Quelle que soit la stratégie de placement adoptée, les chefs d'entreprise omettent souvent de considérer la question fiscale. Une erreur regrettable, car la fiscalité peut permettre d'économiser en impôt des sommes parfois significatives.
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En temps de crise, les entrepreneurs qui enregistrent quelques excédents de trésorerie peuvent être tentés par certaines stratégies de placement. Cependant, dans le maquis de la fiscalité, il faut connaître quelques principes de base avant de se lancer dans ces opérations.
«Il existe beaucoup de règles méconnues qui s'appliquent aux sociétés par actions, aux fiducies, aux individus ou aux sociétés de personnes... Le contexte peut être différent selon qu'on réside au Québec ou ailleurs», explique Daniel Fortin, associé, services fiscaux chez PwC. Il rappelle que la coexistence des deux paliers gouvernementaux n'aide pas à éclairer les entrepreneurs.
Le principe d'intégration
Bien que le système canadien fasse en sorte que l'imposition des revenus soit à peu près la même, que les sommes soient détenues par un individu ou par une société, «de nouvelles dispositions adoptées par le gouvernement du Québec font qu'un particulier qui a des revenus annuels de 100 000 à 125 000 $ au moins profiterait d'un léger avantage s'il les touchait par l'intermédiaire d'une société plutôt qu'en tant que particulier, ce qui n'était pas le cas il y a cinq ans», avance Anne-Marie Dupras, associée en fiscalité chez Deloitte. En effet, le taux d'imposition sur les intérêts est de 46,57 % pour les sociétés, par rapport à 49,97 % pour un particulier. Même tendance en ce qui concerne l'imposition des dividendes (33,33 %, par rapport à 35-38 % pour un particulier) et les gains en capital (23,03 %, par rapport à 25 %).
De même, les revenus issus de dividendes sont moins taxés que les intérêts, car «contrairement à d'autres pays comme les États-Unis, le gouvernement tient compte du fait que les dividendes ont déjà été imposés au niveau de la société. Il s'agit du principe d'intégration», souligne Mme Dupras.
Ainsi, si une entreprise détient des placements, par exemple des actions en Bourse d'une société publique ou privée, et qu'elle réalise un gain lors de la vente de ce placement, «ce gain ne sera imposable qu'à hauteur de 50 %, tandis que la portion non imposable pourra être reversée sans impôt, sous forme de dividendes en capital, à un actionnaire», souligne Anne-Marie Dupras. Un élément de planification financière qui pourrait s'avérer intéressant et dont il faudrait tenir compte.
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Trop de liquidités
Attention également à ne pas conserver trop de liquidités ! En plus de provoquer des reports d'impôts, l'immobilisation de cet actif peut devenir un risque à plusieurs titres : «Si la société connaît un jour des difficultés, cet actif ne sera pas protégé des créanciers, car il sera considéré comme faisant partie de l'entreprise», rappelle Patricia Besner, notaire, planificatrice financière et fiscaliste en gestion de patrimoine chez Desjardins.
Si vous songez un jour à revendre votre entreprise, l'actif excédentaire (encaisse, certificats de dépôt, actions, obligations, etc.) ne doit pas excéder 10 % de la valeur de l'entreprise au moment de la vente. «Au-delà de ce seuil, vous ne pourrez pas récupérer l'exonération en gain de capital (813 600 $ de gains en capital maximum par personne) à la revente», prévient Mme Besner.
«Cet élément est très souvent oublié par les entrepreneurs qui ne sont pas conseillés par des fiscalistes», ajoute Mme Dupras. Elle préconise de reverser l'argent aux actionnaires ou à une autre société, ou bien de régler les comptes fournisseurs. C'est pourquoi certains propriétaires créent une société de gestion (holding), «qui permet de mettre l'argent à l'abri des créanciers et de le faire circuler par l'intermédiaire de dividendes intersociétés qui ne sont pas taxables», souligne Daniel Fortin, associé, services fiscaux, chez PwC.
Réinvestir ou dépenser ?
Il est également conseillé de réinvestir dans l'entreprise, afin d'améliorer sa compétitivité tout en bénéficiant de crédits d'impôt à l'investissement pour l'acquisition de biens manufacturiers. Cependant, on peut aussi être tenté de disposer de cet argent pour réaliser des achats personnels, comme un chalet ou une voiture. «L'actionnaire qui utilise un bien de la société pour son usage personnel devra le déclarer à la fin de l'année sur sa déclaration de revenus comme un avantage imposable», souligne Mme Besner.
En règle générale, il importe donc de se pencher au moins un mois avant la fin de l'année sur ses comptes pour faire le point sur sa situation. «Si vous avez par exemple un gain en capital de 500 000 $, et que vous avez de l'autre une perte en capital de 500 000 $, pourquoi payer l'impôt sur les 500 000 $, alors que vous pouvez vendre le titre, réaliser sa perte, et ne pas avoir d'impôt à payer ?» illustre Daniel Fortin.
D'après lui, une bonne planification permet d'économiser jusqu'à 600 000 $ d'impôt en 10 ans, soit 60 000 $ par an. «On peut ainsi changer de mode de rémunération, diminuer les salaires, avoir des remboursements d'impôt, le tout en fonction des besoins et de la situation de l'entreprise», estime-t-il.
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Gestion des liquidités
Série 2 de 4. Des conseils d'experts pour ne pas laisser dormir son bas de laine, mais s'en servir plutôt comme d'un levier en vue de croître et de prospérer.