynamise ? Qu'est-ce qui me satisfait ? «Avoir une ambition claire permet de voir les occasions, mais aussi de faire des choix.» Sans ambition, nous risquons de voguer au gré des opportunités et de nous retrouver là où nous ne le souhaitions pas.
Même l'ex-dragon François Lambert, dont «la vie n'est basée que sur l'ambition», abonde dans le même sens. «Je n'ai pas de limites quand je démarre un projet, mais j'ai des limites sur le style de vie que je souhaite avoir, ce qui influe sur le choix de mes projets.» L'ambition, selon lui, relève d'une quête personnelle, qui se vit sur tous les plans. Cela comprend, par exemple, de vouloir être un bon père. «L'ambition ne peut pas être juste professionnelle, sinon c'est le burn-out assuré.»
Pour éviter de se laisser emporter par le tourbillon de l'ambition, Janie Duquette, conférencière et auteure du livre Les 7 clés du leadership féminin, suggère de se faire un «plan de vie». «C'est le fun le discours disant qu'on peut rêver autant qu'on veut, mais nous sommes à une période où les femmes en ont plein les bras. Il faut penser aux trois sphères de nos vies : personnelle, professionnelle et familiale.»
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Trouver le dosage qui nous convient
Tant pour les hommes que pour les femmes, le problème n'est pas tellement l'ambition elle-même que ses dérives. Et dans un sens comme dans l'autre, elles sont assez fréquentes, s'entendent pour dire les différents intervenants. «Je vois autant de personnes pas assez ambitieuses que de personnes qui le sont trop», raconte Julie Carignan, associée chez SPB Psychologie organisationnelle. Les moins ambitieux peuvent être «frustrants» pour ceux qui souhaiteraient les voir exploiter leur talent, mais ils ne se nuisent qu'à eux-mêmes. Et encore : plusieurs sont très heureux ainsi.
Il en va autrement de la deuxième catégorie, soit les personnes trop ambitieuses. Constamment insatisfaites, elles en demandent toujours plus. Et elles parviennent souvent à leur fin... pour un temps. «Elles arrivent à grimper les échelons, mais comme elles n'ont pas les compétences et le talent, elles causent de gros dégâts», déplore Mme Carignan.
Pour éviter de se retrouver dans cette situation, il faut oser se remettre en question lorsque les choses ne tournent pas comme nous le voudrions, conseille Rose-Marie Charest, présidente de l'Ordre des psychologues du Québec. Quelle est notre participation au problème ? Quels sont nos objectifs ? Sont-ils positifs ? Sont-ils imposés par les autres ou motivés par de mauvaises raisons ?
Car, pour la psychologue, il ne faut pas éviter l'ambition, mais plutôt trouver le niveau d'ambition qui nous convient. «Ce serait terrible d'avoir trop d'ambition, mais ce serait encore plus terrible de ne pas en avoir.» Tant que nous ne nous laissons pas pousser inconsciemment vers des modèles qui ne nous conviennent pas, nous sommes en sécurité, ajoute-t-elle. «L'ambition fait partie de notre bonheur. C'est ce qui permet de s'élever, d'extraire de soi un talent pour le développer et l'amener plus loin.»
Selon eux, l’ambition, c’est...
« Réussir un défi qu’on s’est donné. Ça ne nécessite pas de rêver d’accéder aux plus hautes fonctions. C’est plutôt le dépassement. L’ambition, pour moi, c’est le petit moteur qui nous fait avancer. » – Gisèle Casavant, vice-présidente de Stratégies Conseils JLB
« Le désir de s’épanouir par le défi, de se lancer dans le vide. C’est aller voir jusqu’où on peut aller, tester ses limites. Il s’agit d’une quête personnelle, qui se vit à tous les niveaux. » – François Lambert, investisseur et entrepreneur
« L’énergie qui nous pousse à accomplir des choses, à y mettre les efforts. Mais il faut que ce soit dans la bonne direction, avec une intention positive. » – Catherine Privé, pdg d’Alia Conseil
L'ambition
Série 1 de 4. Se fixer des objectifs et se donner les moyens de concrétiser ses ambitions est plus facile à dire qu'à faire. Cette série vous donnera des outils pour passer à l'action.