Deux autres firmes de génie s'y étaient risquées, mais avaient dû se résoudre à jeter l'éponge faute d'avoir pu trouver une solution adéquate. Ce sera finalement avec l'équipe de Tetra Tech, l'ancien BPR, que la Ville d'Edmonton a pu dire adieu à ses problèmes d'instabilité des vannes dans son usine de traitement des eaux usées. La réussite a même valu à la firme une distinction dans la catégorie Infrastructures aux derniers Grands Prix du génie-conseil québécois, en juin.
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Forts d'une expertise développée pour la première fois dans les années 1990 pour la Ville de Québec, les ingénieurs de Tetra Tech ont mis au point un modèle mathématique de simulation pour ensuite implanter un algorithme de contrôle en temps réel, efficace pour l'usine de la capitale albertaine. Depuis son installation, il y a un an et demi, tout baigne à Edmonton. «Nos travailleurs, qui sont à la fine pointe de la technologie dans le domaine, se sont servis des capteurs du niveau de débit dans le réseau pour contrôler les vannes et ainsi réguler le débit acheminé à l'usine en cas de précipitations», explique le président de la division québécoise de Tetra Tech, Denis Harvie.
Expansion du marché nord-américain
C'est ce genre d'expertise sophistiquée que la firme a commencé d'exporter à l'extérieur de la province au cours des dernières années, une démarche facilitée par son intégration, en 2010, au groupe américain Tetra Tech. Cette multinationale, dont le siège social se trouve en Californie, compte 60 bureaux au Canada et plus de 14 000 employés à l'échelle internationale. «Nous avons dorénavant accès à un marché qu'il nous aurait été impossible de percer seuls», soutient Denis Harvie, qui est aussi l'un des anciens actionnaires principaux de BPR.
En joignant leurs forces à celles des divisions ontariennes et albertaines de Tetra Tech, son équipe a ainsi pu remporter un contrat de 800 millions de dollars pour relier différents réseaux de production d'électricité en Alberta. Parmi les 110 travailleurs affectés à ce mandat, 70 étaient des ingénieurs et des techniciens québécois. «Nous visons surtout les créneaux pour lesquels nous avons développé une expertise chez nous. Dans ce cas-ci, ce que nous avons fait en Alberta, nous l'avions déjà livré à Hydro-Québec dans le cadre d'un autre projet», dit-il. Une autre collaboration en Saskatchewan leur a permis de travailler sur un important projet de modernisation de four à combustion d'uranium. «De moins de 5 % il y a cinq ans, la part de nos employés devant se déplacer à l'extérieur du Québec pour le travail tourne maintenant autour de 20 à 25 %», estime Denis Harvie.
La direction avait décidé, après avoir ouvert des bureaux en Afrique, en Jamaïque et en Australie, de concentrer ses efforts sur l'expansion de son marché nord-américain. «Nous nous sommes vite rendu compte que ce serait difficile de faire du génie à distance, ne serait-ce qu'en raison des fuseaux horaires», explique-t-il. Ces succursales internationales ont depuis été intégrées à Tetra Tech Industries.
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Les méthodes de travail n'étant pas toutes les mêmes dans les nouveaux marchés nord-américains de Tetra Tech, les ingénieurs québécois doivent faire preuve de polyvalence. Au Canada anglais et aux États-Unis, la tendance dans les travaux en bâtiments publics est à la collaboration entre les ingénieurs et les architectes et, parfois, les entrepreneurs. «Avec Tetra Tech, nous commençons à prendre ce mode de réalisation en considération. À mon avis, il fera son chemin jusqu'au Québec avec le temps», indique Denis Harvie.
L'objectif d'une telle planification est de pouvoir offrir au client non seulement l'ingénierie, mais aussi la conception, l'approvisionnement et la construction. Tetra Tech a présenté des soumissions selon cette formule au Québec et s'est déjà portée acquéreur d'un entrepreneur albertain pour ses travaux sur les oléoducs de TransCanada. Le concept pourrait aussi être repris pour le nouveau pont reliant les villes de Windsor et de Detroit, un projet auquel la firme est censée participer.
Éthique accentuée
L'acquisition de BPR par le groupe américain s'est aussi traduite par l'implantation d'un rigoureux protocole d'éthique. «L'éthique était déjà importante pour nous, mais nous avons insisté encore plus sur ce point. Tous les employés qui sont passés de BPR à Tetra Tech ont été évalués et ont suivi des formations sur l'éthique ; le dossier d'un candidat est examiné avant chaque embauche et nous avons un avocat d'entreprise responsable de l'éthique», énumère Denis Harvie.
Sans surprise, la commission Charbonneau sur les allégations de collusion et de corruption dans l'industrie de la construction a entraîné une baisse des revenus dans le secteur municipal pour Tetra Tech, les instances publiques ayant été moins disposées, ces dernières années, à accorder des contrats. Le prix des métaux a quant à lui chuté, ce qui a engendré une pression de plus sur les activités de la firme. «Les projets commencent à reprendre, petit à petit. En contrepartie, nous avons connu une forte croissance dans le nombre de projets menés à l'extérieur de la province depuis 2010», souligne le patron de Tetra Tech au Québec. La firme a 9 000 projets en cours un peu partout en Amérique du Nord, dont la durée peut osciller entre deux jours et plusieurs années. De quoi donner du travail aux quelque 1 400 employés québécois de l'entreprise.
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