Comme en témoigne le récent rachat de Dessau par l'albertaine Stantec, la consolidation se poursuit chez les firmes de génie-conseil québécoises. L'enjeu : rétablir leur réputation tout en déployant des stratégies pour rester compétitives sur les marchés mondiaux.
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«Les nouvelles se répandent rapidement. Les clients s'intéressent de près à la réputation des firmes.» Erik Ryan, vice-président directeur, marketing, stratégie et relations extérieures de SNC-Lavalin, l'admet, les révélations de la commission Charbonneau ont fait mal à la réputation mondiale du génie-conseil québécois.
SNC-Lavalin, qui se classe cette année encore au premier rang du top 15 des firmes de génie québécoises (voir notre tableau en page 31) relativement au nombre d'employés dans la province (5 678), a dû donner un solide coup de barre. La firme a mis sur pied un programme de conformité et d'éthique, sous la direction du chef de la conformité Andreas Pohlmann. Ce programme prévoit notamment des formations annuelles pour tous les employés, partout dans le monde. Andreas Pohlmann est passé, le 1er juin, à un rôle-conseil axé sur les démarches de conformité auprès de la Banque mondiale. Il a été remplacé par David G. Wilkins.
«Nous n'avions pas le droit à l'erreur», avance Erik Ryan. Selon lui, l'autorisation de soumissionner sur des contrats publics accordée par l'Autorité des marchés financiers montre que les efforts de la firme ont été remarqués. Mais ça ne change pas tout. «Il faudra un peu de temps pour retrouver notre place.»
SNC-Lavalin vise à devenir un acteur encore plus important dans le secteur du gaz et du pétrole, de même qu'à augmenter ses parts de marché dans les Amériques et au Moyen-Orient. À ce titre, la vente en mai dernier de ses parts dans Altalink, la plus importante société albertaine de transport d'électricité, pour 3,2 milliards de dollars au conglomérat américain Berkshire Hathaway, a servi à monnayer l'achat de Kentz Corporation. Cette firme du Royaume-Uni spécialisée dans le pétrole et le gaz compte 15 000 employés.
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De Genivar à WSP Global
Genivar a aussi dû faire des efforts pour se remettre des éclaboussures de la commission Charbonneau. Elle a profité de l'achat de WSP en 2012, une firme britannique deux fois plus grande qu'elle, pour se rebaptiser WSP Global, rafraîchir ses codes d'éthique et créer un poste de chef de l'éthique. La firme arrive troisième au top 15 des firmes québécoises, derrière Dessau, récemment achetée, avec 2 128 employés au Québec.
L'acquisition récente de l'américaine Parsons Brinckerhoff, avec l'appui de la Caisse de dépôt et placement du Québec et de l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada, double presque sa taille, faisant passer son chiffre d'affaires de 2 à 3,8 G$. «Cette acquisition fait de nous le numéro un du transport aux États-Unis», précise Isabelle Adjahi, directrice des communications de WSP. Parsons Brinckerhoff a notamment réalisé les plans du métro de New York au 19e siècle.
WSP Global vient d'être sélectionnée pour contribuer à la conception du plan du nouvel aéroport international Hamad, à Doha, et réaliser la conception d'un nouveau tronçon du métro de Stockholm. Plus près de nous, la firme fait partie des trois finalistes pour le nouveau pont sur le Saint-Laurent, qui remplacera l'actuel pont Champlain, et tente de devenir candidat au chantier du futur échangeur Turcot. C'est toutefois à Dubaï que ses ingénieurs ont connu le plus de sensations fortes. Ils ont en effet réalisé une plateforme temporaire installée au sommet de la tour Burj Khalifa, haute de 828 mètres, de laquelle deux Français ont sauté dans le vide, en avril, afin de battre le record de saut extrême (base-jump).
Cliquez ici pour consulter le dossier Ingénieurs: Savoir rebondirTravailler autrement
Seule parmi les 15 plus grandes firmes actives au Québec à avoir augmenté son nombre d'employés, Bouthillette Parizeau (258 employés) est surtout active dans le bâtiment. Son pdg, Claude Décary, confie que les craintes d'un ralentissement dans ce domaine l'amènent à gérer de manière hebdomadaire ses effectifs et la charge de travail de ses employés. «Les finances publiques sont restreintes, et il y a beaucoup de problèmes d'infrastructures au Québec, que ce soit les routes ou les ponts, note-t-il. On peut penser que les dépenses se feront d'abord dans ces secteurs. Le bâtiment a profité de grands projets ces dernières années, notamment les deux mégahôpitaux montréalais, donc ça pourrait ralentir.»
La nature du travail tend aussi à changer, en raison de la popularité des partenariats public-privé (PPP). «Nous avons une fonction de conseil à laquelle nous tenons et que nous exerçons quand nous faisons affaire directement avec le donneur d'ouvrage, explique le pdg. Mais en PPP, notre client, c'est l'entrepreneur général. Nous avons peu accès au promoteur du projet pour le conseiller. C'est une manière différente de travailler.»
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