Therapedic vendait ses matelas à des géants du meuble tels que Brault et Martineau, Dagenais et autres depuis des années. Il y a deux ans et demi, la PME de Granby, qui fabrique matelas, sommiers et ressorts ensachés, a décidé de changer son fusil d'épaule. Elle a cessé de vendre ses produits aux grands magasins pour s'adresser directement aux particuliers en ouvrant son usine de 60 000 pi2 au public. Fini les intermédiaires ! C'était une question de survie.
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«Impossible de lutter contre les matelas faits en Asie qui coûtaient moins cher que notre prix de revient», explique Robert Valverde, président de Therapedic. Difficile aussi de continuer de se plier aux demandes des grands magasins et de leurs centrales d'achat, «toujours plus gourmands». Même si Robert Valverde sait que la conjoncture est aussi délicate pour eux, «à un moment donné, on ne pouvait pas aller plus loin, ce n'était plus rentable».
Réduction de coûts
L'entreprise avait déjà mécanisé sa chaîne de production et fait les efforts nécessaires pour réduire son coût de revient. Malgré son offre diversifiée - une gamme généraliste et des produits de niche : matelas de véhicules récréatifs, de lits escamotables, de lits ajustables électriques -, elle n'entrevoyait pas l'avenir avec optimisme.
Il fallait trouver une autre solution. Les deux associés, Robert Valverde et Joël Le Coze, ont décidé de prendre les grands moyens. Grâce à une nouvelle façon de vendre ses produits, l'entreprise a pu afficher un prix de vente concurrentiel et a radicalement réduit ses coûts de main-d'oeuvre. Elle est passée d'une soixantaine d'employés à une vingtaine, éliminant les représentants et les chauffeurs de camion. Elle a aussi pu se concentrer plus encore sur la personnalisation des produits et le sur-mesure - la fabrication d'un matelas deux places ferme d'un côté et plus souple de l'autre par exemple - qu'elle offrait déjà. C'est un atout majeur pour sa clientèle actuelle.
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Croissance de 80 % par mois
«Il faut avoir les reins solides pour prendre ce genre de décision, car il a fallu attendre un an et demi entre le moment où nous avons perdu les distributeurs et celui où les premiers clients sont arrivés à l'usine», reconnaît Robert Valverde.
Aujourd'hui, ce sont les employés de l'usine qui accueillent les consommateurs. Ils les guident dans leur choix, leur explique la différence entre les 40 modèles fabriqués par l'entreprise. Seuls ceux qui sont à l'aise dans le rôle de vendeur remplissent cette fonction, et ils ont suivi une formation à l'interne dans ce but. La gestion est plus complexe, puisque les clients sont nombreux et tous des amateurs, contrairement aux distributeurs qui connaissaient le domaine et étaient souvent représentés par un groupement d'achat. Lorsqu'un employé s'occupe d'un client, un collègue doit le remplacer à son poste de travail. Mais les dirigeants de l'entreprise ne regrettent pas leur décision.
La réussite est au rendez-vous : «la croissance est de 80 % par mois depuis le début de l'année», se réjouit M. Valverde. L'usine, qui peut produire 200 matelas par semaine, est désormais ouverte sept jours sur sept et accueille en moyenne une cinquantaine de clients par semaine. «Sur 10 clients, on conclut en moyenne 8 ou 9 ventes, dit le président. Les gens aiment le contact avec les employés, qui ne font pas de pression pour vendre.»
Comme le concept semble plaire, mais que le bassin de clients reste cantonné aux alentours de l'usine, les deux associés ont ouvert deux magasins, l'un à Longueuil et l'autre à Laval. «Peu de gens feront 70 ou 80 km pour aller s'acheter un matelas», observe Robert Valverde.
Les pistes de croissance sont nombreuses - diversification, ouverture de nouveaux magasins d'usine - et pas encore arrêtées. «On avance dans les créneaux qui sont moins accessibles aux marchands traditionnels», indique Robert Valverde. Mais une chose est sûre : l'entreprise de Granby créée en... 1888 (elle fabriquait des meubles en rotin et en osier à l'époque) s'inventera un avenir.