À Sept-Îles, on se réjouit ces jours-ci que les 500 MW promis par Hydro-Québec permettent l'agrandissement de l'aluminerie Alouette. Mais ce qu'on ne sait peut-être pas, c'est que l'administration portuaire de la ville a contribué elle aussi à la réalisation de cette phase 3.
En 2009, quand le gouvernement fédéral a annoncé un programme d'infrastructures spécial pour lutter contre la récession, le port de Sept-Îles et son client Alouette ont mis moins d'une semaine pour lui présenter un projet bien ficelé, celui de l'optimisation du terminal de la relance, qui a préparé le terrain pour la phase 3 d'Alouette.
Au grand plaisir d'André Martel, pdg d'Alouette, Ottawa a accepté de payer 44 millions de dollars (M $) des travaux.
M. Martel n'a donc pas qu'Hydro-Québec à remercier. «Ce que j'aime chez les gens du port de Sept-Îles, c'est qu'ils cherchent toujours à être le meilleur partenaire plutôt que de se contenter d'être à notre service, dit-il. Ils voient nos besoins et savent comment les arrimer aux programmes gouvernementaux.»
C'est ainsi que le port de Sept-Îles a mis la main sur le tiers du financement fédéral portuaire, auquel 16 autres ports du pays sont admissibles.
Une très petite équipe
Le port de Sept-Îles est pourtant géré par une très petite équipe. Au port de Montréal, ils sont 350 employés permanents. À Vancouver, 180. À Québec, 50. À Sept-Îles ? Huit !
Certes, Sept-Îles assume moins de responsabilités que ces autres ports (il n'a pas de réseau ferroviaire ni de marina, il ne fait pas l'entretien de ses terminaux, etc.). Mais selon ses dirigeants et ses clients, la réussite du port tient à l'agilité de cette équipe réduite, conjuguée au boom des métaux.
«Si on a viré de bord si vite, c'est parce qu'on est en symbiose avec nos partenaires et qu'on sait saisir les bonnes occasions, indique Pierre Gagnon, pdg du port. Il n'y a pas de recette magique : dès que tu vois s'ouvrir une fenêtre, tu sautes dedans avant qu'elle ne se referme.»
Avant d'être cédé à la municipalité en 1999, dans le cadre d'une nouvelle politique maritime, le port de Sept-Îles comptait 15 employés et il était beaucoup moins actif qu'aujourd'hui. Au cours des dernières années, il a connu une expansion fulgurante.
Le virage a été amorcé avec l'arrivée de Consolidated Thomson, en 2006. Puis, le boom minier a démarré. En 2010, pas moins de 250 M $ ont été investis dans le port.
Dans les prochaines semaines, l'équipe espère recevoir une autre contribution fédérale, pour un quai multi-usager de 230 M $ qu'elle a promis aux minières et qui devrait accueillir d'immenses navires de type Chinamax.
Aujourd'hui, l'équipe interne est notamment composée d'un expert en ingénierie minière, fort en développement des affaires ; d'un ancien expert en gestion ferroviaire ; et d'une spécialiste en relations gouvernementales et demandes de financement. Beaucoup d'activités sont imparties, et on recrute des stagiaires en génie civil l'été.
«C'est un cadeau qu'Ottawa nous a fait que de nous céder la gestion du port, estime Carol Soucy, président du CA du port. On est efficaces, rapides, hands on parce qu'on se connaît tous ; on se rencontre au supermarché, sur le terrain de golf, partout.» L'étroitesse des liens renforce la réactivité des gens d'affaires de Sept-Îles.
La complicité entre administrateurs
Le CA est la «carte maîtresse» du port de Sept-Îles, selon Pierre Gagnon. Il est stable, et ses membres n'hésitent pas à mettre l'épaule à la roue. Carol Soucy, un entrepreneur à succès de la région, qui a dirigé trois bateaux de pêche et deux usines avant de fonder une société de location d'hélicoptères, donne l'exemple du faible taux de roulement : deux fois président (en 1999 et depuis 2008), il a siégé au CA à titre de membre pendant sept années non consécutives.
M. Soucy parle de la complicité «hors du commun» qu'il entretient avec le pdg Pierre Gagnon. «Il sait ce que je pense avant que je le lui dise.»
Raynald Ouellet, directeur de l'exploitation, croit que la réussite tient aussi à la planification - «Chaque heure de planification en fait gagner quatre sur le terrain», dit-il - et à la gestion participative des projets. «Le client reste à la table tout au long du projet, et la table est décisionnelle, explique-t-il. Si bien que chaque problème est réglé au fur et à mesure qu'il se présente.» Au port, les budgets et les délais sont toujours respectés.
Au sein de l'équipe interne, on se partage le travail selon les compétences, explique encore M. Ouellet. Mais l'effectif devra toutefois être augmenté pour faire face à la croissance, ajoute-t-il. «Les gens ont mis les bouchées doubles au cours des deux ou trois dernières années», opine Pierre Gagnon. Le port de Sept-Îles a récemment peaufiné son image de marque. Sur ses documents, en plus du logo du port, on trouve l'inscription XXL. C'est pour refléter la performance de l'équipe, dit-il.
Pierre Gagnon
Ingénieur minier
(Cambior, Québec Cartier Mining)
Raynald Ouellet
Gestionnaire d'activités ferroviaires
(Québec Cartier Mining)
Patsy Keays
Relations gouvernementales et financement
(SADC)
Diane Morin
Comptabilité
(Port de Sept-Îles)
Carol Soucy
Entrepreneur
(Héli-Excel, Pêcheries commerciales Soucy)
85 %
Proportion du trafic du port qui concerne des liaisons internationales.
1 G$
Le port génère chaque année une activité économique d'un milliard de dollars.
4 000
Nombre d'emplois directs et indirects liés au port.